Le groupe BNP Paribas compte plus de 55 000 collaborateurs en France sur 300 métiers. Chaque année, la banque réalise entre 6 000 et 7 000 recrutements, tous types de contrats confondus.
myRHline a rencontré Pierre-Henri Havrin, directeur du recrutement et de la mobilité du groupe en France afin d’en savoir plus sur les ambitions et la stratégie de recrutement mise en place par BNP Paribas.
Quelle est votre vision du marché des candidats en 2024 ?
De manière générale, nous constatons tous que le marché de l’emploi, et donc des candidats, est dans une dynamique très forte. Dans le secteur financier par exemple, nous sommes proches du plein emploi sur certains profils. Cette concurrence exacerbée nous oblige à nous questionner sans cesse sur la façon dont nous devons aborder le sourcing d’une part, et façonner l’expérience proposée aux candidats d’autre part.
BNP Paribas a toujours été très attentif à ces sujets-là, mais il est vrai que depuis quelques années l’environnement — économique et social — change, venant nous challenger en matière d’innovation, d’approches du marché candidats, d’amélioration continue du parcours de recrutement, mais aussi de formation des managers qui sont, comme les RH, en première ligne et doivent s’adapter aux nouvelles attentes.
Dans certains domaines d’expertise, les candidats ont désormais l’embarras du choix. Les employeurs rivalisent pour attirer les talents en valorisant leur promesse employeur et leurs grands projets. Il est néanmoins crucial de reconnaître que même avec des projets attrayants, une entreprise peut passer à côté des meilleurs talents si elle ne parvient pas à optimiser son marketing de recrutement, à améliorer l’efficacité de ses processus et à accélérer, fluidifier, l’expérience de recrutement.
À mon sens, il est essentiel de considérer l’attractivité et la qualité de l’expérience candidat — de bout en bout — comme des atouts complémentaires et indissociables. Cela représente un enjeu majeur, peut-être même le plus important, pour réussir les recrutements cette année.
Comment abordez-vous le sourcing pour recruter chez BNP Paribas ?
Selon les années, nous réalisons en moyenne entre 6000 et 7000 recrutements. En 2024, nous projetons de réaliser environ 3000 recrutements externes en CDI, plus de 2000 alternants, 1500 stagiaires, 200 VIE et environ 150 graduates programmes pour l’ensemble de nos métiers.
En raison de la grande variété des expertises ciblées, un des défis de BNP Paribas en matière de recrutement réside dans la diffusion efficace de toutes les opportunités professionnelles afin d’atteindre les profils recherchés. Pour cela, notre stratégie de sourcing adopte une approche 360°, multicanale, exploitant pleinement tous les leviers disponibles et pertinents.
Alors quels sont-ils ? Comme la plupart des employeurs, nous sommes présents sur les jobboards. Mais pas seulement.
La B-School by BNP Paribas
La notoriété employeur se construit dans la durée. Nous veillons donc à être un employeur présent, connu et reconnu par les étudiants avant même leur entrée dans la vie active, cela de plusieurs façons. Parmi elles, BNP Paribas s’engage depuis de nombreuses années en faveur de l’alternance. Pour aller encore plus loin, nous avons lancé en 2022 notre propre centre de formation d’apprentis, B-School by BNP Paribas dont la promesse est simple : obtenir un diplôme, puis un CDI, en suivant un parcours de formation au sein de l’école de l’entreprise.
Plus globalement, nous avons une véritable présence au sein même du système éducatif puisque BNP Paribas est partenaire de 350 écoles et universités en France. Ce maillage nous permet d’aller à la rencontre de leurs étudiants, notamment lors de forums, de présentations et éventuellement de financement de projets tels que les chaires.
Les collaborateurs ambassadeurs et la marque employeur
Depuis plusieurs années, nous développons aussi notre stratégie d’« employee advocacy ». En effet, à l’heure actuelle, il est fréquent que les candidats aient besoin de s’identifier à un parcours pour pouvoir se projeter auprès d’un employeur. Ainsi, nous avons fait le choix de ne plus nous limiter aux communications institutionnelles et d’animer une communauté d’ambassadeurs issus de l’ensemble de nos domaines d’expertises.
