Un climat professionnel toxique ne désigne pas simplement une mauvaise ambiance. Un tel environnement impacte directement l’épanouissement et la qualité de vie au travail.
Alors, comment reconnaître un climat toxique ? Quelles sont les conséquences pour l’entreprise et les salariés ? Comment s’en prémunir ?
Pour en savoir plus, la rédaction a interviewé Marine Péron, psychologue du travail et consultante Grands Comptes chez Pearson TalentLens sur le sujet.
État de la santé mentale des salariés en 2023
Un climat de travail toxique affecte plusieurs caractéristiques essentielles à l’épanouissement professionnel.
Pourtant, face aux difficultés de recrutement, les employeurs peuvent être amenés à revoir leurs critères d’embauche et à être plus souples vis-à-vis de l’attention portée aux soft skills des candidats. En effet, La Dares recense 367 500 emplois vacants au 2e trimestre 2023, dans les entreprises de 10 salariés ou plus.
L’étude People at Work 2023 réalisée par ADP révèle que le stress au travail est ressenti au moins une fois par semaine par 63% des travailleurs et que 65 % déclarent que le stress affecte négativement leur travail. Les jeunes indiquent être plus stressés au travail : la Génération Z ressent le stress 13 fois par mois en moyenne, contre 10 fois par mois pour l’ensemble des travailleurs.
De plus, la proportion de salariés qui présentent à la fois des symptômes de dépression et d’épuisement est en hausse de 3 points par rapport à juin 2022. Cette année, 44% des salariés se trouvent en situation de détresse psychologique (baromètre Empreinte Humaine, 2023).
De nombreux collaborateurs se sentent mal avant d’aller au travail. Ils ressentent, par exemple, “la boule au ventre du dimanche soir“, ou ont l’impression d’être “pris au piège” dans leur job. Ce qui rend le climat toxique délicat à détecter, c’est qu’en fonction de nos besoins, un même environnement peut avoir des effets différents sur chaque personne.
En 2023, les salariés sont plus de 7 sur 10 à déclarer que leur santé psychologique est liée, partiellement ou totalement, au travail. Par ailleurs, 40% des répondants se disent “épuisés au travail” (baromètre Empreinte Humaine, 2023).
Qu’est-ce qu’un climat de travail toxique ?
Selon Marine Péron, un climat toxique résulte de l’inadéquation entre les besoins d’une personne et le management en place, ou la culture de l’entreprise. “C’est la somme de plusieurs éléments cumulés qui va être propice à la création d’un tel environnement” précise-t-elle.
Comment reconnaître un climat de travail toxique ?
Un collaborateur qui ne dispose pas des moyens techniques et opérationnels nécessaires, qui n’a pas la capacité de s’exprimer ou de prendre des initiatives par lui-même peut avoir l’impression de ne pas évoluer.
Le manque de reconnaissance peut également désigner un des facteurs d’un climat de travail toxique. Il représente même la 1ère cause de motivation au changement professionnel des candidats selon l’étude CCLD et myRHline 2023.
La reconnaissance peut incarner un véritable moteur aux yeux de certaines personnes, un levier motivationnel et d’épanouissement clé. Or, un manager qui ne montre aucune marque de reconnaissance ou d’encouragement peut inciter le collaborateur à travailler toujours plus dur pour combler ce manque, même s’il se sent sous-estimé. Ce qui peut conduire jusqu’à l’épuisement professionnel.
Le manque de perspectives d’évolution peut aussi créer chez le salarié un sentiment d’inutilité, de frustration ou encore de perte de sens. À terme, l’entreprise pourra constater une perte de motivation au travail et un désengagement.
L’organisation du travail peut également être une des causes d’un climat professionnel toxique. Par exemple, si les consignes manquent de clarté, de précision et si les salariés ont l’impression de ne pas avoir droit à l’erreur.
Les pratiques managériales sont donc au cœur du développement d’un climat de travail toxique, mais pas seulement. “La culture d’entreprise joue également un rôle majeur dans cette construction“ précise-t-elle.
Enfin, de mauvaises relations avec les collègues ou le supérieur hiérarchique peuvent créer de l’isolement et un sentiment de mal-être. “Ces comportements peuvent aussi aller plus loin, notamment en cas de harcèlement. Dans ce cas, le salarié pourrait avoir l’impression d’être puni, humilié ou rejeté pour avoir pris la parole, que ce soit pour partager des idées, soulever des préoccupations ou des objections” souligne Marine Péron.
Des conséquences majeures sur l’organisation
Un climat toxique provoque des conséquences non négligeables sur le bien-être et la qualité de vie au travail. La QVCT est devenue un enjeu clé : les entreprises sont, en majorité, conscientes des effets indéniables sur la productivité, la performance collective, la compétitivité et l’image de l’organisation.
- Les résultats d’une étude conduite par le MIT et Harvard en 2017 ont d’ailleurs démontré que les salariés heureux étaient 2 fois moins malades, 6 fois moins absents, 31 % plus productifs et 55 % plus créatifs.
En effet, l’apparition d’un climat toxique de travail peut ternir la marque employeur de l’entreprise, impactant sa capacité d’attractivité.
- 1 candidat sur 2 postule à une offre uniquement s’il a une bonne image de l’entreprise (étude HelloWork, 2021).
Aujourd’hui, les candidats se renseignent avant d’accepter une offre d’emploi. Ils regardent les avis sur Glassdoor, ou vérifient sur LinkedIn combien de temps les salariés sont restés dans l’entreprise. Parfois, ils prennent également contact avec les salariés en place ou ceux qui ont quitté l’entreprise. La réputation de l’entreprise peut faire toute la différence.
