Le burn-out, une maladie professionnelle ? Le syndrome de l’épuisement professionnel, aussi appelé burn-out, provoque des séquelles sur la santé physique et mentale des salariés.
En 2023, 44% des salariés se trouvent en situation de détresse psychologique selon le baromètre Empreinte Humaine. Mais qu’est-ce qu’un burn out ? Peut-il être reconnu comme une maladie professionnelle ? Que stipule le Droit en la matière ? On vous explique tout sur le burn out.
Qu’est-ce que le burn out ?
Le burn out n’est pas simple à définir. Il est considéré comme un épuisement physique, émotionnel et mental qui est dû à une surcharge de travail. C’est, en réalité, un épuisement dû au stress chronique au travail. Autrement dit, un syndrome d’épuisement professionnel, lié à l’environnement professionnel et à une mauvaise QVCT. En effet, il est en lien avec l’évolution des organisations du travail.
Une charge au travail trop importante, des tensions entre collègues, l’insécurité de l’emploi, un stress au travail, ou encore des objectifs professionnels inatteignables : différentes raisons peuvent causer un burn out.
Selon l’Assurance Maladie, le coût social du stress au travail est évalué entre 1,9 et 3 milliards d’euros en France. Cette estimation comprend le coût des soins et la perte de richesse pour cause d’absentéisme, de cessation prématurée d’activité et de décès prématuré.
En France, environ 2,5 millions de personnes se trouveraient en état de burn-out sévère (baromètre Empreinte Humaine). Sous certaines conditions, le burn-out peut être reconnu comme une maladie professionnelle.
Reconnaître le burn-out grâce à différents signes
Plusieurs signes d’épuisement sont susceptibles de provoquer votre surmenage professionnel et en conséquent un burn out :
- épuisement émotionnel ;
- inquiétude et anxiété ;
- troubles du sommeil ;
- troubles de l’alimentation ;
- irritabilité et troubles de l’humeur ;
- manque d’enthousiasme en entreprise ;
- perte de confiance en soi ;
- l’isolement ;
- prise de médicament, d’alcool ou de drogues excessif ;
- performance réduite au travail.
En effet, selon la psychologue Christina Maslach, ce syndrome s’illustre tout d’abord par l’épuisement professionnel, le cynisme vis-à-vis du travail, la diminution de l’accomplissement personnel au travail (dévalorisation de soi, impression d’être dans une impasse…).
En fonction de la gravité de la situation, le salarié peut développer des symptômes dépressifs.
Quelles sont les causes principales du burn-out ?
Le burn out est multifactoriel. Plusieurs facteurs peuvent en être à l’origine :
- le stress ;
- la surcharge de travail ;
- l’absence d’autonomie ;
- le manque de reconnaissance ;
- le rythme de travail ;
- le manque d’équité ;
- le harcèlement en entreprise;
- les violences externes (insultes et agressions au quotidien) ;
- l’hyperconnexion ;
- les conflits de valeurs ;
- l’absence de relation entre collègues.
- Une culture d’entreprise toxique, qui n’autorise pas le droit à l’erreur, favorise également le risque d’épuisement professionnel.
Les personnes qui souffrent d’un burnout étaient souvent très investies dans leur travail.
Le médecin traitant peut réaliser un diagnostic afin de déterminer si son patient est touché. La médecine du travail peut également réaliser ce diagnostic. Le burn out peut durer quelques semaines comme quelques mois, voire des années.
Le temps de guérison d’un burnout dépend aussi de l’état de santé global du salarié.
- Pour aller plus loin : découvrez la durée moyenne d’un arrêt de travail pour dépression.
Alors, comment l’employeur peut-il agir pour protéger la santé mentale des salariés ? Tout d’abord, il doit limiter les facteurs de stress via plusieurs actions concrètes telles que la répartition de la charge de travail, l’organisation d’entretiens avec les salariés permettant de prendre leur pouls, l’aménagement de leurs horaires ou une plus grande flexibilité leur offrant un meilleur équilibre. D’autres actions peuvent permettre de monitorer leur temps de travail et garantir leur droit à la déconnexion : l’encadrement de l’utilisation des outils informatiques, la redirection des mails envoyés en dehors des heures professionnelles et l’instauration de rituels chaleureux pour éviter l’isolement.