Au-delà d’interagir avec les potentiels candidats sur les réseaux sociaux ou sur notre plateforme Jobpreview, ces ambassadeurs témoignent de leur expérience dans des vidéos, sur des médias affinitaires ou sur des événements dont nous revoyons régulièrement le format. Ceci dans l’objectif de faire rayonner nos opportunités professionnelles et de communiquer sur ce que ça représente vraiment aujourd’hui d’être un collaborateur ou une collaboratrice chez BNP Paribas.
Le renouvellement de nos actions est aussi indispensable pour nous démarquer. Plus récemment, nous avons fait le pari des campagnes d’influence RH pour communiquer sur notre marque employeur. Cela nous permet d’être présents sur des terrains sur lesquels nous n’étions pas forcément ni attendus ni entendus auparavant. Mais qui constituent de vraies vitrines pour nous faire connaître sur le marché des candidats.
Les partenariats en faveur de la diversité
Face à certaines problématiques de sourcing diversifié très spécifiques, nous capitalisons aussi sur des partenariats avec des associations et organismes pour développer nos viviers. Je pense par exemple aux métiers de l’IT/Tech. C’est une branche professionnelle qui compte aujourd’hui encore trop peu de femmes en raison des choix d’orientation académique.
Or, nous sommes attentifs à la diversité des équipes, quel que soit l’environnement. Nous exploitons donc ces viviers pour étoffer nos bases de CV pour qu’à la fin il y ait plus de diversité.
Cela signifie que nous allons faire en sorte de rééquilibrer la proportion hommes/femmes au départ du processus de recrutement. Le but d’augmenter la probabilité de recruter une femme, parce qu’elle a les compétences.
La cooptation et la mobilité interne
La recommandation constitue également un autre levier d’enrichissement de nos viviers de sourcing. En revanche, il n’y a pas de passe-droit. Nos collaborateurs le savent : les candidats suggérés passeront par le même processus de sélection, comme n’importe quelle autre candidature.
Enfin, la mobilité interne est une dimension centrale de notre stratégie de recrutement. Chaque année, nous réalisons près de 10 000 mobilités internes en France. Car nous ne résumons pas le recrutement à l’entrée au sein de l’organisation, mais nous le voyons plutôt comme une proposition faite à un potentiel collaborateur de nous rejoindre, puis de s’épanouir et d’évoluer professionnellement à nos côtés, en termes de métier, de responsabilité, au niveau géographique, etc.
C’est aussi un point que nous valorisons en recrutement puisque nous savons — toutes les études convergent en ce sens — que les perspectives d’évolution professionnelle font partie du top 3 des priorités exprimées par les candidats pour rejoindre un employeur.
De quelle manière avez-vous fait évoluer l’acte de candidature ?
Nous avons construit un parcours en plusieurs étapes. En premier lieu, il y a le premier « contact », c’est-à-dire la communication (post LinkedIn, vidéo, etc.) qui donne envie au candidat d’étudier nos offres ou la consultation d’une offre via un jobboard ou le site Carrière.
Nous avons réalisé une refonte de celui-ci l’an dernier afin que l’expérience soit améliorée et davantage axée sur les attentes du candidat en fonction de son profil, plutôt que sur l’offre de l’entreprise.
Au-delà des aspects techniques, d’accessibilité ou d’attractivité, nous avons ainsi fait évoluer le fond du contenu de sorte qu’en définitive le site permette de filtrer — qui est le candidat, qu’est-ce qu’il recherche — avant de présenter, en fonction des résultats, le champ des possibles au sein de l’entreprise.
De même, nous venons de changer notre ATS, il y a tout juste une semaine. Et ce, notamment pour répondre à l’enjeu de rapidité nécessaire à l’acte de candidature. En clair, il ne faut pas qu’un candidat passe 20 minutes à postuler, aujourd’hui il faut aller vite. Et c’est ce que nous avons fait : optimiser, simplifier, rendre plus efficace le fait de postuler chez BNP Paribas, quitte à revenir sur certains aspects plus tard.