Les facteurs qui permettent aux candidats de dire oui à une entreprise en 2023 sont les suivants :
- L’adéquation avec les valeurs de l’entreprise,
- Le management,
- La rémunération (étude CCLD et myRHline, 2023).
Par conséquent, les valeurs de l’entreprise et ses pratiques managériales occupent une place de choix chez les candidats. En outre, il est important de rappeler que 50% des salariés démissionnaires déclarent quitter leur manager, plutôt que leur poste (étude Gallup, 2019).
Les conséquences d’un climat toxique sur les salariés sont également nombreuses :
- perte de productivité,
- désengagement et quiet quitting,
- désolidarisation des équipes,
- épuisement professionnel,
- absentéisme,
- démission …
La dégradation de leur santé mentale augmente inévitablement le taux d’absentéisme dans l’entreprise. En 2022, le pourcentage de salariés absents a d’ailleurs augmenté de 27% à l’échelle nationale en un an (Baromètre Ayming, 2023).
Les études de climat social peuvent être un bon indicateur du climat de travail de l’entreprise. Interroger les salariés de manière anonyme, par des sondages internes, est aussi un bon moyen de recueillir leur ressenti sur le climat de travail.
Les conséquences d’un climat toxique sont donc aussi financières. Les coûts peuvent rapidement croître si l’employeur n’agit pas pour régler la situation.
Comment l’entreprise peut-elle agir contre un climat professionnel toxique ?
D’après Marine Péron, certains métiers sont soumis à des évaluations essentielles avant embauche. Il s’agit des métiers qui comportent des risques s’ils intègrent des personnes avec des tendances dysfonctionnelles, c’est-à-dire des tendances à avoir des comportements inadaptés, contraires à l’éthique ou contre-productifs au travail. Les emplois en lien avec des personnes vulnérables (éducation, travail social, hôpitaux, maisons de retraite, crèches et haltes-garderies, etc.) ; ceux dans le secteur de la sécurité, la surveillance, la défense, etc. ; les missions de transport de personnes, de biens ou de matières dangereuses (transport aérien, train, bus, convoyeurs de fond, etc.) ; les postes impliquant la manipulation d’informations confidentielles, de produits dangereux ou coûteux (business intelligence, énergie nucléaire, industries chimiques et pharmaceutiques, etc.) ; et plus largement, les fonctions managériales.
Mais comment détecter les personnalités potentiellement toxiques de vos candidats et collaborateurs ? Certains d’entre eux sont conscients de leurs tendances dysfonctionnelles, d’autres pas.
L’inventaire de personnalité SOSIE 2nd Generation associé à l’inventaire des tendances dysfonctionnelles TD-12 édités par Pearson TalentLens permettent déjà d’aller explorer les traits de personnalité, les moteurs du candidat ainsi que ses éventuelles tendances dysfonctionnelles.
Marine Péron explique qu’il est crucial de ne pas partir du principe que les résultats des tests psychométriques (inventaires de personnalité et autres tests d’évaluation) sont gravés dans le marbre. En les contextualisant, la personne sera justement en mesure de prendre conscience de ses comportements inadaptés et de mettre le doigt sur les stimuli externes qui les provoquent afin de se réajuster.
Pour illustrer ses propos, la psychologue du travail nous donne l’exemple du recrutement d’un manager. Au moment d’un tel recrutement, certaines dimensions doivent nécessairement être évaluées en détail : les capacités relationnelles et la délégation.
Sur la base de notre solution SOSIE 2nd Generation, inventaire de personnalité le plus utilisé en France, nous allons creuser l’assertivité du candidat, son assurance, sa capacité d’écoute, la façon dont il fait valoir ses idées et celles de son équipe, sa gestion du stress, la confiance qu’il accorde aux autres, sa manière d’aborder la critique et de la recevoir.
Par ailleurs, l’outil d’évaluation de la pensée critique WATSON-GLASER™ III permet d’évaluer le recul dont le manager peut faire preuve, par rapport aux informations qui lui sont communiquées ou face à ses propres émotions et valeurs. “Des compétences cruciales et nécessaires à une position managériale saine et juste” précise-t-elle.
Vous pouvez évaluer votre futur collaborateur en croisant un inventaire de personnalité et un inventaire des tendances dysfonctionnelles (notamment avec notre outil TD-12) vous permettant en toute objectivité de détecter avec justesse les risques de comportements inadaptés, contraires à l’éthique ou contre-productifs au travail. Un manager méfiant, potentiellement envahissant, prenant pour acquis que les intentions des autres sont forcément malveillantes ou encore qui ne respecte pas le droit d’autrui et se préoccupe peu de tenir ses engagements… Ce sont autant de tendances pouvant être mises en lumière dès la phase de recrutement.
Enfin, pour faire évaluer ses pratiques managériales dans le bon sens, l’entreprise peut utiliser un outil d’évaluation 360°. Talent Zoom permet, à l’initiative du manager, de sonder les collaborateurs et les parties prenantes qui interagissent avec lui.
Cette démarche s’effectue dans une logique d’amélioration continue, dans le but de faire remonter les dysfonctionnements éventuels. “Généralement, l’outil est utilisé par les managers qui se trouvent déjà dans une démarche de remise en question” précise Marine Péron pour conclure.
➡️ Pour en savoir plus, n’hésitez pas à vous inscrire à notre webinar organisé le mardi 14 novembre à 11h : Climat toxique au travail : comment s’en prémunir ?