Vous l’avez loupée sur LinkedIn ? Christelle Vaugelade-Kalipé est DRH chez Bene Bono & DRH freelance. Sa mission? Structurer la fonction RH, piloter la croissance des équipes et déployer une culture d’entreprise inclusive et performante. Nous avons passé 20 minutes avec Christelle pour comprendre qui elle est. Si près de 13 000 personnes suivent Christelle Vaugelade-Kalipé sur LinkedIn, ce n’est peut-être pas par hasard.
Christelle, quel est ton parcours ?
J’ai démarré chez Adecco, en recrutement, avant de passer très vite à des fonctions RH généralistes dans des environnements très variés : PME françaises, grands groupes, entreprises internationales… J’ai commencé ma carrière sur des fonctions très opérationnelles, pour ensuite gravir les échelons petit à petit.
Un cheminement qui me permet aujourd’hui de connaître en profondeur les métiers RH, leur socle, leurs subtilités ainsi que leur rayonnement potentiel — et souvent sous-estimé — au sein de l’entreprise. Une connaissance poussée que j’exploite désormais dans la start-up nation depuis 2016.
Qu’est-ce que tu apportes à la fonction RH ?
À l’échelle interne, j’ai la conviction profonde que les idées ne deviennent réalité que grâce aux personnes. La vision d’un(e) entrepreneur(e) ne peut prendre forme que si les ressources humaines donnent les moyens aux équipes de la concrétiser. Mon rôle aujourd’hui, c’est justement d’articuler cette réalisation, en étant l’huile des rouages : être facilitatrice, poser les bons process, garantir le cadre, accompagner.
J’œuvre dans une entreprise à impact, avec un modèle vertueux tourné vers la lutte contre le gaspillage. Et je suis convaincue qu’on ne peut pas être vertueux dans sa mission sans l’être aussi dans la gestion des personnes. Pour moi, c’est ça, la clé de la cohérence RH.
En ce sens, il y a un mot que j’utilise très souvent et que je trouve essentiel dans notre fonction, c’est la congruence. En particulier lorsqu’il s’agit des actions RH qui, je pense, doivent toujours être alignées à la stratégie de l’entreprise. Dans le cas inverse, l’on crée un risque de dissonance et de désordre.
D’un point de vue externe, je crois à l’importance de prendre la parole. Beaucoup de RH hésitent, par peur du RH bashing, du regard des salariés, ou de la fameuse « police LinkedIn ». Moi, j’ai envie d’expliquer les coulisses, les zones grises, les logiques derrière certaines décisions. Pourquoi ? Car notre fonction est encore perçue comme une boîte noire.
De manière plus générale, j’ai à cœur de porter une vision des RH moderne, qui pense stratégie avant process, qui agit avec une philosophie centrée sur les individus, et qui défend l’inclusion et la diversité.
Au-delà du marketing RH, je veux qu’on se demande : concrètement, que peut-on faire pour favoriser un modèle plus inclusif, divers, équitable et accessible ? C’est d’ailleurs ce qui m’a amenée à fonder le collectif IDEA Pact.
Quels sont selon toi les grands défis RH, à court terme et d’ici 2030 ?
À court terme, dans l’univers start-up, l’urgence est économique. On traverse une crise du venture capital : moins de financement, plus de pression sur la rentabilité. Les RH doivent donc s’aligner avec cette nécessité de profitabilité. C’est une question de survie pour les jeunes pousses, mais aussi une occasion de construire la résilience de notre écosystème.
Deuxième défi : la fameuse guerre des talents. Pour moi, le véritable enjeu, c’est d’arriver à élargir nos viviers de candidats pour ne plus continuer à chercher nos futurs talents dans le même panier. Pour cela, il faut s’interroger : est-ce que cela doit passer par la gestion des compétences (GEPP) ? de la formation ? de l’accompagnement ? À mon sens, il y a un peu de tout ça — mais pas que — pour réussir à faire coïncider besoins du business et moyens humains. Et, par conséquent, assurer la continuité de l’entreprise.
Troisième défi : la nouvelle ère technologique. IA, automatisation… Les RH doivent accompagner ces mutations, évaluer la valeur ajoutée selon le contexte, et surtout, rester en maîtrise de leur impact.
À l’horizon 2030, la fonction des ressources humaines devra avoir réussi à résoudre l’équation économique, humaine et sociétale. En d’autres termes, à aligner la stratégie business, les attentes des salariés, et la durabilité.
Quel est le secret de ta visibilité sur LinkedIn ?
Je pense aborder des sujets peu traités qui suscitent la curiosité et résonnent fort. Les posts qui marchent le plus sont ceux liés aux minorités, à la diversité, à l’inclusion. Ce sont des thèmes qui font écho, car ils touchent au vécu en entreprise.
Par exemple, j’ai récemment partagé le fait que, dans certains cercles, je me sens seule en tant que femme noire. Ce post a suscité un vrai engagement. Pourquoi ? Parce qu’il s’agit d’un vrai sujet sur la vie en entreprise, plus que d’une thématique un peu bateau comme :
- pour ou contre la prise de référence ?
- pour ou contre le télétravail à 100 % ? Etc.
Pour prendre un autre exemple, il y a aussi eu un autre post sur la parentalité et cette double injonction absurde : travailler comme si on n’avait pas d’enfant, élever ses enfants comme si l’on n’avait pas de travail.
Je pense que ce qui touche, c’est cette incarnation. J’en reviens à la congruence : je suis la même en ligne, au travail, et dans la vie. Ça se sent, et c’est ce que me renvoie ma communauté, notamment via mes posts récurrents « Dis ChriChri » qui dévoilent les coulisses de la fonction.
Es-tu plutôt workaholic ou work-life balance ?
Je suis une travailleuse acharnée, mais je m’améliore. J’aime ce que je fais, je crois en mon impact, et je ressens, au quotidien, que ma fonction a une utilité concrète dans l’entreprise.
Mais ça a un revers : l’impression de devoir tout faire, tout porter, tout régler. Je pense que beaucoup de RH vivent ce syndrome du sauveur. Moi la première : je produis, j’accompagne, j’agis… jusqu’à parfois m’oublier.
Devenir mère m’a obligée à poser des limites. Et je crois qu’on ne peut pas être prescriptrice de bonnes pratiques sans se les appliquer à soi-même. Alors j’apprends, tous les jours, à être aussi exemplaire dans ma gestion de l’équilibre que dans mes convictions. Encore et toujours la congruence…
Christelle a un message pour vous 👇
- Christelle Vaugelade-Kalipé est dans notre Top 25 des RH les plus influents en 2025
