Comment être heureux au travail ? Que l’on soit pour ou contre la notion de bonheur au travail, force est de constater que le travail occupe une grande partie de notre vie. Nous y passons 70% de notre temps, à l’échelle d’une vie ce sont près de 100 000 heures, soit 10 à 12 aller/retour Paris- Shanghaï à pied. Cela vaut donc le coup de nous intéresser à ce qui nous apporte une satisfaction stable et durable professionnellement car notre quête du bonheur ne se limite pas aux vacances et aux week-end, mais aussi du lundi matin ou vendredi soir.
Dans cette tribune, vous découvrirez que ce ne sont ni l’argent, ni l’ascension professionnelle, ni l’avantage en nature qui contribuent à nous rendre heureux au travail.
Mais alors, il est où le bonheur ? Qu’est-ce qui nous rend, vraiment, heureux ?
Quel est le dénominateur commun entre le bonheur au travail et la souffrance au travail ?
Comment éprouver un état de satisfaction stable et durable dans notre environnement professionnel ?
Les leviers de notre épanouissement professionnel
Qu’est-ce qui nous rend heureux au travail ?
- Un bon salaire
- Une promotion dans nos fonctions
- Une augmentation de salaire
- Des primes
- Des missions passionnantes
- Des avantages sociaux
- Un environnement lumineux, confortable
Si tout cela participe à notre épanouissement professionnel, il y a un élément qui ferait toute la différence : les RELATIONS. Jean-Paul Sartre avait donc tort, « le bonheur c’est les autres ».
Bien entendu, il y a quelque chose de l’ordre de l’évidence dans ce constat : notre humeur, notre motivation au travail, notre créativité sont meilleures quand on est en bonne compagnie.
Avoir des relations positives au travail contribue à notre bien-être mental, augmente notre performance, améliore notre créativité, facilite notre capacité à résoudre des problèmes et autres soft skills grâce au soutien managérial ou collectif.
Qu’est-ce que des relations positives au travail ?
On nous parle trop souvent de pervers narcissiques, de personnes toxiques, ce qui, sans nous en rendre compte, nous pousse à nous méfier les uns des autres. A l’inverse, qu’est-ce que des relations positives au travail ? Quels comportements favorisent de bonnes relations ?
- Avoir des collègues de confiance auprès de qui échanger lors d’un moment difficile
- Pouvoir compter sur ses collègues pour un dossier, une urgence client
- Recevoir de la reconnaissance
- S’accorder du temps pour avoir des échanges de qualité
- Pouvoir exprimer lorsqu’on a besoin d’aide
- Se sentir soutenu par son manager
- Être entouré de collègues positifs, enthousiastes, optimistes
- Attention, relations positives ne signifient pas absence de tensions, de désaccords ou de difficultés. Comme en amitié ou en couple, les relations positives au travail sont aussi synonyme de situations inconfortables :
- Confronter nos points de vue
- Donner et recevoir du feed back
- Résoudre une situation complexe ensemble
- Avoir des discussions passionnantes bien que confrontantes
Les causes de souffrance au travail
Quelles sont les causes de souffrance au travail ?
Il semble évident de dire que plus nous nous sentons bien dans notre entreprise, plus nous sommes motivés, plus nous nous impliquons, donc plus nous sommes productifs. Néanmoins, la réalité peut avoir un tout autre parfum. D’après une étude de 2018 réalisée par la plateforme d’écoute Pros-Consulte, les problèmes relationnels seraient la première cause de souffrance au travail. Alors donc Jean-Paul Sartre avait-il raison « l’enfer c’est les autres » ?
Posez-vous la question, qu’est-ce qui pourrait être une cause de souffrance dans votre travail ?
- Harcèlement moral
- Absence de soutien de votre manager et manque de reconnaissance au travail
- Charge de travail démesurée dont personne ne mesure l’impact
- Sentiment d’isolement, de solitude
- Conflits relationnels entre collègues
- Absence d’encouragements, de solidarité
Il paraît, à nouveau, évident de constater comme le manque de dialogue, de soutien, d’écoute ou de convivialité peuvent se révéler dur à vivre au quotidien. À l’inverse, plus il y a de complicité, d’assertivité, de communication solutionnelle, de reconnaissance, plus nous avons plaisir à nous retrouver, à collaborer ensemble et à nous investir pour le rayonnement de l’entreprise.
Comment réduire la souffrance au travail ?
La souffrance au travail est souvent tue. On n’ose pas dire non, on n’ose pas dire qu’on est surchargé, on n’ose pas exprimer notre contrariété par rapport à un conflit passé, on n’ose pas manifester notre épuisement etc. Dans ces conditions, être heureux au travail est tout simplement impensable puisque relationnellement nous ne manifestons rien. Nous ne verbalisons pas les faits. Ce qui peut d’ailleurs causer d’importants RPS.
On ne peut pas reprocher à une personne ou à notre entreprise des choses qu’on n’a jamais verbalisé.
« En ce moment je suis fatiguée, j’ai juste besoin que vous me compreniez ».
Cela parait simple, pourtant ces quelques mots sont parfois compliqués à dire tant un excès de pudeur nous habite.
A la question, comment réduire la souffrance au travail ? Par la communication avec les autres.
