La crise du COVID a mis en lumière leur rôle essentiel, au point de devenir les héros de l’entreprise. Sans elles, rien n’aurait été possible, dans un contexte jamais vu, elles ont géré la mise en place du télétravail, organisé le chômage partiel, proposé des cellules d’écoute.
2 ans plus tard, elles sont épuisées, toujours sur le pont, sollicitées sur tous les fronts : recrutement, fidélisation, engagement collaborateur, qualité de vie au travail (QVCT), culture d’entreprise, législation etc. Vous l’aurez compris je vous parle des RH.
MyRHline et Preventica les ont interrogées, comme en 2021 à la sortie du Covid, et ce sont 1018 personnes qui cette année ont répondu à l’enquête intitulée « RH, êtes-vous heureux dans votre job ? » Si l’objet de cette enquête est on ne peut plus clair, les résultats le sont aussi : les RH ont une crise de foi !
On peut même se demander si le quiet quitting n’est pas en train de toucher la fonction RH ?
Pourquoi parler de crise de foi ?
Qu’est-ce que la foi ?
Le mot foi vient du latin fides qui signifie « confiance ». La foi désigne étymologiquement le fait d’avoir confiance en quelque chose ou quelqu’un.
En philosophie, le mot foi permet de qualifier un sujet, auquel l’esprit adhère avec certitude. Ainsi lorsqu’on a confiance, la vie circule en nous, l’énergie est au plus haut, la motivation ascendante.
Comment se manifeste la foi ?
La foi se manifeste par la fidélité, lorsqu’on croit en quelque chose ou quelqu’un, on fait preuve de loyauté, d’intégrité, de fiabilité.
La foi se manifeste par l’engagement, lorsqu’on croit en quelque chose ou quelqu’un, on a envie de contribuer, de s’investir, de participer activement.
En quoi les RH ont-elles perdu la foi ?
Parmi les résultats de l’enquête menée par MyRHline, un chiffre m’a particulièrement interpellé : 65%.
C’est le pourcentage de répondants qui disent avoir peu confiance en leur dirigeant. Un chiffre qui a augmenté de 9 points depuis 2021.
Non pas qu’un dirigeant soit l’équivalent de Dieu mais il est, au sein de l’entreprise, celui qui donne une vision, une direction, un cap, une énergie qui va irriguer l’ensemble de l’organisation et ainsi embarquer les Hommes. Mais lorsqu’on ne croit plus en Dieu, on ne va plus à l’église ! #BigQuit Mais bon, je m’égare. Si la confiance entre la RH et la DG n’y est plus, c’est problématique, car normalement la DRH forme un binôme avec le Pdg. Si ce dernier est l’initiateur du changement, la DRH devrait en être le moteur.
Comment expliquer la crise de la motivation dans la fonction RH ?
ÉTAT de FATIGUE
Le premier chiffre chaud de cette enquête nous dit que 79,5% des répondants ressentent un état de fatigue. Fragilisée et sur-sollicitée depuis le Covid, la fonction RH ne connaît pas de trêve, pas d’accalmie, pas de pause et ce n’est pas seulement une question de contexte économique actuel mais du travail en lui-même. Charge mentale, responsabilités juridiques, absence de droit à l’erreur, risques psycho-sociaux (RPS), législation qui change tout le temps, autant de raisons d’épuiser physiquement et intellectuellement n’importe quel humain.
MANQUE de CLARTÉ
Si les collaborateurs ont besoin d’une vision pour s’engager et se projeter dans l’entreprise, eh bien les RH aussi ! Et ce n’est pas parce qu’on travaille au service des ressources humaines qu’on est plus au courant. En effet, 65% ont une vision peu claire de la direction que prend leur entreprise et pire encore, 60% ne se reconnaissent partiellement ou pas du tout dans le projet de leur entreprise.
SENTIMENT d’INUTILITÉ
Comment peut-on se sentir inutile en étant aux fonctions RH, qui sont le centre névralgique de l’entreprise où l’humain devrait être au centre des préoccupations ? Pensez-vous qu’humainement la RH se sent toujours considérée et au fait des problématiques ou des décisions de l’entreprise. Non, dernièrement la DRH d’une PME me disait :
« Je ne suis pas au courant de décision stratégique au sein de ma propre entreprise, parfois je découvre les choses après les managers eux-mêmes »
Dans un autre registre, la responsable formation au sein d’un département RH m’avouait son désarroi :
« J’ai passé un temps fou à mettre en place un plan de formation et du jour au lendemain il a été balayé pour cause de changement de stratégie. J’ai le sentiment de travailler dans le vent sur des projets qui n’aboutissent pas. »
Voilà comment un collaborateur, RH ou non, peut sombrer dans le brown-out, sentiment d’inutilité, car les sujets sur lesquels il s’implique sont ignorés, inconsidérés et balayés d’un revers de la main.
SYMÉTRIE des maux actuels
A force de parler à longueur de temps de perte de sens, de manque de reconnaissance, de valeur non alignée ou de désengagement, ces MAUX sont devenus ceux de la RH. En effet, la fonction RH n’est pas vaccinée contre la démotivation.
- Reçoivent-elles de la reconnaissance ?
