Si le volume d’offres d’emploi s’est démultiplié sur l’année 2022, les difficultés de recrutement demeurent au sein des entreprises françaises. Ces dernières font face à plusieurs défis RH pour 2023 : pour recruter, pour fidéliser et pour engager.
Aujourd’hui, les candidats ont de plus en plus de choix avec des offres d’emploi toujours plus nombreuses.
Dans le cadre de leur dernier baromètre sur les intentions des entreprises françaises face aux enjeux et difficultés de recrutement, l’Ifop, Cadre Emploi et Selescope ont consulté 400 dirigeants d’entreprises en France pour dresser un état des lieux des difficultés de recrutement et évoquer les leviers d’action à déployer pour pallier ces difficultés.
Etat des lieux des difficultés de recrutement en France
Les entreprises françaises face aux difficultés de recrutement
En cette fin d’année, il semble que les entreprises françaises font face à des difficultés de recrutement inédites. Bien que ⅔ des chefs d’entreprise souhaitent conserver leurs effectifs au même niveau dans les mois à venir, un peu moins d’un tiers a l’intention de les augmenter : c’est le cas de 28 % d’entre eux (- 7 points par rapport à 2021).
Ces prévisions concernent surtout les entreprises de plus de 20 collaborateurs.
54 % des dirigeants de 50 à 99 salariés prévoient des embauches pour pallier les difficultés de recrutement, 43 % de ceux qui comptent 100 à 249 salariés comptent embaucher et c’est le cas de 49 % pour ceux de plus de 250 salariés.
52 % des personnes interrogées estiment que les difficultés de recrutement mettent à mal l’activité de leur organisation. 38 % d’entre eux expliquent ne pas pouvoir répondre à la demande. En outre, 32 % considèrent que ces difficultés de recrutement sont un obstacle à leur développement. C’est notamment le cas dans les entreprises qui comptent plus de 50 salariés ainsi que celles désireuses de renforcer leurs effectifs.
Quelles sont les causes de ces difficultés ?
Les chefs d’entreprise interviewés admettent des erreurs de casting importantes. Si la proportion affirmant la réussite de plus de 75 % de leurs embauches progresse (+ 5 points par rapport à 2021), c’est aussi le cas de ceux qui affirment avoir réussi moins d’1 recrutement sur 2. Plus d’une entreprise sur 2 reconnaîtrait un taux d’échec supérieur à 25 % en matière de casting.
En outre, 40 % des dirigeants confrontés aux erreurs de casting pointent le manque de volume de travail et d’implication chez leurs nouvelles recrues (+ 2 points par rapport à 2021), ce qui renforcerait les difficultés de recrutement. C’est le cas pour les entreprises de plus de 250 salariés par exemple (52 %).
Cette année, on invoque notamment un défaut de compétences “métier” pour 39 % des interrogés (+ 13 points par rapport à 2021), notamment chez les TPE (la moitié serait concernée).
En outre, l’absence d’actions RSE semble accroître les difficultés de recrutement. En effet, seulement 5 % des personnes interrogées ont « enclenché ce qui pourrait être considéré comme une véritable politique RSE, c’est-à-dire en mettant en place au moins 3 actions ayant un impact social et/ou environnemental”, indique le baromètre.
Par ailleurs, l’intérêt pour les recherches d’emploi est en nette baisse depuis le covid, en France et dans le monde, ce qui vient renforcer les difficultés de recrutement.
Quelles réponses aux difficultés de recrutement ?
Déployer une réelle politique RSE
Pour pallier aux difficultés de recrutement, la majorité des dirigeants a engagé au moins 1 action en faveur d’une politique RSE (59 %). 3 actions se dessinent en ce sens : le mécénat (à 26 %), la définition d’une raison d’être (à 20 %) ou encore le déploiement d’un système de partage de la valeur par le biais des primes (18 %).
Les organisations ayant mis en place au moins 1 action sont 66 % à déclarer les promouvoir, notamment lors d’entretiens d’embauche ou au sein des offres d’emploi. Cela confirme que le déploiement d’une politique RSE est directement liée au renforcement de la marque employeur. Les résultats du baromètre indiquent que cela peut “constituer un argument de poids pour convaincre les candidats, de plus en plus sensibles à ce type d’actions.”
Il semble qu’à l’heure où les collaborateurs ont de plus en plus besoin d’être en phase avec les valeurs d’une organisation et sa culture d’entreprise, la RSE peut être un excellent levier d’attraction des talents.
Nous l’avons constaté dans d’autres études, la RSE devient un élément central pour convaincre les candidats. Or, nous voyons ici que peu d’entreprises ont mis en place de véritables politiques sur le sujet. Si on en fait une lecture brute, cela revient à dire que 95% d’entre elles se privent donc potentiellement de la moitié des candidats !
Recruter en interne ?
Malgré les difficultés à recruter, on observe que le temps consacré à chaque embauche constitue une préoccupation plus importante en 2022 que l’année précédente. En effet, 31 % des chefs d’entreprise considèrent “y consacrer trop de temps” (+ 11 points) alors que 8 % déclarent à l’inverse “ne pas en avoir suffisamment”.
Pourtant, 74 % du panel interrogé ne souhaite pas externaliser son embauche en faisant appel à des entreprises spécialisées. Cette posture est stratégique. Par rapport à 2021, les dirigeants d’entreprise souhaitent embaucher en utilisant leurs propres ressources en interne (59 % ; +27 points par rapport à 2021).
Selon Damien Leblond, cette internalisation « montre que l’embauche des talents est devenue encore plus stratégique pour les entreprises”.
Au contraire, 26 % des dirigeants souhaiteraient faire appel à ces structures, notamment ceux qui souhaitent augmenter leurs effectifs. En effet, 61 % d’entre eux reconnaissent à ces structures qu’elles auraient une meilleure capacité de sourcing et d’autres “saluent leur aptitude à fournir un éclairage supplémentaire sur la personnalité des candidats.” (32 %)
Pallier aux difficultés de recrutement avec les compétences ?
6 chefs d’entreprise sur 10 souhaiteraient recruter des personnes à “potentiel”, dotées de compétences non-techniques, les soft skills. Il s’agit notamment des compétences liées au savoir-être et à la capacité d’apprentissage. Ce sont des compétences très prisées par les recruteurs aujourd’hui. Pour autant, 40 % des répondants souhaitent favoriser les compétences dites fonctionnelles. C’est ce qu’on constate notamment chez les entreprises de plus de 250 salariés (54 %) et dans le secteur du service (45 %). Si les chefs d’entreprise sont ambitieux, ils sont aussi pragmatiques : ⅔ d’entre eux expriment en effet le souhait de privilégier les profils identiques, ceux qui ont “fait leurs preuves”, tandis qu’⅓ préfère recruter des profils dits atypiques afin de développer son activité.
Selon Damien Leblond, les dirigeants veulent, à long terme, des personnes ayant un potentiel. Mais pour ne pas mettre à mal le développement de leur entreprise “dans l’urgence du quotidien”, ils devront se tourner vers “des profils identiques qui leur semblent opérationnels plus rapidement.” Ce qui revient selon lui à privilégier le court terme au long terme afin de pallier aux difficultés de recrutement.
Angèle Linares
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