La rédaction était présente au Well-Being Lab 2023, un événement organisé par United Heroes en partenariat avec Great Place To Work. L’occasion de faire le point sur les initiatives que les entreprises peuvent mettre en place en faveur du bien-être au travail.
Deux tables rondes étaient organisées, avec les interventions de Paul-Émile Saab (CEO – Sport Heroes), Frank Ribuot (Président – Randstad France), Caroline Garnier (France Human Resources Director – SAP), Séverine Bachelet (HR development manager – L’Occitane en Provence), Constance Herrmann (Team Leader Grands Comptes – Great Place to Work), Tiphaine Galliez (Directrice du conseil – Great Place to Work), Emmanuel Legros (Directeur du recrutement – Capgemini), Céline Darmont (HR director France – Malt) et Régis Mulot (EVP & Chief HR Officer – Ipsen), présentées par Raïda Rus (Responsable éditorial – Sport Heroes).
Bien-être au travail : où en est-on en 2023 ?
Pour savoir où en sont les entreprises et les salariés sur la question du bien-être au travail, United Heroes a mené une étude du 14 février au 6 mars 2023, auprès de 1115 salariés et 158 décideurs et décideuses. Selon l’Observatoire du bien-être au travail 2023, près de 2 salarié-es sur trois ont songé à quitter leur entreprise ou ont passé le cap ces deux dernières années.
Pour commencer, il faut se poser la question de la définition et du sens derrière le bien-être au travail. Que signifie ce terme à la fois pour les collaborateurs de toutes catégories socioprofessionnelles et les dirigeants ?
Les personnes interrogées ont pu choisir parmi 5 éléments lequel est LE plus important, pour eux, au travail. Par ailleurs, la Catégorie Socio Professionnelle (CSP) et le statut (salarié, indépendant…) de chacun influencent cette priorisation.
Les 5 piliers universels du bien être sont :
- L’humain (28%)
- Le contenu du poste (27%)
- Les conditions de travail (26%)
- La rémunération et les avantages (15%)
- La mission de l’entreprise (5%)
En s’intéressant de plus près aux CSP des répondants, nous remarquons que les conditions de travail sont la priorité n°1 des professions intermédiaires, la rémunération est celle des indépendants et quant aux cadres dirigeants, le contenu du poste prévaut sur le reste.
Concernant les conditions de travail justement, la proximité du lieu de travail avec le domicile devance tous les autres éléments du classement (87%) parmi les éléments phares cités par les collaborateurs (toutes CSP confondues). Le work-life balance est devenu un élément indispensable et chacun veut davantage jouir de son temps personnel en ne perdant pas trop de temps à se déplacer.
Mais alors, que signifie “l’humain” ? En 2023, les collaborateurs recherchent d’abord une proximité avec leur manager, un lien de confiance, de l’écoute et de la bienveillance. La reconnaissance du travail reste un élément indispensable. On le sait, à terme, le manque de reconnaissance peut démotiver et désengager le salarié. Toutefois, les éléments propres au travail (tels que la fixation d’objectifs clairs) arrivent bien derrière les éléments purement relationnels.
Et le lien social dans tout ça ? Chez les salariés faisant occasionnellement du télétravail, le partage d’une activité avec les collègues renforce de 17% leur motivation au travail. La qualité du lien social occupe une place importante puisque la bienveillance, l’intégration au sein du groupe, un collectif motivé et motivant sont les éléments essentiels en matière de liens avec les collègues.
Le constat est clair : entretenir une culture d’entreprise dynamique, c’est se donner davantage de chances de satisfaire ses talents.
La quête de sens joue également un rôle clé dans la QVCT. Ainsi, les 3 critères clés du contenu du poste pour les salariés sont le fait de se rendre utile à la société (71%), bénéficier d’une sécurité financière (50%) et le fait d’apprendre chaque jour (38%).
Enfin, lorsqu’on demande aux répondants s’ils ont déjà songé à quitter leur entreprise ou s’ils ont sauté le pas : 62,3% y ont pensé ou ont franchi le cap (13% ont sauté le pas et 49% y ont songé).
