Le webinar Balthazar Agency – ECDYS organisé le mois dernier intitulé « Management hybride et intelligence collective : les leviers d’une reprise réussie ? » était riche en retour d’expérience sur la diffusion des connaissances au travers de l’entreprise par différents modes numérisés. Liliane Sebas, Directrice de la conduite du changement au Centre National d’Études Spatiales (CNES), et Veerle Leong, Group Performance Project Manager chez Air Liquide, ont partagé les enseignements des initiatives déployées au sein de leurs entreprises. Comment ces entreprises ont-elle pu fluidifier les connaissances et faire fleurir l’intelligence collective à l’échelle globale ?
Le management hybride au service de l’intelligence collective
Sous l’optique d’éveiller et de cultiver l’intelligence collective, Liliane Sebas (CNES) décrit l’adaptation du séminaire annuel de managers habituellement effectué en présentiel en parcours de montée en compétences à distance. Le rythme intense de deux journées à temps plein a été remplacé moins par des séquences à la carte bimensuelles. Pour s’assurer d’une bonne assimilation du contexte dans lequel s’inscrit le management hybride, la programmation a inclus une session d’inspiration sur la direction de l’entreprise du futur et l’organisation du travail qui la définit. Les managers ont été amenés dans une démarche d’apprenant autour du management hybride tout en leur laissant la main sur leur degré de participation.
“Ils ont pu bénéficier de moments de travail ensemble sur l’opérationnel ou sur le management. Ils ont même pu se former,” raconte Liliane Sebas avant de poursuivre : “malgré la contrainte du temps et du ciblage des sujets, il était important que les managers se sentent libres de piocher et d’individualiser leurs parcours.”
En somme, faire émerger l’intelligence collective par de nouveaux modes de travail et de management nécessite non seulement des managers impliqués, mais aussi des formations adaptées aux enjeux auxquels ils font face au quotidien.
L’assimilation du mode asynchrone
Comme une grande partie des entreprises l’année passée, les équipes du CNES sont heurtées au management hybride et son mode de travail asynchrone, essentiel à la mise en place de l’intelligence collective. Par exemple, Liliane Sebas note des croyances à la dent dure comme l’idée que le travail se réalise uniquement à un instant T, lors d’une réunion par exemple. Dans le cadre du mode de travail asynchrone, cela présente une difficulté organisationnelle : chacun doit savoir travailler indépendamment et préparer ces dernières en amont. L’autonomie est indispensable pour une communication fluide une fois la réunion en cours, elle participe à l’efficacité de l’intelligence collective. Un enjeu commun crucial est donc de mettre en place des flux de travail en autonomie basés sur l’autodiscipline des salariés.
Embarquer les salariés convaincus
Pour Liliane Sebas, le séminaire dédié aux managers a permis de repérer ceux qui avaient envie de faire évoluer leurs pratiques pour pouvoir ensuite leur proposer un accompagnement ou un soutien adapté. “Quand on est sur de la transversalité, je mise de plus en plus sur des gens qui sont partants, qui ont envie et qui y croient,” partage Liliane Sebas. Pourquoi ? Les collaborateurs qui sont déjà convaincus seront plus enclins à jouer le rôle de porte-parole et de véhiculer les idées auprès de leurs pairs. Dans ce sens, les managers impliqués peuvent aider à identifier des formats susceptibles de fonctionner plus que d’autres parmi un éventail de propositions. On entre alors dans une dynamique de co-responsabilité entre l’entreprise et les managers, amenés à participer aux décisions, les managers se responsabilisent vis-à-vis du déploiement organisationnel et des objectifs à atteindre.
L’intelligence collective augmentée par la digitalisation
Comme bien des entreprises, Air Liquide a davantage investi dans son espace digital interne lorsque le télétravail s’est imposé. Un des projets de transmission de connaissances a été de capturer tous les contenus produits par les différents groupes de collaborateurs sur une plateforme interactive. En soutien direct à l’intelligence collective, ce type de projet remplit plusieurs objectifs :
- Éliminer la perte des connaissances lors des départs de collaborateurs
- Communiquer la connaissance entre unités, par exemple entre le département des achats et les opérations.
- Proposer de nouvelles initiatives à certains départements comme celui des opérations
- Économiser sur la R&D
- Collaborer de manière plus étroite avec les partenaires extérieurs à l’entreprise.
Créer l’émulation de manière ludique
Les projets menés par des collaborateurs Air Liquide sont enregistrés sur une plateforme commune pour que d’autres s’inspirent de ces initiatives existantes et puissent même contacter les chefs de projets. Enfin, les personnes inspirées enregistrent à leur tour leurs projets en cours de réalisation, bouclant ainsi la boucle. Veerle Leong, Group Performance Project Manager chez Air Liquide explique également que ce genre de fonctionnement nécessite d’être régulièrement animé pour créer une dynamique permanente. Pour animer l’intelligence collective, l’entreprise a mis sur pied un trophée annuel pour reconnaître les projets les plus intéressants et prometteurs. Cette compétition interne permet de créer un moment fort où l’engouement est à son paroxysme, les projets en ligne sont consultés par des milliers de collaborateurs qui votent pour celui qu’ils préfèrent.
“Aujourd’hui, on voit très bien que les projets qui ont été répliqués ont porté leurs fruits, on voit donc qu’ils sont réplicables. Cela a permis de créer un cercle vertueux, car une fois qu’on en voit les résultats, on est d’autant plus inspiré,” note Verle Leong.
Ces trophées annuels incarnent un véritable rassemblement en ligne, chose qui a certainement été rendue possible par les effets de la crise sanitaire sur le monde du travail. Ce bouleversement a été l’occasion de revoir le partage de connaissance dans un contexte à la fois inédit et tourné vers la transformation numérique déjà amorcée par nombre d’entreprises. Attention, si l’intelligence collective s’appuie sur le management hybride, qui a actuellement le vent en poupe, elle s’animera réellement que si les collaborateurs en voient l’utilité.
Maï TREBUIL