Selon le baromètre RH de la mobilité interne, 87 % des entreprises affirment que ce processus représente un enjeu stratégique.
En effet, le recrutement externe n’est pas toujours la meilleure solution pour pourvoir un poste. D’autant plus en sachant que 71 % des professionnels des ressources humaines estiment que recruter est devenu beaucoup plus difficile depuis 1 an (Etat des lieux du parcours candidat, 2023).
Alors, comment mettre en place une politique de mobilité interne ? Quels sont ses avantages ? Quelles sont ses limites ? Explications.
Qu’est-ce que la mobilité interne ?
Aujourd’hui, 53 % des entreprises – contre 48 en 2017 – affirment disposer d’un processus de mobilité interne.
Dans un contexte où les difficultés de recrutement font rage dans nombre de secteurs, cette démarche fait partie d’une véritable stratégie de fidélisation des talents.
- Le saviez-vous ? Selon un rapport de la Dares, davantage de salariés ont changé d’entreprise en 2022 qu’avant la crise sanitaire. Ce phénomène touche l’ensemble des secteurs d’activité. Ainsi, au 1er trimestre 2023, 350 800 emplois sont vacants au sein des entreprises de plus de 10 salariés.
Mais en quoi consiste exactement la mobilité interne ? Cette pratique consiste à pourvoir un poste, sans recruter en externe. Le changement ou l’évolution de fonction d’un salarié se déroule au sein d’une même entreprise.
Plusieurs types de mobilités professionnelles internes existent :
- mobilité verticale (ou fonctionnelle) : les responsabilités du collaborateur augmentent, généralement à la suite d’une promotion. Cependant, il ne change pas de service.
- horizontale : il demeure au même niveau hiérarchique mais il change de service.
- transversale : il gagne en responsabilité et travaille au sein d’un autre service.
- géographique : le salarié part travailler dans une filiale du groupe ou une autre zone géographique.
La mise en place de ce processus dépend, entre autres, de la culture d’entreprise, de son secteur d’activité, de sa taille, etc. Selon une étude de l’APEC, 40 % des managers qui ont connu une mobilité interne étaient en poste dans une entreprise de plus de 1 000 salariés. Au contraire, seulement 7% des cadres en ont bénéficié dans les entreprises de moins de 50 salariés.
Le rapport d’étude de l’APEC révèle que, de façon globale, “la satisfaction apportée par la mobilité interne est du même ordre, bien qu’un peu moins forte, que celle consécutive à un changement d’entreprise.”
Selon les entreprises, les objectifs de la mise en place d’un tel processus sont la fidélisation des collaborateurs, le développement des talents et l’amélioration de la marque employeur.
Deux options sont possibles pour déployer ce processus.
Soit un poste se libère et l’offre d’emploi est transmise aux salariés de l’entreprise (tous ou certaines catégories). Dans ce cas, l’équipe RH peut s’appuyer sur un vivier interne afin d’identifier rapidement les profils répondant aux attentes du poste.
Ce vivier répertorie les collaborateurs en poste susceptibles d’être intéressés par des perspectives d’évolution professionnelle, ou par un changement d’emploi. Il se présente sous la forme d’une base de données répertoriant les informations clés des talents : chaque compétence professionnelle, leurs expériences, les formations suivies et leurs besoins, les feedbacks des managers, les résultats obtenus, les conclusions de l’entretien annuel…
Soit le manager a déjà pensé à un collaborateur en particulier et le changement de poste s’opère sans créer d’offre d’emploi.
On parle de mobilité volontaire si le salarié a fait part de ses souhaits en amont, ou de mobilité pilotée lorsqu’elle est initiée par un tiers (manager, responsable de service etc.).
Les avantages et les inconvénients de la mobilité interne
Quels sont ses avantages ?
Miser sur le recrutement en interne est une stratégie offrant de multiples avantages à l’employeur.
L’étude myRHline, menée en partenariat avec Cornerstone et Elevo, révèle que les entreprises qui pratiquent la mobilité interne réussissent 1/3 de leurs recrutements via ce processus.
Par ailleurs, 56% des organisations qui sont dotées de ce processus considèrent que le recrutement par mobilité interne est plus performant que le recrutement à l’externe.
Celle-ci permet également de développer la fidélisation des salariés. Pourquoi ? Elle offre aux équipes de nouvelles perspectives en termes d’évolution, de changement de carrière, de localisation géographique etc.
En leur permettant d’évoluer en interne, les employés se sentiront valorisés et seront en mesure de se projeter à moyen et long terme.
Ils développeront un sentiment d’appartenance bénéfique à leur motivation au travail et leur engagement.
- Les employés restent 41% plus longtemps dans les entreprises où le recrutement interne est important, par rapport à celles où le recrutement interne est faible (étude LinkedIn, Tendances mondiales du recrutement, 2020).
Elle œuvre également en faveur du développement des talents et contribue à pérenniser les compétences au sein de l’organisation. Réorganiser ses effectifs en fonction du contexte accroît la capacité à mieux répondre aux besoins et enjeux de l’entreprise.
De plus, qui dit recrutement interne, dit onboarding facilité. Le salarié sera peut-être chargé de nouvelles responsabilités, mais il connaîtra déjà le fonctionnement de l’entreprise, sa culture, son environnement voire même, ses collègues de travail. Sa montée en performance devrait être plus rapide et efficace. De plus, il peut progressivement prendre ses fonctions, sans respecter de préavis.
La gestion de la partie administrative sera également simplifiée puisque vous disposez déjà de toutes les informations nécessaires sur la personne.