Enfin, il peut organiser des sessions de formation, de prévention et de sensibilisation sur la gestion du stress par exemple.
Quelles perspectives pour le futur ?
Les séquelles du burn out varient en fonction de la durée et de la sévérité des symptômes. Elles peuvent être à la fois émotionnelles, cognitives et/ou physiques.
Sur le plan médical, les personnes ayant souffert d’un burn-out ont plus de risque d’être sujettes à des anomalies du rythme cardiaque, augmentant de fait le risque d’un accident vasculaire cérébral.
Les séquelles s’illustrent principalement au niveau du système cardiovasculaire et des douleurs musculaires.
La fatigue chronique peut également toucher les personnes ayant vécu un burn-out.
Qu’en est-il des séquelles sur le plan cognitif ? Le burn out est une maladie professionnelle qui peut avoir un impact sur la mémoire, la logique et la concentration de la personne.
Au niveau personnel, le burnout peut conduire le salarié à des remises en question et peut altérer son work-life balance. Sa confiance en lui peut être impactée, tout comme l’image qu’il a de lui-même. On assiste souvent à un sentiment de dévalorisation chez les personnes ayant vécu un burn-out.
Un accompagnement psychologique est recommandé pour que la personne reprenne confiance en elle. La sensibilisation, la prévention et le traitement du stress sont indispensables.
Quelle est la différence entre un burn-out et une dépression ?
Le burn-out ne doit pas être confondu avec la dépression, une maladie psychique. Ce premier est lié à la sphère professionnelle, tandis que la dépression concerne tous les aspects de la vie personnelle de la personne. Les facteurs déclencheurs sont différents, tout comme l’origine des symptômes et les comportements qui en résultent.
L’épuisement professionnel est un processus de dégradation lié au rapport et aux conditions de travail.
Lors d’un burnout, le salarié expérimente des troubles fonctionnels et des douleurs psychosomatiques (grande fatigue, douleurs musculaires, gastriques, ulcères…) en réponse à votre épuisement professionnel.
Dans le cadre d’une dépression, le salarié atteint par cette maladie ressent souvent des signes psychologiques qui persistent sur la durée, tels qu’une importante tristesse ou des idées noires.
Qu’est-ce qu’une maladie professionnelle ?
Une maladie peut être considérée comme professionnelle lorsqu’elle est contractée du fait d’un emploi.
La reconnaissance d’une maladie professionnelle permet d’être pris en charge sur le plan financier vis-à-vis des frais médicaux que cette dernière engendre, le versement d’éventuelles indemnités spécifiques telles que les indemnités journalières dues à un arrêt maladie mais et surtout la protection d’un licenciement.
Le code de la sécurité sociale à mis en place une liste des maladies professionnelles reconnues.
Il comprend une centaine de tableaux avec, pour chaque tableau, de nombreuses pathologies.
Sur ladite liste, on y trouve également le délai de prise en charge ainsi qu’un listing des événements ayant pu causer la maladie correspondante.
La CPAM (caisse primaire d’assurance maladie) peut, cependant, reconnaître l’origine professionnelle de la maladie si cette dernière est causée directement par le travail du salarié.
Cela ne signifie pour autant pas qu’une maladie non répertoriée dans un tableau ne peut pas être reconnue comme une maladie professionnelle.
La loi Rebsamen de 2015 a établi que les pathologies psychiques peuvent être reconnues comme maladies d’origine professionnelle, à condition que le salarié établisse devant un comité régional, que sa maladie est, essentiellement et directement, causée par son travail habituel et qu’elle a entraîné une incapacité permanente d’un taux au moins égal à 25 %.
Le burn-out peut-il être reconnu comme maladie professionnelle ?
La reconnaissance du burn out en maladie professionnelle
Pour résumer, le burnout peut être reconnu comme maladie professionnelle seulement si 2 conditions cumulatives sont réunies :
- le burn out a entraîné une incapacité permanente partielle (IPP) égale ou supérieure à 25 % ;
- le burn out est considéré comme une pathologie essentiellement causée par le travail, plus concrètement qu’un lien direct et essentiel soit établi entre la maladie et le travail.
Le salarié doit se rapprocher de sa Caisse d’Assurance Maladie afin de recueillir l’avis d’un comité d’experts médicaux sur sa maladie, aussi appelé CRRMP (comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles).
