Prendre l’avis du bon côté : Règle N°1 en matière d’expérience collaborateur & d’expérience client ? Depuis quelques années, l’expérience client, nommée CX en anglais, est sur toutes les lèvres. De nombreuses entreprises grandes ou moins grandes ont compris que de la qualité de l’expérience client dépend la satisfaction, la fidélisation et la recommandation client. Plus besoin de convaincre les directions générales sur le fait que l’expérience client soit un levier de différenciation pour attirer, fidéliser, mobiliser des clients. Aujourd’hui, piloter l’expérience client est un sujet stratégique, presque devenu ‘normal’.
« T’es une entreprise et tu ne te soucies pas de l’expérience client ? Mais allô quoi, tu vas disparaître.»
En 2023, le nouvel enjeu, qui s’est accéléré après 2 ans de Covid et de confinement, est le pilotage de l’expérience collaborateur, nommée EX en anglais. Un concept construit en référence à celui de l’expérience client, si bien que ses leviers, ses difficultés et ses solutions font écho en tous points.
Mais si cela peut vous rassurer, Mesdames et Messieurs les DRH, entre le concept né dans les années 80 et aujourd’hui, il a fallu du temps à l’expérience client pour faire sa place et s’imposer comme un sujet essentiel. Aussi si vous avez du mal à convaincre vos Directions et vos managers de l’importance de l’expérience collaborateur, je vous propose dans cet article de décortiquer un des leviers qui a permis à l’expérience client de véritablement mettre le client au cœur des priorités.
Comment a émergé l’expérience client ?
A titre préliminaire, rappelons que l’expérience client est apparue dans les années 80. Au fil des années, ce concept n’a cessé de prendre de l’ampleur, la preuve, nous entendons régulièrement la phrase « L’expérience client c’est remettre le client au cœur des priorités ». C’est d’ailleurs la phrase que j’ai moi-même entendu il y a 8 ans lorsque j’ai intégré mes fonctions de Responsable de l’expérience client.
Mais alors me direz-vous, qu’est-ce qui était au cœur des priorités avant ?
Je suis certaine que vous avez la réponse. Le chiffre, la performance, le CA, les ratio, les résultats, les dividendes, la tune, le floose quoi ! On regardait les résultats annuels sans se soucier des avis clients car les produits se vendaient.
Les clients mécontents ? Ils étaient de mauvaise foi.
Les clients insatisfaits ? Ils reviendraient dans quelques semaines.
Les clients qui ne revenaient pas ? Ils seraient remplacés par d’autres.
Mais la concurrence accrue, la volatilité des clients, les attentes toujours plus élevées ont fait de l’expérience client un sujet impérieux. Les directions générales ont nuancé leur propos jusqu’à faire émerger des postes à part entière et même des départements entiers : Directeur client, Responsable de l’expérience client, Département voix du client, Service customer care… Beaucoup d’entreprises se sont alors définies comme client centricity ou customer centric (entendons par là « orienté client »).
Quel facteur a propulsé l’expérience client ?
L’avènement du smartphone et la digitalisation ont fait place à la e-reputation.
La justice est devenue populaire, le rapport de force s’est inversé, gentiment nous sommes entrés dans l’ère du ‘Me Power’, c’est-à-dire l’ère où le client a pris le pouvoir se disant « si la marque se fiche de mon avis, les clients eux, non » C’est ainsi que nous sommes devenus petit à petit une société qui juge, qui note, qui commente, qui post en permanence et donne son avis, que les entreprises le veuillent ou non.
Si durant de longues années, on disait qu’un client mécontent le disait à 10, les réseaux sociaux ont fait exploser ce chiffre ! Les entreprises ont compris que ne pas se soucier de l’avis client c’était prendre le risque de disparaître. Pas de client, pas de business.
L’avis client est ainsi devenu un indicateur de performance, tel un terreau à fertiliser pour agir avec méthodologie.
Quelle méthode l’expérience client a-t-elle utilisé et quelle croyance a-t-elle dépassé ?