Au niveau financier, ce processus permet de réduire les coûts de recrutement. La diffusion des offres et la stratégie de communication mise en œuvre sont moins coûteuses en interne qu’à l’externe. Par ailleurs, les coûts liés à l’onboarding et à sa formation sont moindres.
Connaître le salarié bénéficiant d’une mobilité vous permet de limiter les risques d’une “erreur de casting” : vous vous assurez de son adéquation avec vos valeurs ainsi que de ses compétences (hard et soft skills).
Enfin, elle contribue à votre marque employeur en attirant et en rassurant les candidats potentiels sur leurs perspectives de développement.
Qu’en est-il du côté des salariés ? 60% des collaborateurs préféreraient une mobilité interne à un mouvement externe (étude étude Hays sur le recrutement, 2021). À l’heure du quiet quitting, le danger du manque de mobilité, ce n’est pas seulement le risque de départs mais c’est aussi le risque de désengagement.
Rappelons également que selon le rapport de l’Institut pour le Futur en 2017, « 85% des métiers qui seront exercés en 2030 n’existent pas encore ». En ce sens, la mobilité interne représente, pour les collaborateurs, un bon moyen de développer leur employabilité.
Les inconvénients de ce processus
Même si ce processus présente de multiples avantages, il convient de connaître ces limites.
Déployer cette démarche nécessite d’analyser quels sont les postes pouvant en bénéficier. Certains postes techniques ou stratégiques à pourvoir nécessitent une expertise poussée. Il peut être dans l’intérêt de l’entreprise d’aller chercher des compétences à l’extérieur afin d’apporter un “nouveau souffle” à certains projets.
De plus, le recrutement interne ne doit pas faire émerger des problématiques de sous-effectifs.
L’anticipation est indispensable pour que le service qui se sépare d’un de ses collaborateurs soit en mesure de rééquilibrer la charge de travail globale, sans surcharger l’équipe restante.
Il faut également noter qu’au sein des PME, les opportunités de mobilité sont moindres. Ce qui pourrait entraîner de la frustration parmi le personnel.
Quels sont les principaux freins à sa mise en place ?
Les principaux freins selon les organisations qui disposent d’un processus de mobilité interne sont les suivants :
- Les managers ne jouent pas le jeu
- La culture d’entreprise
- Les salariés ne sont pas proactifs dans leur carrière
- Bien que les entreprises fassent état du fait que les salariés ne sont pas proactifs dans leur carrière, elles affirment que dans 60% des cas, c’est le salarié qui se déclare candidat (contre 40% à l’initiative des RH ou du N+1).
Concernant les outils nécessaires au déploiement de ce processus, seulement 9% des entreprises sont dotées d’un référentiel de compétences à jour et exploitable. Mettre à jour un référentiel implique de suivre par plusieurs étapes qui peuvent être chronophages :
- Élaborer la cartographie complète des compétences actuelles mobilisées par l’ensemble des salariés.
- Répertorier tous les métiers.
- Relever les écarts entre les compétences actuelles et les compétences nécessaires, en s’appuyant sur les objectifs et la stratégie globale de l’entreprise.
- Définir des plans d’action RH.
Pourquoi si peu d’entreprises ? Cet exercice est complexe à réaliser et se heurte à plusieurs limites : le manque de temps, d’outils, de méthodologie quant à sa gestion, etc. En outre, les compétences deviennent obsolètes de plus en plus rapidement. L’émergence de l’intelligence artificielle ne simplifie pas la tâche aux équipes RH.
L’impact de ChatGPT sur le monde professionnel n’est pas encore mesurable. Toutefois on sait que 7800 postes pourraient être remplacés par l’Intelligence Artificielle chez IBM. Arvind Krishna, le PDG de la multinationale, a d’ailleurs affirmé : “D’ici à cinq ans, environ 30 % de nos postes qui ne sont pas en relation directe avec nos clients pourront être automatisés et remplacés par des IA”.
Toutefois, l’IA pourrait créer plus d’emplois qu’elle n’en fait disparaître selon une étude de l’Organisation Internationale du Travail (août, 2023). Cette technologie permettra “d’accompagner plutôt que de remplacer certaines activités« . La plupart des industries ne seraient que partiellement exposées à l’automatisation mais leur poste évoluerait. Le développement des compétences est donc primordial pour s’adapter au monde de demain.
Alors, comment mettre en place ce dispositif au sein de votre entreprise ?
Comment favoriser la mobilité interne ?
Tout d’abord, l’entreprise doit identifier les besoins en compétences de son entreprise. Pour ce faire, les professionnels des ressources humaines disposent de plusieurs outils de GEPP (Gestion des Emplois et des Parcours Professionnels, anciennement GPEC) à leur disposition.
Le référentiel de compétences et la people review font partie des outils phares au service du déploiement de la mobilité interne.
Les feedbacks représentent également une source d’informations précieuse. Ils peuvent provenir des entretiens professionnels ou annuels des salariés avec leurs managers. Être doté d’un outil digital adapté peut faciliter la retranscription et le suivi de ces feedbacks.
Pour déployer ce processus, il est essentiel d’impliquer la direction générale, d’aligner le management, de communiquer auprès des salariés concernés par cette démarche et d’aligner votre marque employeur avec celle-ci.
En effet, pour réussir sa mise en place, il faut inscrire le développement des compétences dans votre culture d’entreprise. L’objectif : donner envie aux salariés de postuler et impliquer les managers dans cette démarche. Ce sont effectivement les premiers à pouvoir repérer les profils pouvant correspondre aux postes à pourvoir.
Enfin, vous pouvez formaliser votre politique en instaurant une charte de mobilité interne qui précisera les conditions d’accès à un poste, les modalités pour consulter les offres, le processus de candidature et les critères de sélection.