Les « tracances » est un néologisme formé à partir des mots travail et vacances.
Que vous soyez plutôt juillettiste ou aoûtien, faites-vous partie de ces salariés qui travaillent depuis leur lieu de vacances ?
« Tracances » : que signifie ce terme ?
Sur les réseaux sociaux, le terme « tracances » abonde depuis le début de l’été. Ce concept désigne le fait, pour les salariés ou les indépendants, de télétravailler depuis leur lieu de vacances. Il concerne donc uniquement les métiers télétravaillables et semblerait séduire de plus en plus de travailleurs.
Les tracances peuvent être mises en parallèle avec le néologisme anglais workation, venu tout droit des Etats-Unis.
Entre travail et vacances, certains ne feraient donc plus la différence. En particulier parmi les indépendants, les cadres et les CSP+ bénéficiant du télétravail. Cette pratique séduirait également les digital nomads, qui devraient représenter 1 milliard de personnes dans le monde en 2035 selon une étude Levels.io.
Pour autant, ce concept reste pour le moment peu connu des actifs : parmi les 7 % des salariés qui y ont accès, 3 % en bénéficient et 4 % ne sont pas intéressés (étude VVF et VVF Ingénierie 2023).
Les adeptes des tracances peuvent choisir de télétravailler avant ou après leurs congés pour profiter de quelques jours supplémentaires de présence sur leur lieu de vacances.
Les confinements successifs ont d’ailleurs participé à populariser ce phénomène puisque nombre d’habitants des métropoles françaises sont partis télétravailler dans leur résidence secondaire à ce moment-là.
À la fin de l’année 2021, 38% des salariés du secteur privé télétravaillaient selon le baromètre Télétravail et Organisations hybrides 2022 de Malakoff Humanis. Le télétravail a progressé de 8 points par rapport à 2019 où il atteignait 30% (34% en 2020). Le mode de travail hybride continue de séduire et les dirigeants sont d’ailleurs 63% à penser qu’il va continuer à se développer.
Mais les tracances soulèvent plusieurs interrogations : ce terme équivoque signifie-t-il que le salarié est en vacances ? Travaille-t-il sur son temps de travail ? S’agit-il de télétravailler à l’étranger ou sur son lieu de villégiature pendant ses congés ?
Pour Hubert Guillaud, auteur de Coincés dans Zoom : l’uberisé, c’est vous !, les tracances relèvent bel et bien du travail. En effet, ce terme n’existe pas au sein du Code du travail, il n’existe ainsi aucun entre-deux.
Du côté de l’employeur, la mise en place d’une telle organisation peut interroger. Comment l’entreprise peut-elle maintenir sa performance dans ces conditions ?
Depuis 2018, nous proposons à ceux qui le souhaitent de travailler à distance sur leur lieu de villégiature jusqu’à trente jours d’affilée. Une possibilité qu’ils peuvent actionner jusqu’à quatre fois dans l’année.
La société Evaneos impose une demi-journée avec des horaires compatibles avec la France (si le collaborateur se trouve à l’étranger). L’entreprise fait également en sorte que tous les managers ne soient pas absents des bureaux au même moment.
L’employeur peut également organiser des points réguliers entre les membres des équipes. Pour que les tracances se déroulent au mieux, les salariés doivent être autonomes. Un management par la confiance est recommandé pour être en mesure de manager efficacement les équipes à distance.
Une concept qui divise : les avantages et inconvénients
D’après l’étude VVF et VVF Ingénierie 2023, la possibilité de bénéficier de tracances intéresserait particulièrement les jeunes de moins de 35 ans. 33 % des 18-35 ans seraient prêts à tester ce concept.
Imaginez, vous télétravaillez, au bord de la piscine ou en bord de mer, avec vos proches. Car la mer représente l’environnement préféré de 48% des Français, pour des vacances ou des tracances.
Mêler travail et vacances serait la recette idéale pour maintenir la motivation au travail de certains collaborateurs. Ils y trouveraient un moyen de gagner en autonomie et de s’évader tout en travaillant.
Le premier avantage cité par ses adeptes réside dans le fait de pouvoir travailler dans un cadre plus agréable et d’être plus détendu. Le retour au bureau est donc progressif.
Ensuite, le workation est un moyen de mixer le travail et le voyage, notamment avec la découverte d’une région hors saison touristique. Enfin, il permet à la personne qui télétravaille de partir plus longtemps en vacances avec sa famille ou ses proches.
Mais les tracances ne sont pas synonymes de vacances. Chaque salarié peut vivre cette expérience différemment.
Il faut garder à l’esprit que travailler depuis son lieu de vacances ne comporte pas que des avantages. Les tracances peuvent brouiller la frontière entre travail et temps libre. Ce qui peut impacter négativement le work-life balance et la santé mentale des salariés.
Certains peuvent éprouver des difficultés à déconnecter et faire la distinction entre la sphère privée et professionnelle. Ce qui peut poser problème lorsqu’on sait que 88 % des actifs pensent que les vacances sont de plus en plus indispensables à cause de la pression professionnelle.
- 78 % des actifs affirment que les vacances ont des impacts positifs directs sur leur travail
- 41 % d’entre eux estiment qu’elles améliorent leur productivité
- 25 % qu’elles leur permettent d’être plus impliqués dans leurs différentes tâches professionnelles au quotidien et plus créatifs / innovants (12 %).
De plus, 53 % des salariés actifs ne souhaitent pas être en tracances car ils estiment qu’ils ont besoin d’être dans un environnement de travail plus classique pour être efficaces. La qualité de la connexion internet doit également être prise en compte.
Enfin, le risque des tracances est qu’elles découlent d’une charge de travail trop haute. En effet, 64 % des actifs déclarent qu’il est de plus en plus difficile de respecter la frontière entre vie privée et professionnelle et 34 % qu’il devient très difficile de ne pas travailler durant les vacances vu l’augmentation de la charge de travail. Les artisans et les cadres sont ceux pour qui la déconnexion est la plus compliquée.