Un entretien professionnel est un rendez-vous clé entre l’employeur et le salarié. Au-delà de son caractère obligatoire, c’est aussi un outil de gestion RH important pour l’entreprise.
Il permet en effet d’aborder les perspectives d’évolution du salarié, sa qualification, les projets de formation, etc. C’est également l’opportunité de communiquer avec ses salariés et de prendre en compte leurs aspirations, de préparer son plan de formation ou sa GPEC, etc. Un entretien professionnel est donc un dispositif à ne pas négliger.
Mais en pratique, la mise en œuvre des entretiens professionnels peut parfois sembler complexe : entretiens périodiques tous les 2 ans, état des lieux tous les 6 ans, entretiens après une longue absence…Comment s’y retrouver ? Que faut-il exactement mettre en place et à quel moment ?
Pour tout comprendre sur un entretien professionnel, suivez le guide !
Un entretien professionnel : de quoi s’agit-il ?
Pour commencer, faisons une rapide présentation de ce dispositif. En effet, il regroupe en réalité trois entretiens différents. Lesquels ? Quelles entreprises et salariés sont concernés ? Comment les mettre en œuvre ?
Les différents entretiens professionnels
Le code du travail prévoit trois catégories concernant les entretiens professionnels différents :
- L’entretien professionnel périodique, à organiser tous les 2 ans
- L’entretien professionnel au retour de certaines absences (longue maladie, maternité, etc.)
- L’entretien-bilan tous les 6 ans
Attention à ne pas les confondre avec un entretien d’évaluation (ou entretien annuel).
Ce dernier est organisé tous les ans. Sa finalité est différente : il fixe les objectifs pour l’année à venir, analyse les performances, fait le bilan de l’année écoulée etc. C’est également au cours de l’entretien d’évaluation que le salarié et l’employeur peuvent aborder le sujet de la rémunération.
Pour des questions pratiques, il est possible d’organiser un entretien annuel et professionnel en même temps. Mais il faut toutefois veiller à réaliser deux comptes rendus différents (annuel et professionnel)
Entretien professionnel : Qui est concerné ?
Les entretiens professionnels doivent être organisés dans toutes les entreprises, quel que soit l’effectif.
Ils concernent l’ensemble des salariés, peu importe le contrat (CDI, CDD, apprentissage, professionnalisation, etc.), le temps de travail (temps complet ou partiel) ou l’ancienneté.
Le salarié peut-il refuser cet entretien professionnel ? Cette hypothèse n’est pas spécifiquement prévue par les textes. Toutefois, l’employeur risquant des sanctions s’il n’organise pas l’entretien professionnel, il est préférable de vous « protéger » si le salarié refuse. Ainsi, veillez à garder une trace de la convocation du salarié et à recueillir son refus par écrit.
Quelles modalités ?
Un entretien professionnel se déroule de préférence dans l’entreprise, en présentiel. Le recours à la visioconférence est également possible, en particulier si le salarié concerné est en télétravail.
Qu’il soit organisé en face à face ou à distance, il doit obligatoirement donner lieu à la rédaction d’un compte rendu écrit, dont une copie est remise au salarié.
Selon la taille de l’entreprise, l’entretien professionnel est mené par l’employeur lui-même, un manager, un membre du service RH, etc.
Dans les entreprises de plus de 50 salariés, le CSE est informé de la mise en œuvre des différents entretiens professionnels au moyen de la BDES (base de données économiques et sociales).
Les différents entretiens professionnels en détail
L’employeur doit donc organiser trois catégories d’entretiens différents. Mais à quoi servent-ils ? quelles différences entre eux ? À quel moment faut-il les mettre en place ? Examinons chacun d’eux plus précisément.
Un entretien professionnel périodique (tous les 2 ans)
Quels objectifs ?
Un entretien professionnel périodique permet d’aborder les sujets suivants :
- Perspectives d’évolution professionnelle du salarié, notamment en terme de qualification et d’emploi (c.trav.art.L6315-1, I)
- Informations relatives à la validation des acquis de l’expérience
- Informations sur l’activation du compte personnel de formation, les abondements éventuels et le conseil en évolution professionnelle
Quand l’organiser ?
Il doit être réalisé tous les 2 ans. Néanmoins, un accord collectif ou de branche peut prévoir une périodicité différente (art.L6315-1,III).
Le décompte se fait de date à date à partir de l’embauche ou de l’entretien précédent.
Point de vigilance. Lors de l’embauche, vous avez l’obligation d’informer le salarié qu’il bénéficie d’un entretien professionnel tous les deux ans. Cette information peut se faire par une clause spécifique du contrat de travail ou dans une note d’information séparée.
Entretien professionnel au retour de certaines absences
Quelles sont les absences concernées ?
Il porte sur les mêmes sujets que l’entretien périodique cité précédemment. Vous devez obligatoirement le proposer au salarié lors de son retour après l’une des absences suivantes :
- Congé de maternité
- Congé parental d’éducation à temps plein ou partiel
- Congé de proche aidant
- Congé d’adoption
- Congé sabbatique
- Période de mobilité volontaire sécurisée
- Longue maladie
- À l’issue d’un mandat syndical
Quand l’organiser ?
L’employeur doit prévoir cet entretien au retour du salarié, même si ce dernier a déjà bénéficié d’un entretien périodique moins de 2 ans avant. À défaut de délai mentionné par le code du travail, l’employeur l’organise dans un délai raisonnable, soit dans les 2 à 3 semaines environ.
