Nous le savons, les nouveaux enjeux globaux ont fait des DRH des participants stratégiques aux missions de l’entreprise. Au cours des 18 derniers mois, leur rôle entre décideurs et salariés a facilité le déploiement du télétravail et la mise en place de dispositifs pour lutter contre le coronavirus en entreprise. La digitalisation des processus RH et les nouveaux modes de formation leur ont emboîté le pas. Aujourd’hui, la crise sanitaire reste une réalité de laquelle les directions des ressources humaines doivent s’accommoder pour mieux veiller au bien-être des salariés. Tentons de démêler la transformation des directions des ressources humaines et les changements inévitablement imbriqués les uns dans les autres.
L’évolution multidimensionnelle de la transformation des directions des ressources humaines
L’avènement du télétravail a contraint les entreprises à transposer les missions quotidiennes des salariés à divers outils numériques sous peine d’arrêt net de leur activité. Dans la foulée, les RH ont dû à la fois faciliter cette numérisation des processus par de nouveaux outils tout en instaurant des méthodes du bien-être des collaborateurs, pris dans ces chamboulements inattendus. Dans ce tourbillon, la marque employeur s’est affichée comme un projet d’envergure pour faire face à une guerre des talents intensifiée. En se concentrant sur les attentes des salariés présents et futurs, les entreprises incluent davantage et renforcent les aspects humains et la notion de sens dans leur stratégie de recrutement. Naturellement, l’expérience collaborateur a pris le dessus sur les fonctions supports du métier de RH.
Les soft skills des RH à l’épreuve de la crise sanitaire
Dans le contexte d’une situation anxiogène telle que la crise sanitaire, une communication réactive et claire pour accompagner les changements de situation, est essentielle pour rassurer les salariés et leur permettre de se concentrer sur leurs missions. Une tâche pas facile puisque la motivation et la capacité d’attention se retrouvent diminuées sous les effets de l’incertitude ambiante. Il est devenu apparent que s’ils souhaitent retenir et fidéliser les salariés, les RH doivent proposer des solutions adéquates à leurs problèmes. Ainsi, les RH se sont mis davantage à l’écoute des collaborateurs. Les conséquences de la crise sanitaire sur la santé physique et mentale des salariés et de leurs proches ont intensifié cette tendance. Par ailleurs, les problématiques soulevées par la mise en place du télétravail ont poussé vers une personnalisation des processus RH avec des solutions au cas par cas. Ainsi, la frontière entre vies professionnelle et personnelle s’estompe, notamment dans le cas de parents salariés par exemple.
Le sens de la collaboration plébiscité chez les talents à recruter atteint également la fonction RH obligée de se décloisonner pour mieux coordonner les divers intervenants au sein de l’entreprise. Comme tous les autres métiers, les ressources humaines doivent mettre leurs méthodes au diapason du mode distanciel, le management par la confiance fait partie de ces ajustements. Dans ce contexte, les processus RH ont eux aussi été appelés à évoluer.
Pour aller plus loin : développer les soft skills en entreprise
La transformation opérationnelle des métiers RH
La valorisation du capital humain devenant une priorité dans un marché du travail concurrentiel, requiert l’optimisation des tâches administratives essentielles mais chronophages. Cela passe par la digitalisation et une gestion plus fluide des processus RH tels que la paie, le suivi des absences, les feuilles de temps, les demandes de congés, la gestion des prestations et aussi la mise en place de l’activité partielle. Pourtant, ce cahier des charges administratif non-négligeable constitue le socle d’une fonction RH stratégique. Les données RH illustrent l’état de la masse salariale, révèlent des tendances de désengagement et indiquent où les améliorations sont nécessaires. Obtenir les bonnes informations en temps réel permet de mieux piloter les missions, prendre des décisions à un instant T, chose très difficile sans un outil SIRH performant et une base de données à jour.
Le recrutement se fait hybride
Après un gel des embauches au début de la crise sanitaire, la reprise du recrutement à distance a nécessité l’adoption rapide d’outils digitaux prévus à cet effet. La digitalisation des processus RH routiniers doit beaucoup à l’automatisation, comme la diffusion des offres sur plusieurs plateformes à la fois, le tri des CVs par critères ou la mise à jour des annonces. En revanche, des efforts restent à faire au niveau du capital humain, si les entretiens par visioconférence ont été rapidement maîtrisés, d’autres étapes cruciales comme l’intégration d’un nouvel arrivant dans l’entreprise ont posé plus de problèmes. L’intégration de nouvelles recrues, un passage de vie d’entreprise critique, par la présentation d’un référent par visioconférences ou encore un tour virtuel du siège n’est pas suffisant. Un onboarding engageant nécessite la participation de collaborateurs en chair et en os de l’autre côté de l’écran pour répondre aux interrogations et transmettre la culture de l’entreprise. C’est sur ce dernier point que prévoient de se concentrer nombre de RH pour faire face à d’éventuels recrutements en masse au sortir de la crise sanitaire. À terme, 60% des entreprises prévoient de garder au moins 25% de leurs collaborateurs en télétravail d’après une étude BCG ANDRH. Les employeurs seront-ils capables de s’installer dans un mode hybride conjuguant présentiel et distanciel ?
