C’est aujourd’hui d’égalité de droit qu’il s’agit, et de surcroît entre tous les salariés, quelle que soit leur classification. Les premiers arrêts de la Haute Cour sur l’égalité de traitement remontent déjà à une dizaine d’années.
La quête jurisprudentielle vers l’égalité a tout d’abord porté sur la rémunération. En vertu du fameux principe jurisprudentiel : « A travail égal, salaire égal », il ne peut y avoir de différence de rémunération entre deux salariés placés dans une situation identique. Cette différence doit être justifiée par des éléments objectifs, pertinents et licites, tels que, par exemple, une pénurie de main-d’œuvre au moment de l’embauche.
Le principe affirmé par la Cour de Cassation est que si l’employeur peut accorder des avantages à certains, en particulier, c’est à la condition que tous les salariés, placés dans une situation identique, puisse bénéficier de l’avantage ainsi accordé et que les règles déterminant l’octroi de cet avantage soient préalablement définies et contrôlables au moment des résultats.
En clair, les avantages différentiels doivent reposer sur un motif pertinent et la seule appartenance à une catégorie professionnelle n’en est pas un.
Dès lors, on constate que c’est tout une pyramide d’accords collectifs qui est remise en cause et menacée de s’écrouler… En effet, on peut d’ores et déjà observer que certains cadres ne sont pas eux-mêmes dans une situation identique ou bien encore, différente de celle des non-cadres. La question qui se pose est donc de savoir ce qui peut justifier la plupart des avantages catégoriels qui leur sont réservés et ceci quel que soit le poste qu’ils occupent.
Comment peut-on justifier une période d’essai, de préavis, de congés payés plus longue, pour les cadres uniquement sans autre référence ? C’est à ces dérapages catégoriels que la Cour de Cassation a décidé de mettre l’accent en laissant « une porte ouverte » à des différenciations justifiées non pas par l’appartenance à la catégorie professionnelle (cadres/non-cadres) mais, plutôt le niveau de rémunération, le métier exercé ou la filière concernée qui entraînent pour les salariés des sujétions particulières, une pénibilité du travail plus prononcée, des avantages en nature* nécessaires eu-égard aux tâches à accomplir (PC portable, smartphones et « autres bijoux fantaisies de travail »..).
*Pour en savoir plus, découvrez l’article de la rédaction : avantages en nature.
Les employeurs ont plusieurs solutions qui se présentent à eux selon que l’avantage catégoriel en cause a été ou non mis en place par voie de négociation avec les partenaires sociaux.
Ainsi, si l’avantage provient d’un usage ou d’une décision unilatérale, l’employeur pourra procéder à sa révocation mais se devra de le faire dans le respect du formalisme imposé par le code du travail. En l’occurrence, la procédure de dénonciation laisse subsister les avantages acquis à défaut de conclusion dans les 15 mois suivants d’un accord de substitution.
On ne saurait que rappeler « l’effet boomerang » qu’une telle démarche peut avoir notamment, en matière de gestion des coûts de la masse salariale de l’entreprise.
Toutefois, on peut légitimement s’interroger sur le fait de savoir si lors d’un litige qui serait porté à sa connaissance, la Cour de Cassation accepterait de voir maintenus de tels avantages catégoriels infondés et pour le coup, devenus illicites au regard du droit et de la jurisprudence.
L’avenir nous le dira sûrement car, il semble que ce ne soit que le début de remous sociaux à venir…
Par ailleurs, si l’avantage a été négocié par voie d’accords ou de conventions collectives, une révision imposera de conclure un accord interprétatif. Mais, c’est ici que les choses se compliquent puisque, cet accord devra nécessairement comporter la signature des syndicats ayant conclu l’accord d’origine tout en sachant que ceux-ci, doivent encore être représentatifs au moment de la révision.
Enfin, si les avantages en question ont été contractualisés, leur modification voire, leur suppression, nécessitera l’accord exprès du salarié. L’employeur se verra confronter à un dilemme si le salarié refuse, devra t-il le licencier (au risque de perdre un collaborateur confirmé) pour refus de modification de son contrat de travail ? Doit-on parler de modification du contrat pour motif économique ? Bref, la délicate question d’un éventuel licenciement, de sa qualification et de son opportunité ou du maintien d’un régime illicite est bel et bien posée…
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