Se montrer vulnérable n’est pas un acte de faiblesse. Se rendre vulnérable c’est se rendre accessible et pourquoi pas montrer à d’autres le chemin. Nous ne sommes pas des machines. Nous ne sommes pas super strong. Nous ne sommes pas fait de pierres mais d’émotions.
Cela signifie que notre bien-être au travail, tout comme la QVCT, dépend de la QUALITE DE NOS RELATIONS et je n’ai pas dit la QUANTITE. Ce qui importe c’est la qualité de nos interactions.
- Avoir un manager avec qui je peux discuter
- Se sentir bienvenue au bureau de la RH en cas de besoin
- Avoir un collègue de confiance à qui se confier librement
- Définir un work buddy où on se partage les tâches sur un projet
Quelle est notre responsabilité dans le bonheur au travail et la souffrance au travail ?
Comportons avec autrui comme nous aimerions qu’il se comporte avec nous. Être attentif à l’autre, l’écouter, lui prêter notre oreille pour le soutenir. Puisque nous savons que ce qui nous rend vraiment heureux, c’est la relation à autrui, agissons à notre niveau :
- Proposer de l’aide pour recevoir de l’aide,
- Ecouter pour être écouté,
- S’intéresser à l’autre pour recevoir de l’intérêt,
- Manifester sa reconnaissance pour recevoir de la reconnaissance
Faisons maintenant au moment où vous lisez cette tribune un court exercice. Puisque la reconnaissance est un sujet qui fait couler beaucoup d’encre, passons à l’action. A qui aujourd’hui avez-vous dit MERCI ?
- Avez-vous déjà remercié votre DRH pour le travail de l’ombre qu’elle fait pour améliorer votre QVT ?
- Avez-vous remercié la standardiste de l’entreprise qui prend vos messages avec sourire et diligence ?
- Avez-vous remercié votre manager pour ce feedback qui vous a aidé à progresser alors qu’au départ vous avez pensé qu’il n’était jamais content ?
- Avez-vous déjà envoyé un mail ou frappé à la porte de votre DG pour le remercier d’avoir pris telle ou telle décision car cela vous a donné du sens et motivé dans votre mission ?
Ce que la science nous confirme pour être heureux au travail
Une étude inédite réalisée durant plus de 75 ans
« Qu’est ce qui rend les gens heureux ? », cette question, des chercheurs d’Harvard se la sont posée en 1938 déjà. Ils lancèrent sans le savoir la plus longue étude sur le bonheur jamais réalisée.
Ce sont 724 hommes venant d’horizons sociaux différents qui ont été suivis. Pendant 75 ans, ils ont été interrogés lors d’entretiens et de questionnaires concernant leur vie, leur situation, leur santé, ils ont été filmé en train de parler avec leur femmes de leur soucis, les dossiers médicaux ont été étudiés, leur cerveau également etc. Des chercheurs et des scientifiques ont traité les informations recueillies et le message essentiel ressorti de cette étude (qui perdure toujours auprès des quelques 2000 enfants de ces hommes) est le suivant :
Les bonnes relations nous rendent plus heureux et en meilleure santé.
Je vous invite à regarder ce TedX intitulé “What keep us healthy and happy” de Robert Waldinger, le 4e directeur de recherche de cette étude longitudinale.
Une théorie scientifique
Dans son livre Qu’est ce qui nous rend vraiment heureux, la professeure et scientifique Sonja Lyubomirsky nous explique que nous sommes victimes d’un inévitable processus d’usure, appelée par les scientifiques habituation hédonique, c’est-à-dire une tendance à revenir rapidement à un point d’équilibre stable en dépit d’événements positifs.
Par exemple, le bonheur d’acheter une nouvelle robe, de devenir propriétaire d’un bien immobilier durera un temps jusqu’à revenir à un point d’équilibre normal dont nous aurons fait un acquis après quelque temps. Ce phénomène est aussi appelé Tapis roulant hédonique par les scientifiques Brickman et Campbell.
De la même manière, professionnellement, les effets positifs d’une augmentation ou d’une prime dureront en moyenne 10 à 14 jours jusqu’à ce que nous revenions à un état de satisfaction normal, nous mettant en quête d’une nouvelle promotion. Ainsi on comprend aisément que l’effet d’une augmentation ne se manifeste pas quotidiennement sur nous alors que la complicité, la solidarité, les relations chaleureuses au travail contribuent grandement à une satisfaction stable et surtout durable.
En conclusion, voici l’un des grands paradoxes humains, notre bien-être au travail comme nos souffrances au travail naissent de nos relations aux autres.
Les neurosciences et la psychologie positive nous confirment que le dialogue, l’ouverture d’esprit, la confiance et la convivialité nous aident à mieux travailler ensemble et à être plus productifs. D’où l’importance de réussir à nouer des liens dans le cadre professionnel, mais pour que ces liens existent, encore faut-il créer des temps de partage et de travail pour apprendre à mieux se connaître.
Sans vouloir spoiler la fin du Ted X, Robert Waldinger nous dit « qu’une belle vie se construit avec de belles relations ». Je vous souhaite de prendre soin de vos relations et d’y contribuer personnellement.