Les raisons qui les ont motivés à quitter leur entreprise ?
- Le management (34%)
- La rémunération (23%)
- Le contenu du poste (18%)
La QVCT, quel ROI ?
Quel est le retour sur investissement (ROI) d’une politique de QVCT ?
Selon l’étude présentée au Well-Being Lab, les décideurs ayant mise en place une telle politique constate plusieurs bénéfices :
- Un meilleur engagement (51%)
- L’amélioration de la marque employeur (34%)
- Une baisse de l’absentéisme (25%)
- Une entreprise plus performante (19%)
- Une diminution des RPS et TMS (17%)
- Une meilleur rétention des talents (16%)
- Moins d’accidents du travail (12%)
- Baisse des jours de grève (3%)
Les décideurs et employeurs s’accordent à dire que la QVCT est un travail de tous les jours. Pourtant, les salariés ne sont que 17% à percevoir des initiatives QVCT au quotidien.
Cet écart de perception peut être le résultat d’une communication peu efficace ou un désalignement entre ce qui est considéré comme une action en faveur de la qualité de vie au travail par les entreprises et par les employés.
Pourtant, les actions en faveur de l’engagement collaborateur et la cohésion d’équipe sont des leviers d’amélioration de la qualité de vie au travail. Et aujourd’hui, comme le précise Raïda Rus au Well-Being Lab, les collaborateurs s’attendent à ce que leur bien-être soit pris en compte par la politique d’entreprise.
- Les salariés engagés au quotidien par leur entreprise pensent en moyenne 2x moins à partir.
Ainsi, 50% des collaborateurs seraient enthousiastes à l’idée de pouvoir partager leur activité physique avec des collègues et/ou leur manager. Parmi eux, 22% partagent déjà des moments d’activité physique ensemble.
Well-Being Lab : Comment attirer à l’ère de la pénurie des talents ?
Frank Ribuot (Président – Randstad France), Séverine Bachelet (HR development manager – L’Occitane en Provence), Constance Herrmann (Team Leader Grands Comptes – Great Place to Work), Emmanuel Legros (Directeur du recrutement – Capgemini) intervenaient lors de cette première table ronde du Well-Being Lab.
Well-Being Lab © United Heroes
Constance Herrmann explique que les attentes ont évolué notamment sur la recherche de sens au travail mais aussi concernant la flexibilité offerte par l’entreprise.
Il convient aujourd’hui de séduire ses candidats, à l’image de ses clients, mais attention au fausse promesse : le washing de la marque employeur peut coûter cher à l’entreprise et lui valoir des départs prématurés. En effet, Frank Ribuot explique que pour être attractif, il est indispensable de ne pas donner une image différente à l’extérieur et à l’intérieur.
La place de la rémunération est non négligeable pour attirer mais celle-ci n’est pas suffisante pour espérer fidéliser ses équipes.
Nous avons du turnover chez Randstad, pourtant l’engagement atteint 9/10 au sein de nos équipes. Aujourd’hui, les collaborateurs vont être engagés 18 à 24 mois puis être capables de partir du jour au lendemain. Mais l’important, c’est qu’ils vont donner le meilleur d’eux-mêmes, du premier jour où ils intègrent l’entreprise, jusqu’à leur dernier.
Pour Séverine Bachelet, l’histoire qu’on raconte aux candidats et aux salariés participe à la capacité d’attractivité de l’organisation. Choisir une entreprise qui œuvre positivement sur la société est important à leurs yeux. C’est pourquoi Occitane vise à obtenir la certification B Corp cette année au niveau mondial, attestant d’une véritable stratégie RSE impactant positivement la société.
Occitane réfléchit également à certaines pistes permettant d’offrir plus de flexibilité au personnel du retail mais aussi à l’aspect de la rémunération.
De plus, chaque salarié peut prendre une journée pour faire une action de bénévolat en plus de ses congés. Dernier exemple, le temps pour les congés paternité et maternité a été rallongé et l’entreprise prend en charge ce temps supplémentaire.