Pour savoir quelle était la qualité de l’expérience client délivrée, les personnes en charge de piloter le sujet ont lancé plusieurs actions tels que :
- Explorer le parcours client pour savoir où étaient les irritants, les moments de vérité,
- Designer l’expérience client pour sublimer certaines étapes clés,
- Former les équipes à l’excellence relationnelle et à la mesure de satisfaction,
- Lancer des études quantitatives et qualitatives,
- Décortiquer les verbatim extraites des avis client,
- Définir les chantiers prioritaires pour faire progresser l’expérience client,
- Mesurer les actions menées
Finalement, pour faire sa place, l’expérience client a dépassé sa croyance initiale : mieux vaut faire l’autruche que se confronter à la réalité. Souvenez-vous :
Les clients mécontents ? Ils étaient de mauvaise foi.
Les clients insatisfaits ? Ils reviendraient dans quelques semaines.
Les clients qui ne revenaient pas ? Ils seraient remplacés par d’autres.
Le vrai changement d’état d’esprit s’est donc opéré lorsque les entreprises ont accepté de prendre « la vie et l’avis » du bon côté et accepter une vérité absolue :
TOUT CE QUI NE SE MESURE PAS NE S’AMELIORE PAS (et ça marche pour tout).
C’est vrai qu’on a peur de demander au client son avis en face à face, peur d’ouvrir la boite de Pandore, peur d’avoir des retours négatifs.
C’est vrai que questionner, demander l’avis du client c’est prendre le risque de se prendre des coups mais comme je le dis à mes clients lors de formation :
- Si vous voulez savoir comment vous améliorer, lisez les avis clients car votre plan d’action s’y trouve.
- Si vous voulez connaître vos axes différenciants, lisez les avis de vos clients, ils savent aussi être reconnaissants.
Il est vrai qu’avec ces questions l’entreprise prend le risque de se faire pointer du doigt ce qui ne va pas et d’appuyer là où ça fait mal. Mais mesurer la satisfaction client est un des piliers majeurs de ceux qui performent en matière d’expérience client.
Quelques exemples :
- Sur une échelle de 1 à 10, comment évaluez-vous la qualité de l’accueil ?
- Recommanderiez-vous notre entreprise à votre entourage ?
- Accepteriez-vous de partager votre expérience en quelques mots avec nous ?
Quel lien peut-on faire avec l’expérience collaborateur ?
L’expérience collaborateur a été pensée sur le même modèle que celui de l’expérience client.
Ce que peu d’entreprises considéraient comme un sujet impérieux en 2019 est devenu la préoccupation centrale de l’entreprise. Ce n’est pas la digitalisation ni l’avènement du smartphone qui ont propulsé l’expérience collaborateur sur le devant de la scène mais le COVID. Les Ressources humaines se sont retrouvées en première ligne pour limiter la casse. Alors que depuis quelques années, elles essayaient de convaincre de remettre le collaborateur au cœur de l’entreprise, alors qu’on se moquait des sujets de Qualité de Vie au Travail (QVT désormais appelée QVCT) et plus encore de bonheur au travail, ce qui devait arriver arriva. Les chassés sont devenus les chasseurs. Et aujourd’hui, la question n’est plus il est où le bonheur mais ils sont où les collaborateurs ?
J’imagine que vous me voyez venir, nous sommes en 2023, post Covid, les entreprises ont pour préoccupation number one : attirer, fidéliser, engager les clients INTERNES !
Le fameux Customer care, dont on parlait en expérience client, qu’on pourrait traduire par : il n’y a rien de plus important que la relation client s’applique à présent aux collaborateurs : il n’y a rien de plus important que la relation collaborateur. Pas de collaborateur, pas de business !
Quel levier actionner pour améliorer l’expérience collaborateur ?
Qu’il s’agisse de CLIENT ou de COLLABORATEUR, il faut NOUER LE DIALOGUE.
A la question, comment retenir les collaborateurs ? Je dirais qu’il faut se modeler à la CX c’est-à-dire écouter, mesurer, sonder, questionner, interroger.
- Peut-être faut-il oser poser des questions, dont les réponses feront mal
- Peut-être faut-il s’entretenir individuellement avec les Hommes pour entendre leurs mots, leurs maux, l’intensité de leur propos, les illustrations concrètes de leur quotidien.