- Partagent-elles les valeurs de l’entreprise ?
- Bénéficient-elles de formation pour monter en compétence ?
- Ont-elles des perspectives d’évolution dans leur entreprise ?
- Sont-elles payées à la juste valeur de leur travail ?
- Reçoivent-elles régulièrement du feed back sur les actions qu’elles mènent ?
- Leurs relations avec les managers, la direction générale, les collaborateurs sont-elles sans nuage ?
Vu sous cet angle, vous en conviendrez, les RH sont des collaborateurs comme les autres.
Les RH sont comme vous et moi, des êtres humains. Elles ont les mêmes attentes qu’un collaborateur qui s’engage dans une entreprise : sens, reconnaissance, montée en compétence et relations constructives.
BESOIN DE COHÉRENCE
Si les collaborateurs sont très sensibles à la cohérence entre le discours externe et la pratique interne telle qu’ils la vivent, les RH aussi.
60% des répondants déclarent qu’il n’y a pas de réelle culture d’entreprise dans leur organisation.
71 % ne se reconnaissent pas dans les valeurs. On peut supposer par là qu’il y a des valeurs mais qu’elles ne sont pas incarnées.
La RH ne peut pas porter seule sur ses épaules la culture d’entreprise dans la mesure où la culture représente l’ensemble des comportements et des pratiques partagés par un groupe d’individus.
Les 6 motifs dont souffrent les RH « en off »
Régulièrement je discute avec des RH, elles sont en effet mes interlocuteurs sur la formation. Certains l’avouent en off, c’est bien l’humain qui devient de plus en plus difficile à accompagner.
- Le tout collaborateur
« On se démène pour embellir la qualité de vie au travail, améliorer les conditions de travail, rendre l’environnement agréable, écouter les managers, offrir des plans de montée en compétence, organiser le télétravail. Mais en retour il y peu de reconnaissance, comme si tout devenait un dû. »
Nous ne savons plus apprécier. Les collaborateurs et les managers n’ont pas toujours conscience du travail des RH : ces métiers de l’ombre qui doivent sans cesse mettre à jour leur connaissance, être l’intermédiaire entre direction et équipe, structurer les plans de formation, intégrer les nouveaux, soigner les départs.
- L’individualisation des modes de travail
« Le télétravail a tué la culture d’entreprise, la cohésion d’équipe, le sentiment d’appartenance. Les candidats sont parfois plus intéressés par les conditions de télétravail que par le poste en lui-même. »
On est passé de la généralisation à l’individualisation, c’est-à-dire un processus d’autonomisation par lequel l’individu devient maître de ses choix, quitte à devenir un samouraï qui sabre l’entreprise lorsqu’il y a une faille dans le rouage. Parallèlement, d’autres candidats/ collaborateurs vont être en recherche d’une entreprise au sein de laquelle les relations, le présentiel seront capital. L’entreprise doit à la fois se positionner sur le sujet, tout en faisant preuve de souplesse. Le télétravail serait donc un faux bien-être.
- La solitude, l’isolement
« Quand on cherche une information, quand on est face à une situation nouvelle, on se retrouve parfois seule sans personne avec qui échanger sur le sujet. »
Lorsqu’on parle de Direction des Ressources Humaines, il n’est pas toujours question de grand département, on n’oublie de parler des DRH dans les PME qui assurent sur tous les front : recrutement, onboarding, formation, gestion administrative des paies, des congés, requête des managers, pénurie de talents.
- Qualité des relations
Pour ceux qui travaillent au sein d’une équipe RH, l’étude MyRHline démontre que les relations internes ont perdu 5 points depuis 2021. En effet, 58% déclarent pouvoir compter sur le soutien de leur collègue en cas de besoin contre 63% en 2021. De même 54% déclarent que le travail en équipe est une pratique courante contre 59% en 2021. Une tendance pour des relations internes qui se dégradent. Alors même que la Direction des Ressources Humaines serait garante des relations dans l’entreprise mais les relations sont-elles bonnes dans son département ?
- L’absence d’accompagnement
« On demande au RH d’accompagner le changement mais nous qui nous accompagnent ? »
Dans ce sens, 71% révèlent ne pas avoir la possibilité d’accéder aux formations dont ils ont besoin. Soit +18 points par rapport à 2021 !
73,5% n’ont pas ou peu de vision sur leur plan de carrière au sein de l’entreprise.
- L’anxiété
Les fonctions RH tendent à devenir un métier anxiogène. Le droit à l’erreur est mal perçu des RH qui considèrent ne pas y être autorisés. D’après l’étude MyRHline, 1 professionnel RH sur 2 est stressé par son travail et pense qu’il n’a pas le droit à l’erreur.
En conclusion, un salarié, RH ou pas, qui perd la foi dans son travail ou dans son dirigeant, est atteint dans son bien être au travail psychologique. Le risque est qu’il s’enlise, qu’il stagne, qu’il s’ennuie et plonge dans les abysses profondes du burn-out à moins qu’il ne décide de quitter son entreprise pour retrouver la flamme ailleurs puisqu’en effet dernier chiffre à notre enquête MyRHline en collaboration avec Preventica, 50% des professionnels des RH interrogés sont en recherche active pour quitter leur entreprise.