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La gestion de la performance des collaborateurs
Nous le savons, l’évaluation manuelle est fastidieuse, il s’agit donc de collecter des données RH de manière pertinente pour pouvoir les analyser par groupement. Grâce à une analyse plus systématisée, la fixation d’objectifs devient plus systématique ainsi que d’autres processus RH comme le développement professionnel dont nous parlerons plus bas. Par ailleurs, l’automatisation facilite le rappel d’échéance et le suivi en temps réel de l’avancement des projets via le tableau de bord SIRH. Une gestion de performance efficace suit des objectifs et des retours clairs. En ayant une vue globale et organisée des performances, les RH pourront identifier les points de tension et les aspects sur lesquels travailler pour obtenir de meilleurs résultats.
La formation répond au défi d’adaptation des entreprises
Entre stratégie d’entreprise et souhaits des collaborateurs, le développement des compétences est un des sujets cruciaux pour les directions de ressources humaines. Car dans le cadre de l’obsolescence des métiers et de l’évolution rapide des processus, la montée en compétences est devenue essentielle à la survie et l’essor des organisations. L’upskilling et le reskilling peuvent aider les entreprises à surmonter la crise de talents par des stratégies de formation en faveur à la fois des salariés pour effectuer un changement de carrière et des employeurs qui réduisent leurs coûts de recrutement.
Le passage en revue du développement de compétences des collaborateurs reflète l’impact de la crise sanitaire. Alors que la guerre des talents s’intensifie, réorienter les salariés par la formation augmente l’employabilité des collaborateurs et les fidélise. Ces formations complémentaires ou ouvertures sur de nouveaux métiers impliquent non seulement l’apprentissage de nouvelles compétences et d’outils numériques, mais aussi de nouvelles méthodes de travail dont le mode agile par exemple. La formation des managers s’impose donc comme une priorité : 93% des DRH interrogés pensent que la crise sanitaire va modifier les pratiques managériales dans leur entreprise selon l’étude BCG – ANDRH.
La transformation de la direction des ressources humaines est-elle juste une question de digitalisation ?
Non, il est surtout question de positionnement ! Le DRH ne campe plus ce personnage perçu pieds et poings liés, coincés entre des dirigeants ROistes et des salariés insatisfaits. Du gendarme surchargé par les tâches administratives à l’accompagnateur des grands changements dans l’entreprise, il a fait son chemin. Par exemple, la gestion des départs d’un côté et la rétention de talents de l’autre place le DRH dans une posture paradoxale. Mais il peut choisir de proposer une reconversion au sein même de l’entreprise aux salariés dont le poste est en obsolescence. Fidéliser implique se plonger dans les vraies raisons pour lesquelles les salariés signent ailleurs. Les questions de fond mêlent la survie de l’entreprise et le bien-être des collaborateurs :
- À quoi ressemble un plan stratégique RH au sortir d’une crise sanitaire d’envergure ? Quels indicateurs de performance conserver, supprimer ou ajouter au tableau de bord ?
- Quelle place donner à la marque employeur ? Quelles valeurs véhiculer pour attirer et fidéliser les talents ?
- Quid de la RSE ? Comment promouvoir la diversité, la parité ou l’égalité salariale vers un capital humain enrichi ? Comment renforcer les efforts et gestes écologiques au sein de l’entreprise ?
- Concernant le retour au présentiel : comment repenser le rythme de travail et l’organisation des opérations ? Quels contrôles pratiquer pour préserver la santé des salariés ? Peut-on mélanger les salariés vaccinés et non-vaccinés ?
- Quels métiers sont prioritaires pour la montée en compétences ?
- Quelles méthodes de management ont porté leurs fruits ? Lesquelles sont à bannir ?
- Comment maintenir le lien social entre les salariés qui reviendront au bureau et ceux qui resteront en télétravail ?
- Comment préparer la reprise de septembre face à une éventuelle quatrième vague de Covid19 ?
La transformation des directions des ressources humaines ne pourra se faire sans la digitalisation des processus RH. Se baser sur une approche nourrie par la donnée invite les RH à pousser leur vision ROIste du métier. En revanche, la numérisation doit soutenir les objectifs stratégiques de l’entreprise et non l’inverse. Car au cœur des questions ci-dessous ressort le capital humain de l’entreprise. Le rôle de la direction des ressources humaines est plus que stratégique, il est actif et central à l’avenir des organisations chamboulées par la crise sanitaire.
Maï Trebuil