De même, il est désormais possible d’échanger avec le recruteur et d’être tenu informé de l’avancée de sa candidature de façon très simple.
Je pense que c’est ça qui est important aujourd’hui : être rapide, permettre au candidat de savoir où il en est et favoriser les interactions. Avec les outils dont nous disposons, c’est désormais possible et bien plus facile à monitorer pour la fonction recrutement.
Comment garantir l’égalité de traitement des candidats en entretien ?
Pour être exemplaires dans la manière dont nous traitons chaque candidature, nous n’avons qu’un seul leitmotiv : est-ce que la compétence attendue pour le poste est au rendez-vous ?
Après les phases préliminaires évoquées plus tôt, il y a d’abord un entretien avec un recruteur. Puis, s’il est concluant, un entretien avec un opérationnel.
Dans un cas comme dans l’autre, il est essentiel pour nous de ne cibler que la compétence et uniquement la compétence. Ceci afin d’éviter tous les sujets annexes qui pourraient constituer des biais, discriminants par exemple.
Pour cela, nous nous appuyons sur l’entretien structuré qui vise à valider individuellement chaque compétence attendue. Cette approche n’a absolument rien de nouveau, mais elle a fait — et elle continue de faire — ses preuves. Nous ne sommes pas sur un format où l’entretien va être différent d’un recruteur à l’autre, d’un candidat à l’autre. À l’inverse, pour un poste donné, il sert à poser exactement les mêmes questions à l’ensemble des candidats. Et c’est ce canevas de questions qui valide, ou non, les compétences du candidat pour l’emploi.
C’est finalement une technique très standardisée, qui garantit l’impartialité, l’objectivité et le fair-play de nos processus de recrutement.
C’est entre autres grâce à ce dispositif que nous avons été la première banque à obtenir la double labellisation — diversité et égalité professionnelle — de l’AFNOR.
À l’issue des entretiens, il y a les candidats sélectionnés et les non retenus. Qu’avez-vous mis en place pour ces derniers ?
Chaque année, nous recevons environ 350 000 candidatures. Le volume de candidats « potentiellement déçus » est donc beaucoup plus important que celui des candidats validés.
Il n’empêche que derrière chaque candidature, il y a une personne qui attend une réponse. Dès lors, que l’on traite 10 candidatures ou 10 000, il faut porter la même attention à tous les individus qui entrent en contact avec l’entreprise.
Compte tenu du volume entrant, il serait parfaitement utopique de gérer des communications personnalisées en phase de tri des CV. Toutefois, dès qu’il y a un entretien, il faut être en mesure de fournir une explication des raisons pour lesquelles le candidat n’a pas été sélectionné.
Aussi nous laissons au candidat le choix de demander une explication ou non. À notre niveau, nous proposons l’échange et c’est le candidat qui décide d’en bénéficier. Auquel cas, il y aura un appel organisé avec un recruteur.
C’est un dispositif que nous avons souhaité mettre en place il y a quelques années. Car, outre fournir un retour explicatif, il nous permet également de constituer un vivier de candidats. En effet, nous capitalisons sur les validations d’entretien : pour en arriver là, des compétences sont validées. Donc même si la candidature n’abouti pas aujourd’hui, nous sommes peut-être en mesure de réorienter le candidat vers un autre poste.
Quelle que soit l’issue, je pense que le recrutement sur les compétences permet de bien recruter. C’est-à-dire de donner satisfaction à toutes les parties prenantes : managers, recruteurs et candidats. Ce modèle contribue à créer la rencontre entre les attentes et les apports de chacun. Ensuite, c’est aux équipes RH de s’assurer que tout le monde à sa chance de pouvoir être au rendez-vous de cette rencontre. Si l’on fait ça, la mission visant à recruter en 2024 sera réussie.