Selon Frank Ribuot, la flexibilité représente un véritable enjeu en France car, contrairement à d’autres pays, les entreprises ne proposaient pas d’environnement flexible et remote avant la crise sanitaire.
Il affirme que si un business peut être jugé sur ses résultats et non sur la présence des salariés, l’exemplarité est importante pour mettre en place une politique de flexibilité.
“On a tendance à vouloir faire de l’égalité à tout prix, mais la réalité c’est que nous ne sommes pas tous égaux. En ce sens, l’équité est importante pour s’adapter aux besoins et aux situations de chacun. L’équité représente la capacité à donner les meilleurs moyens à des personnes se trouvant dans des situations différentes« , explique-t-il lors du Well-Being Lab.
Chez Randstad, les équipes bénéficient de 23 jours de RTT par an, ainsi qu’un jour de volontariat, pouvant être réalisé par le biais d’activités sportives et solidaires.
Emmanuel Legros explique que chez Capgemini, “il suffit d’avoir une connexion internet pour pouvoir travailler”. Ce qui représente une véritable chance en matière de flexibilité. Au sein de l’entreprise, le télétravail existe depuis plus de 15 ans. Des accords permettent notamment aux équipes de faire jusqu’à 70% de télétravail. Chacun est libre de valider cet accord dans l’entreprise, ou non, dès son arrivée.
Par ailleurs, ceux qui le souhaitent bénéficient de 45 jours de télétravail à l’étranger par an.
Séverine Bachelet précise que la flexibilité doit aussi s’appliquer au management. Chez Occitane, le candidat rencontre son équipe avant de commencer et le processus onboarding est en train d’être entièrement revu pour soigner la phase de pre-boarding.
S’appuyer sur les valeurs de la société pour promouvoir une culture d’entreprise qui reflète les pratiques quotidiennes des collaborateurs est un levier d’attractivité et de fidélisation. “United Heroes permet justement à l’entreprise de pouvoir instaurer des actions en alignement avec ses valeurs” affirme Frank Ribuot.
Nos meilleurs ambassadeurs sont nos collaborateurs. Nous avons tout intérêt à leur donner la parole pour illustrer la culture de l’entreprise.
Emmanuel Legros affirme que pour attirer de nouveaux profils, Capgemini intervient dès le collège et le lycée pour présenter les métiers du digital et séduire plus d’étudiants et étudiantes.
En outre, il pense que donner leur chance à des profils en reconversion est essentiel : “8-10% de nos recrutements chaque année concernent des profils en reconversion” , précise-t-il. Et l’année dernière, ce sont 9 000 recrutements qui ont été effectués.
Car ce qui importe vraiment chez un candidat, c’est sa volonté, son savoir être (soft skills) et sa personnalité. Ensuite, l’entreprise peut le former sur des compétences techniques.
Comment garder motivés et fidéliser ses talents à l’ère du Big Quit ?
Tiphaine Galliez (Directrice du conseil – Great Place to Work), Caroline Garnier (France Human Resources Director – SAP), Céline Darmont (HR director France – Malt) et Régis Mulot (EVP & Chief HR Officer – Ipsen) intervenaient durant cette seconde table ronde.
Well-Being Lab © United Heroes
L’onboarding ainsi que le pre-boarding occupent une place clé dans la fidélisation des talents. Notamment au sein des secteurs sous tension où les possibilités sont nombreuses pour les candidats.
“Le turnover fait partie de la vie de l’entreprise. Néanmoins, l’entreprise est responsable du turnover ayant lieu avant la fin de la première année“ affirme Régis Mulot.
Faire venir les salariés au siège est important pour cultiver leur sentiment d’appartenance et créer une communauté selon Céline Darmont.
Caroline Garnier explique que chez SAP, le télétravail existe depuis plus de 10 ans.