En matière d’expérience client, on dit que les verbatim client, obtenues lors d’études qualitatives, sont les données les plus brutes mais aussi les plus authentiques. Mais pour recueillir ces informations, je dirais même ces confidences, il y a deux obstacles :
- LE TEMPS, on ne prend pas le temps pour faire le point sur ce qui fonctionne, ce qui fonctionne moins, on ne prend le temps pour offrir de la reconnaissance, pour améliorer ses pratiques managériales, on ne trouve pas le temps de caler 30 minutes pour se demander quelle routine implémenter pour améliorer son travail et celui de ses équipes.
- La CONFIANCE, les sondés ne savent pas s’ils peuvent vraiment dire ce qu’ils pensent sans en subir les conséquences. Est-ce que l’entreprise, mon manager, la DRH sont vraiment dans une démarche d’amélioration ou dois-je répondre ce qu’ils veulent entendre et dans ce cas je fais politiquement correct mais je ne fais pas avancer les choses au sein de mon entreprise ?
Quels outils pour écouter, mesurer, sonder l’expérience collaborateur ?
- Etude quantitatives
- Etudes qualitatives
- Questionnaire anonyme
- Entretien individuel de collaborateurs par un consultant externe neutre et impartial
- Audit par un consultant qui s’immerge dans l’entreprise
- Un collaborateur (comme un client) qui se sent écouté a davantage de chance d’être fidèle et engagé car il se sent valorisé, reconnu, entendu, compris.
- Un collaborateur (comme un client) apprécie qu’on lui accorde un temps de qualité, qu’on le considère individuellement en prenant le temps de l’échange.
Bien sûr, ce n’est pas facile de poser des questions cash aux équipes pourtant :
❓Les collaborateurs sont-ils fiers de leur entreprise ?
❓Ont-ils envie de faire rayonner leur marque employeur ?
❓Leur donne-t-on les moyens de donner la priorité aux clients ?
❓Reçoivent-ils de la reconnaissance ?
❓Apprécient-ils l’environnement de travail ?
Il n’y a qu’en interrogeant et qu’en prenant la température qu’on peut comprendre ce qui se passe dans l’entreprise sur des sujets aussi variés que : autonomie, salaire, équilibre pro perso (work life balance), reconnaissance, motivation au travail, conditions de travail, organisation du travail/ télétravail, charge de travail, ambiance de travail, communication, management, valeurs etc.
On demande souvent aux candidats, leurs points forts, leurs axes d’amélioration mais l’entreprise elle-même connaît-elle les siens ?
Quelles sont les erreurs à éviter lorsqu’on mesure la satisfaction collaborateur/ client ?
- Avoir des aprioris de départ et se dire que les gens ne savent que critiquer
- Se concentrer uniquement sur les irritants,
- Poser des questions qui occasionnent des retours positifs, aller chercher les pépites, les satisfactions : exemple, ce que les collaborateurs préfèrent chez vous
- Garder les résultats confidentiels, au contraire impliquer les collaborateurs et les partager
- Se focaliser sur les études quantitatives, donc l’aspect note, au lieu de comprendre comment on a obtenu 9/10 sur tel sujet, pourquoi on a eu 5/10 sur tel autre. L’objectif d’une étude qualitative est d’extraire des pratiques pour installer la satisfaction de manière durable.
- Communiquer sur les premières actions que vous allez mener. Ecouter c’est bien, mettre en place les actions attendues en est une autre.
Conclusion, le point de départ d’une stratégie de fidélisation est d’analyser les motifs d’insatisfaction, les réclamations, les points de souffrance, les irritants du parcours client comme du parcours collaborateur.
Bien sûr vous risquez d’entendre des choses qui ne vont pas vous plaire, on préfère tous s’entendre dire que nous sommes formidables mais les meilleurs copains ne sont pas ceux qui nous disent que nous sommes formidables, ce sont ceux qui nous disent la vérité avec le cœur. C’est dans les discussions difficiles que les choses évoluent.
Bien sûr, certains avis vous sembleront injustifiés mais ils appartiennent à celui qui a eu le courage de vous exprimer son mécontentement plutôt que de vous sourire devant et vous planter un couteau dans le dos une fois retourné, en usant et abusant des réseaux sociaux pour exprimer son avis.