Le contexte économique actuel pourrait sembler défavorable à la rétention des talents qui souhaitent une augmentation de salaire, notamment face à une inflation croissante. Les professionnels des Ressources Humaines et les employeurs sont confrontés à une double problématique : favoriser la rétention de talents dans un contexte de turn over élevé et pallier aux demandes d’augmentation de salaire face à une inflation en hausse en France.
Une augmentation de salaire mise à mal par une forte inflation
Augmentations salariales : des résultats insuffisants
Selon une enquête menée par la société Mercer sur les Négociations Annuelles Obligatoires (2021-2022), bien que 2022 ait fait son petit retour en matière d’augmentation individuelle du salaire pour l’ensemble des salariés dans le contexte de cette inflation (13 % vs 5 % pour l’année 2021), ce taux reste en dessous du chiffre de 2019 (16 %).
Malgré un effort en matière d’augmentation de salaire devant la menace d’une inflation en France (+ 3,1 % depuis le début de l’année en moyenne selon WTW) ainsi que sur la question de la revalorisation du Smic, l’inflation actuelle empiète fortement sur le pouvoir d’achat des salariés. Les efforts déployés par le gouvernement en matière d’augmentation des rémunérations semblent donc insuffisants face aux tendances de cette forte inflation.
En effet, celle-ci se traduit par des prix à la consommation pour tous les ménages (hors tabac) qui sont en augmentation de 6,0 % entre fin juin 2021 et fin juin 2022.
Sur un an et en euros constants, le Salaire Horaire de Base des Ouvriers et des Employés (SHBOE) diminuerait donc de 2,5 %. Et le Salaire Mensuel de Base (SMB), de 2,9 %, rappelle la DARES dans un extrait de publication sur l’évolution des salaires de base dans le secteur privé au 2e trimestre 2022.
Inflation et recrutement : quel impact ?
Plus largement en Europe, on note que le taux annuel de la zone euro lié à cette inflation serait en hausse de 8,1 %, si on en croit l’estimation publiée par Eurostat en mai dernier. En cause, la guerre en Ukraine ? Il semblerait en effet que l’actualité liée à l’Ukraine et les sanctions occidentales prises à l’égard de Moscou dans ce contexte de crise ne seraient pas étrangères à cette croissante inflation et donc à la problématique des augmentations de salaires.
Selon l’enquête WTW, dans un contexte où cette inflation annuelle à l’échelle européenne atteignait 8,1, plus de la moitié des entreprises françaises auraient augmenté leur volume de recrutement depuis ce début d’année.
Elles peinent à attirer les talents et les retenir. C’est le cas notamment des talents du digital (79 %) mais aussi des cadres (57 %) et des commerciaux (55 %).
Difficile de recruter face à des tensions économiques – et politiques – aussi tendues. Toutefois, l’ensemble de ces problématiques auraient déterminé les entreprises à revoir toute leur stratégie : au niveau de la rémunération d’une part, mais pas seulement…
Augmentation de salaire : que prévoient les entreprises face à une telle inflation ?
Budgets d’augmentation de salaire prévus pour 2023
Face aux inquiétudes liées à un marché du travail sous tension, aux préoccupations relatives à la gestion des coûts comme l’inflation ou encore une augmentation du prix des fournitures ainsi que les préoccupations des salariés, les entreprises seraient plus généreuses.
Ainsi, les premières perspectives pour 2023 indiqueraient que les entreprises françaises ont prévu une augmentation moyenne de 3,3 %, ce qui équivaut à 0,2 points de pourcentage en plus par rapport aux augmentations réelles accordées cette année.
Pour les dirigeants, on prévoit une augmentation de salaire à hauteur de 3,2 % (contre 2,8 % en 2022). Concernant les managers, cadres, employés et techniciens, cette hausse serait à 3,3 % contre 3,1 %. Et pour les ouvriers, on prévoit une hausse de 3 % contre 2,8 % cette année.
Les alternatives à une augmentation de salaire en réponse à cette inflation
Les Négociations Annuelles Obligatoires (NAO) sont ouvertes. Comme le souligne l’étude Mercer, deux tiers des entreprises utilisent, en contexte de forte inflation, ces négociations dans l’optique de négocier d’autres choses qu’une augmentation de la rémunération. Plusieurs éléments négociés ont été cités en dehors d’une augmentation des rémunérations : la prime exceptionnelle à titre collectif (14 %), l’égalité femmes-hommes (14 %), l’organisation du travail (12 %), la prime exceptionnelle à titre individuel (8 %) ou encore la mise en place et la hausse “de la part employeur sur la retraite surcomplémentaire” (8 %).
Par ailleurs, les employeurs se seraient appuyés sur les mesures d’urgences déployées favorisées récemment par la loi française, comme le triplement de la prime Macron (ou prime de partage de la valeur). De même, ils s’appuierait aussi selon un article HelloWork Place sur la “conversion des RTT en salaire ou encore la hausse du plafond de défiscalisation des heures supplémentaires.”
Enfin, plusieurs entreprises miseraient sur “d’autres composantes du package de rémunération pour attirer et fidéliser leurs talents” selon cette même source. Il s’agit entre autres du 13e mois, d’une augmentation des tickets-restaurant ou encore de l’indemnisation relative aux frais de télétravail.
Même si on voit que la question de l’augmentation de salaire en France en contexte de forte inflation reste présente, on remarque aussi que d’autres éléments ont leur importance pour les collaborateurs. Et ceux-ci sont sans doute étroitement liés à leur engagement au sein de l’entreprise. Cette inflation dont les collaborateurs français n’avaient sans doute pas besoin, vient se greffer à la problématique que rencontrent les professionnels des Ressources Humaines : leur difficulté à attirer des talents et les fidéliser.