Ce comité décide du caractère professionnel ou non de la maladie.
Le burn-out n’étant pas considéré, de base, comme une maladie professionnelle, il appartient au salarié d’apporter la preuve du lien entre sa maladie et les conditions de travail.
Le CRRMP dispose d’un délai de 4 mois pour prendre et rendre sa décision.
Il a également le droit d’ajouter deux mois supplémentaires afin de procéder à des examens complémentaires du burn out.
Quelles sont les obligations et responsabilités de l’employeur dans la reconnaissance d’une maladie professionnelle ?
Le Droit stipule que l’employeur a des obligations légales afin d’assurer la santé physique et mentale de ses salariés (L.4121-1 du Code du travail).
Il doit évaluer les risques auxquels les salariés sont confrontés, qu’ils soient liés à leur sécurité ou à leur santé (par exemple des RPS). De plus, il doit mettre en place des protocoles afin d’éviter les risques professionnels à leur source comme le burnout.
Selon le Code du travail, ces mesures incluent :
- Des actions de prévention des risques professionnels
- Des actions de formation et d’information
- La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés
- Bon à savoir : le DUERP (Document unique d’évaluation des risques professionnels) est obligatoire dans toutes les organisations dès l’embauche du 1er salarié. L’employeur consigne dans ce document le résultat de l’évaluation des risques pour la santé et la sécurité auxquels ces derniers peuvent être exposés.
Si l’employeur n’a pas mis en place lesdits protocoles, le salarié peut éventuellement faire reconnaître la faute inexcusable de l’employeur.
L’employeur peut, à cet égard, mettre en place plusieurs dispositifs comme l’organisation de points hebdomadaires, mensuels ou annuels, adapter les horaires afin de maintenir un équilibre entre vie privée et vie professionnelle ou encore éviter les postes isolés des autres salariés …
Pour résumer, il existe de nombreuses pistes afin de faire reconnaître le burn out comme maladie professionnelle. Pour ce faire, le salarié doit s’adresser à son médecin traitant ou à la médecine du travail afin de procéder aux démarches nécessaires. Le taux d’incapacité au travail, évalué par la CPAM, doit être égal ou supérieur à 25 % afin que le burnout puisse être considéré comme maladie professionnelle.
Ensuite, la CPAM dispose d’un délai de 3 mois pour statuer sur le caractère professionnel de la maladie.
Quelles sont les protections légales pour les salariés atteints de burn-out ?
La reconnaissance du caractère professionnel d’une maladie permet au salarié qui souffre de burnout de bénéficier de la prise en charge de ses frais médicaux, d’une protection contre le licenciement et d’un régime d’indemnisation spécifique : indemnités journalières majorées, indemnités temporaires d’inaptitude, rente d’incapacité permanente…
Par ailleurs, le salarié victime d’un épuisement professionnel a le droit à certaines protections légales. En 2020, la Cour de cassation avait jugé que le licenciement pour insuffisance professionnelle d’un salarié ayant déclaré 8 jours plus tôt être en situation de burn-out était sans cause réelle et sérieuse. Elle constituait ainsi une discrimination en raison de son état de santé.
La protection des collaborateurs vivant un burn-out s’appuie sur l’obligation de sécurité de l’employeur.
Pour rappel, le Code du travail impose à l’employeur de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé aussi bien physique que mentale de ses équipes.
En cas de non-respect de cette obligation de sécurité, le salarié peut engager la responsabilité de l’employeur et faire appel à un avocat.
Si ce dernier est reconnu responsable d’une faute inexcusable au sens du droit de la sécurité sociale, il est sanctionné pour manquement à son obligation de sécurité envers les salariés. En outre, il devra en assumer les conséquences financières : majoration de la rente ou du capital, remboursement à la CPAM des préjudices du salarié.
En 2021, la Cour d’appel de Limoges a également reconnu dans un arrêt que « ce n’est pas parce que [la salariée] n’a pas sombré dans la dépression ou qu’elle n’a pas développé un burn-out, qu’elle n’a pas subi un préjudice moral sérieux en ayant travaillé pendant plusieurs années sous le management abusif de XX ».
Chloé Doumaz & Laurène Boussé