Dans un souci de preuve, pensez à convoquer le salarié par écrit .
Bon à savoir. Depuis le 1er janvier 2019, le salarié peut demander que l’entretien soit organisé de manière anticipée, avant sa reprise du travail.
L’entretien-bilan tous les 6 ans
Quels objectifs ?
Tous les 6 ans, le salarié bénéficie d’un état des lieux récapitulatif de son parcours professionnel.
Cet entretien-bilan permet :
- De vérifier qu’il a bien bénéficié d’entretiens périodiques tous les 2 ans
- D’apprécier s’il a
- suivi au moins une action de formation durant son parcours professionnel
- acquis des éléments de certification (par la formation ou une VAE)
- bénéficié d’une progression salariale (au niveau individuel et/ou collectif) ou professionnelle (changement d’échelon, nouvelles responsabilités, changement de métier, etc.)
- suivi au moins une action de formation durant son parcours professionnel
Cet entretien professionnel donne lieu à la rédaction d’un compte rendu avec une copie remise au salarié.
Bon à savoir. Un accord d’entreprise ou de branche peut prévoir d’autres modalités pour apprécier le parcours professionnel du salarié.
Quand l’organiser ?
Cet entretien-bilan a lieu tous les 6 ans, cette durée s’appréciant au regard de l’ancienneté du salarié dans l’entreprise (art.L6315-1, II).
Un accord collectif ne peut pas remettre en cause cette périodicité (contrairement à l’entretien prévu tous les deux ans).
Dispositions COVID-19. Les entretiens qui devaient avoir lieu entre le 1er janvier 2020 et le 30 juin 2021 ont pu être reportés jusqu’au 30 juin 2021 (ordonnance 2020-1501 du 2 décembre 2020).
Manquement de l’employeur : quelles conséquences ?
La mise en place de ces entretiens professionnels, selon la périodicité prévue par le code du travail, est une formalité obligatoire. Le non-respect de cette obligation par l’employeur entraîne donc certaines sanctions.
Entretien professionnel : dans quels cas l’employeur peut-il être sanctionné ?
Le principe
Le code du travail prévoit une sanction uniquement pour les entreprises d’au moins 50 salariés.
Ces dernières doivent abonder le CPF du salarié s’il n’a pas bénéficié, pendant 6 ans :
- Des différents entretiens professionnels
- et d’au moins une formation autre que les formations obligatoires conditionnant l’exercice d’une activité ou d’une fonction
Exemple. Si, pendant une période de 6 ans, le salarié a bénéficié de trois entretiens périodiques mais aucune formation, l’obligation n’est pas respectée. Idem s’il n’a bénéficié que d’un seul entretien périodique et d’une formation non obligatoire.
En revanche, l’obligation est respectée si le salarié a eu 3 entretiens et au moins une formation non obligatoire.
Droit d’option
Jusqu’au 30 septembre 2021, l’employeur a le choix entre deux options pour justifier de l’accomplissement de ses obligations. Il peut en effet appliquer le principe décrit ci dessus (loi “avenir” de 2018) ou l’ancienne réglementation de 2014. Ce choix s’opère de manière individuelle salarié par salarié.
Pour résumer, l’employeur remplit ses obligations si le salarié a bénéficié de tous les entretiens périodiques et :
- Option 1 : d’une formation non obligatoire (nouvelle réglementation issue de la loi d’avenir de 2018)
- Option 2 : au choix, d’une action de formation, de l’acquisition d’une certification ou d’une VAE, d’une progression salariale ou professionnelle (ancienne norme de 2014).
À compter du 1er octobre 2021 ce choix ne sera plus possible. L’employeur devra obligatoirement se conformer aux dispositions de 2018.
Quid des entreprises de moins de 50 salariés ?
En principe, elles ne sont pas concernées par cette sanction. Toutefois, elles pourraient voir leur responsabilité engagée et être condamnées à verser des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par le salarié.
Il est donc important de garder en tête que l’obligation d’organiser les entretiens professionnels concerne toutes les entreprises, dès le premier salarié.
Entretien professionnel : quelle sanction ?
L’employeur doit verser un abondement de 3 000 euros sur le compte personnel de formation de chaque salarié concerné (que le collaborateur soit à temps plein ou à temps partiel). Cette somme est versée auprès de la Caisse des dépôts et consignation et est créditée sur le CPF du salarié dès sa réception. Le salarié en est informé.
Si l’entreprise ne verse pas spontanément l’abondement ou verse un montant insuffisant, elle est mise en demeure de procéder au versement dans le cadre des contrôles effectués par l’inspection du travail. À défaut, elle devra verser le montant de l’abondement majoré de 100% , soit 6 000 euros. Cette somme est alors versée au Trésor Public (art.L6323-13).
Un accord d’entreprise ou de branche peut prévoir un cadre, des objectifs et des critères collectifs d’abondement par l’employeur du CPF (art.L6315-1, III).
Dispositions COVID-19. La sanction de l’abondement du CPF est suspendue jusqu’au 30 septembre 2021. Les employeurs qui n’ont pas pu tenir leurs entretiens professionnels avant le 30 juin 2021 ont donc jusqu’à cette date pour régulariser la situation (ordonnance 2020-1501 du 2 décembre 2020 et loi de sortie de crise sanitaire du 31 mai 2021).
Céline Le Friant
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