Au regard des nouveaux enjeux imposés par la pyramide des âges, les entreprises devront à terme revoir leur organisation du travail et leur mode de gestion des ressources humaine, des emplois et parcours professionnels (GEPP). C’est ce que les experts ont pompeusement baptisé : la gestion active des âges et des compétences. Avec un taux d’emploi des juniors affleurant les 30 % et à peine 40 % pour les seniors, la France semble faire partie de mauvaise élève comparée à ses voisins européens. Tour d’horizon des enjeux liés à l’employabilité.
La France est le pays de l’OCDE où les études sont les plus longues, où les jeunes sans qualification sont radicalement écartés de l’emploi et où les seniors n’arrivent pas à y rester. Triste constat qui amène aujourd’hui la plupart des experts à lier la problématique de l’employabilité des juniors à celle des seniors. En France, les chiffres semblent néanmoins, parachever cette hypothèse puisque le taux d’emploi des juniors et des seniors est inférieur au taux d’emploi moyen.
Dans le détails, seuls 9 % des jeunes conjuguent études et emploi et à peine 16 % des 60-64 ans travaillent en France quand ce taux est en moyenne de 42 % dans les pays de l’OCDE. Au Royaume-Uni par exemple, le taux d’emploi des jeunes de moins de 25 ans est de 52 % et il atteint 58 % pour les 55-64 ans (Insee et National Statistics 2010). A noter qu’au cours des 15 dernières années, le taux d’emploi des seniors au Royaume-Uni a augmenté de 7,5 %. En matière d’emploi des seniors, la Finlande est cité en exemple. De 35 % de seniors dans l’emploi en 1994, le pays est passé en 2010 à 55 %. Et pour cause, deux tiers des entreprises ont mis en place des plans de maintien des seniors dans l’emploi portant à la fois sur le management, la formation, l’aménagement des conditions de travail, l’organisation du travail et l’entretien de la santé au travail.
Pourquoi la France peinent-elles autant à relever le défi de l’employabilité ? Comme le suppose Alain Finot dans son ouvrage baptisé « L’employabilité des juniors et des seniors », le modèle français ferait reposer la valeur travail sur les 30-50 ans essentiellement.
Relever le défi de l’employabilité
Quelles sont les raisons de cet échec relatif de l’insertion des juniors/seniors et surtout à qui la faute ? Coté junior, « le taux d’emploi des jeunes est lié à la formation. Ceux qui n’ont pas eu accès à la formation diplômante ont des difficultés à s’insérer sur le marché du travail », explique Alain Finot avant d’ajouter que « au Royaume-Uni, l’accès à l’emploi est plus rapide, en dépit d’une durée moyenne des études souvent plus faibles. Le taux de chômage des jeunes diplômés en France est de 7 % quand il n’est que de 3 % au Royaume-Uni ». Mais aussi nombreuses les raisons soient-elles, il existe clairement en France un cloisonnement des pratiques RH selon l’âge. Preuve en est que la grande majorité des progiciels ne mesurent pas le degré d’employabilité d’une personne. Ils s’arrêtent dans la plupart des cas à la mesure de la compétence. Pour Alain Finot, « une bonne gestion des âges passe par des outils RH dotés d’un tronc commun appliqué à toutes les populations, quel que soit leur âge et dans un réel esprit de diversité.
Par ailleurs, certains outils doivent être dédiés à certains groupes de population comme pour le contrats d’apprentissage réservés aux juniors ou les entretiens de seconde partie de carrière, pré carré des seniors ».
Alain Finot constate également dans son ouvrage que dans l’esprit des managers et des DRH, persiste un amalgame entre compétences et employabilité. Selon ce dernier, « si la compétence est un ingrédient indispensable au développement de l’employabilité des personnes, ce dernier ne se résume pas à l’unique gestion des compétences ». Mais attention, si l’entreprise doit aller plus loin que la simple gestion des compétences qui prend sa source principale dans la politique GPEC (désormais GEPP depuis les ordonnances Macron) des organisations, il est aussi essentiel que les collaborateurs ne restent pas cantonner au périmètre de l’entreprise comme le confirme Alain Finot, « Entrainer une équipe sportive, être trésorier d’une association, construire sa maison ou encore être passionné d’informatique, sont autant de cordes qui peuvent servir au développement de la propre employabilité de chaque individu ». Car pour Alain Finot l’avenir de l’employabilité passe par une organisation du travail plus ouverte et davantage apprenante. Cela suppose pour l’entreprise une responsabilité de pilotage des actions et pour le salarié un apprentissage indispensable de l’autonomie professionnelle.
Emilie Vidaud