Pourquoi je fais ce que je fais ? Voilà la question qui occupe les travailleurs du monde entier.
Pour l’argent ? Pour être utile à la société ? Pour apprendre ? Dix ans peut-être que ces pourquoi prennent du galon. Que les collaborateurs semblent avoir perdu le sens de ce qu’il font.
En tant qu’entreprise, on peut alors légitimement se demander : comment redonner le goût du travail ? Quelle est notre responsabilité – en tant qu’employeur, RH ou manager – face à cette quête de sens ? Et comment adresser de manière concrète une notion aussi abstraite ?
Le sens au travail, ça veut dire quoi concrètement ?
Si le besoin de sens est universel, ce qui le rend complexe, c’est qu’il est pluriel. Autrement dit, il y a autant de manières de trouver du sens au travail qu’il y a d’individus. Pire encore, le sens au travail est évolutif.
Ce qui compte dans notre vie professionnelle à un instant T n’est pas la même chose qu’hier et ne sera sans doute pas la même chose demain. Une particularité qui nous empêche d’adresser le sujet de manière uniforme.
Personnaliser : la clé pour redonner du sens ?
J’ai fondé somanyWays dans l’optique d’accélérer la transformation culturelle des entreprises en redonnant à chacun le pouvoir d’agir sur son travail . Au fil de mes conversations, j’ai remarqué certains schémas récurrents sur le rapport au travail. Avec mon équipe nous avons développé une grille de lecture simple qui permet d’aborder la question du sens au travail de manière pragmatique.
Basé sur 5 modes, ce modèle permet à chacun d’identifier ce qui fait sens au travail pour lui à un instant T et donne des clés de compréhension aux managers ou RH soucieux de répondre de manière personnalisée aux besoins de leurs collaborateurs.
- Le mode transformation : le travail comme moyen de laisser sa trace dans son entreprise. Ce profil trouve du sens au travail s’il peut proposer et mettre en oeuvre d’autres manières de faire, innover et avoir de l’impact à l’échelle de son équipe ou de son organisation
- Le mode impact : le travail comme moyen d’avoir une utilité sociétale. Il trouve du sens en contribuant aux causes sociales ou environnementales qui lui tiennent à cœur.
- Le mode ascension : le travail comme moyen d’acquérir une position sociale. Il trouve du sens lorsqu’il peut avoir des opportunités d’évolution.
- Le mode introspection : le travail comme moyen de développement personnel. Il trouve du sens au travail dans l’apprentissage, la diversité de ses missions, la possibilité d’exprimer sa singularité.
- Le mode équilibre : le travail comme moyen de vivre sa vie. Il considère que le travail n’est pas au centre de sa vie. Il trouve du sens lorsque ses contraintes et intérêts personnels sont pris en compte.
Le sens, la responsabilité de l’organisation ?
Oui ET non. Car le sens ne se donne pas mais se construit. À plusieurs voix. À plusieurs mains. Il est une responsabilité partagée par tous les niveaux de l’organisation :
- La responsabilité du collaborateur : identifier et exprimer ses besoins. Même le meilleur des managers ne lit pas dans les pensées. Qui pourrait, mieux que le collaborateur lui-même, être en capacité de formaliser son cahier des charges et de mettre le doigt sur ce qui compte le plus au travail ? Ce n’est évidemment pas toujours si simple. Nombreux sont ceux qui peinent à identifier leurs besoins et à les prioriser. Et parmi ceux qui y arrivent, beaucoup n’osent pas les formuler par peur de la façon dont cela pourrait être reçu. Le chiffre qui en dit long : Un collaborateur sur trois préfère démissionner plutôt que d’exprimer ses préoccupations au travail (The Workforce Institute, 2021)
- La responsabilité du manager : créer des espaces de conversation authentiques et réguliers. Cela peut sembler bateau et pourtant, bien souvent, ces espaces n’existent pas. Dans le flux du quotidien, les questions opérationnelles prennent naturellement la place des questions existentielles. N’essayez même pas de faire le test ; vouloir parler sens au travail entre deux portes ou à la fin d’un point hebdo n’est pas une option. Il y aura toujours quelque chose de plus urgent à régler. Une question à arbitrer. Une situation à débloquer.
- La responsabilité des RH ou dirigeants : sensibiliser et outiller les parties prenantes. Pour rendre les conversations possibles, le rôle des décideurs et des RH est d’offrir à chacun (manager ou collaborateur) des outils pratiques pour se saisir du sujet. Cela peut prendre des formes multiples : conférence de sensibilisation, formations, solution de bilan professionnel, approches de job crafting…
Faire Société : le nouveau défi des organisations ?
Adresser la question du sens au travail est un enjeu clé, et difficile. Si chacun voit midi à sa porte sur le sujet, l’entreprise a besoin d’un cadre collectif, de règles du jeu partagées. Dès lors, le futur du travail consistera, peut être, à “standardiser la personnalisation”. Une voie déjà empruntée par quelques pionniers, qui ont compris que proposer différentes manières de travailler au sein d’un seul et même projet d’entreprise, serait une clé d’attractivité et de performance durable.
Par Anaïs Georgelin, CEO et fondatrice de somanyWays
A propos d’Anaïs Georgelin
Après ses études, Anaïs Georgelin infiltre le monde des RH. 3 ans, 3 jobs et quelques désillusions professionnelles plus tard, elle prend conscience qu’une profonde mutation du travail est en cours. En 2017, elle fonde somanyWays pour accompagner les entreprises à travers ces mutations, convaincue que celles qui performeront demain sont celles qui mises sur l’Humain aujourd’hui.
Entrepreneure, experte des nouveaux rapports au travail, formatrice et conférencière, elle intervient régulièrement auprès des dirigeant·es, des managers et dans les médias sur le futur du travail, le management et la transformation des organisations.