Trois questions à… Hervé Borensztejn, directeur associé de Karistem
Lors d’un colloque sur le management à distance organisé le 1er juin dernier et auquel vous avez participé*, un sondage révélait que près de 53% des personnes interrogées avaient un ressenti négatif vis-à-vis du management à distance. Quel sentiment vous inspire ce résultat ?
Hervé Borensztejn : Malheureusement, ce résultat ne me surprend même si je pense que ce n’est pas le management à distance en lui-même qui est en cause, mais davantage les modes de management que l’on peut trouver aujourd’hui dans les organisations, où les rapports entre les managers et les managés reposent de moins en moins sur la confiance. Après tout, certains managers de proximité peuvent se montrer très distants avec leurs équipes alors qu’ils se situent dans des bureaux côtes-à-côtes voire dans un même open space. Certes, le management à distance n’est pas sans poser quelques difficultés, mais rien d’insurmontable pour autant. Au final, je crois surtout que l’éloignement géographique est un révélateur de la qualité du management en général et de celle du manager en particulier. Les insuffisances ou les erreurs de management sont, quant à elles, amplifiées.
Dans les grands groupes, le management d’équipes multiculturelles est souvent invoqué pour expliquer les difficultés liées au management à distance. Qu’en pensez-vous ?
Je ne partage pas totalement cet avis. Bien entendu, il y a des différences culturelles entre les continents. Mais dans bien des groupes, la culture d’entreprise tend à se superposer aux cultures nationales. Le management à distance n’est pas une question de passeports. D’ailleurs, il est parfois plus difficile de manager des équipes d’une même nationalité mais de régions différentes, que des étrangers entre eux. En outre, la barrière de la langue n’est plus une excuse, dans la mesure où un « anglais des affaires » s’est développé un peu près partout. Le management d’équipes multiculturelles demande avant tout d’être explicite dans sa communication et de choisir des termes impactants. Une recette qui s’applique encore une fois à tous les types de management, qu’ils s’opèrent à distance ou à proximité.
Quels conseils donneriez-vous aux organisations et aux managers pour mieux appréhender le management à distance ?
Avec l’internationalisation de l’économie et le développement de certaines pratiques comme le télétravail, le management à distance n’est plus une option, c’est une réalité. Le travail à distance comporte des risques et apportent un certain nombre de contraintes. Pour les surmonter, les organisations doivent absolument responsabiliser leurs équipes et leur attribuer davantage d’autonomie, en d’autres termes rétablir une relation de confiance entre les managers et les managés. Ce qui, bien entendu, n’exclut pas le contrôle. Mais il ne faut pas confondre pilotage et management à distance, avec toute la dimension humaine que cela comporte. Malgré l’éloignement géographique, les managers doivent faire preuve d’empathie avec leurs équipes, ce qui n’est pas toujours évident avec les outils de communication actuels, aussi modernes soient-ils. D’où l’importance également de se déplacer souvent afin de se rencontrer et d’entretenir la relation de confiance ainsi créée.
* Colloque intitulé « Management à distance : les défis du binôme RH-Manager », manifestation organisée par les étudiants du Master 2 « GRH dans les multinationales » de l’IAE Gustave Eiffel, en partenariat avec l’ANDRH (Association Nationale des DRH), l’ARRI (Association Relations et Réalités internationales) et l’EAPM (European Association for People Management).
Hervé Borensztejn : Ingénieur civil et Docteur de l’École des Mines de Paris, auditeur du Centre des Hautes de Développement Économique (CHEDE) et ancien DRH de grands groupes internationaux, Hervé Borensztejn possède une longue expérience du leadership, du management international et du développement des Ressources Humaines. Directeur du développement RH de Vivendi (1997-2000), senior vice-président en charge du développement des RH et des compétences au sein du groupe EADS (2001-2010), Hervé Borensztejn a notamment été jusqu’en 2012 vice-président exécutif en charge des RH et de la communication du groupe Converteam / General Electric Power Conversion, avant d’intégrer le cabinet Karistem en tant que directeur associé du Pôle RH. Il est également professeur associé en ressources humaines à l’université Paris II (Panthéon-Assas) et intervenant à l’ENA et à l’Essec.
A propos de Karistem Corporate Consulting
Karistem Corporate Consulting (KCC) est un cabinet de conseil en stratégie, transformation et excellence opérationnelle. Depuis 2004, KCC élabore et met en œuvre les grands projets de transformation portés par les Directions Générales visant à améliorer la compétitivité du cœur de métier et / ou à aligner les fonctions support sur la stratégie de l’entreprise. La méthode KCC est orientée résultats et met l’humain au cœur de chaque transformation. KCC s’engage d’une part sur l’implication et l’appropriation du changement par le plus grand nombre et, d’autre part, sur des résultats rapides, majeurs et durables.
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