La DRH explique qu’après la crise du Covid-19, le challenge est de parvenir à faire revenir les collaborateurs au bureau. Les collaborateurs doivent avoir une bonne raison de revenir sur place. La convivialité incarne donc un aspect important à travailler.
C’est pourquoi l’entreprise multiplie les initiatives en ce sens notamment en réaménageant les espaces de travail et en “remettant de la vie à chaque étage”. Pour cultiver cette envie et répondre au besoin de lien social, des événements sont organisés en hybride et présentiel. Des activités en dehors du cadre de leur job au quotidien sont mises en place, parmi lesquelles le mécénat de compétences.
Tiphaine Galliez précise que lorsqu’on parle de flexibilité et d’efficacité, il est essentiel que les salariés évoluent au sein d’un environnement qui fonctionne bien et où les outils sont efficaces. Les pratiques managériales et celles des RH doivent être repensées pour prévoir des temps collectifs, d’autres en 1 to 1, certains en présentiel et d’autres en distanciel. Chez Malt, les salariés ont la possibilité de travailler depuis n’importe quel bureau en France ou Europe. Céline Darmont confirme que se doter d’outils efficaces est nécessaire pour optimiser la collaboration entre les salariés qui peuvent être en présentiel pour certains, en distanciel pour d’autres.
La philosophie chez Ipsen consiste à promouvoir le fait de pouvoir travailler depuis n’importe où, mais ce qui importe, c’est avec qui et comment. Pour permettre l’innovation, Régis Mulot estime que l’émulation collective et les moments en présentiel sont un axe non négligeable à prendre en compte.
Un dispositif nommé “Malt Sabbatical” vise également à fidéliser les équipes puisque les collaborateurs peuvent en bénéficier après 3 ans dans l’entreprise. Il permet de rémunérer un projet personnel d’un mois, par exemple une mission dans un orphelinat au Vietnam, la création d’un festival ou l’organisation d’une exposition photo. L’objectif est qu’ils acquièrent d’autres compétences autour d’un projet personnel enrichissant et faisant sens à leurs yeux.
L’entreprise n’est pas obligée d’être une ONG pour proposer de répondre à la quête de sens des salariés. Par exemple, on peut donner du sens au travail en étant le plus innovant sur son marché ou bien en investissant dans une politique et stratégie RSE.
Céline Darmont explique par ailleurs que certaines actions RSE peuvent être relativement faciles à mettre en œuvre. Par exemple, encourager l’engagement communautaire et associatif, grâce à un partenariat avec une plateforme promouvant un engagement solidaire.
Chez Malt, au mois de juin, une journée pourra être dédiée à une association sur le temps de travail. De plus, l’entreprise va mettre en place une fresque du climat et où des ambassadeurs pourront former ensuite les autres collaborateurs ainsi que le comité sur ce sujet. “La première année 60% des collaborateurs ont été formés”, précise–t-elle.
- 59% des freelances du secteur de la tech refuseraient une mission si elle ne correspondait pas à leurs valeurs, selon Céline Darmont.
Chez SAP, Caroline Garnier explique que diverses initiatives sont mises en œuvre pour permettre aux collaborateurs de trouver du sens à leur quotidien. Par exemple, un jour dédié est organisé pour qu’ils puissent connaître la stratégie du groupe. Une stratégie RSE a été instaurée à la fois en termes de business model avec un objectif de neutralité carbone et à titre individuel. Les salariés ont la possibilité de mesurer leur empreinte carbone à titre personnel. De plus, l’organisation accompagne des startup à impact social par mécénat de compétences notamment.
Chez SAP, on compte 35% de femmes parmi les effectifs du groupe. Au sein du management, les femmes sont représentées à hauteur de 26% seulement. Notre objectif est d’atteindre la parité. Pour ce faire, nous réalisons notamment des études sur la rémunération et la classification pour réduire les écarts et mettre en place des programmes adaptés.
Enfin, des actions en faveur de la diversité et de l’inclusion, notamment en matière d’égalité professionnelle et d’inclusion de la communauté lgbtqi+ ou des personnes en situation de handicap sont prévues.