Depuis la démocratisation de l’IA, le sujet des données RH est omniprésent dans l’environnement des ressources humaines. Pourtant, dans la pratique, celles-ci sont encore peu exploitées, et restent, bien souvent, à l’état brut dans un recoin du SIRH.
Un paradoxe mis en lumière lors de la conférence « Data RH : l’atout clé pour des décisions stratégiques gagnantes », organisée par Factorial lors du salon SRH 2025. L’objectif de cette dernière ? Non pas de glorifier l’usage (à outrance) de la technologie, mais plutôt de replacer la fonction RH au cœur d’une gouvernance par la preuve chiffrée.
Et ce, en nous démontrant par A + B que, bien exploitées, les données RH ne remplacent pas le discernement humain. Mais qu’à l’inverse, elles servent à l’éclairer, l’étayer, l’aiguiser.
Naviguer à vue, une habitude à perdre pour la fonction RH
Nous le savons, l’environnement des ressources humaines est parfois, si ce n’est tempétueux, mouvant. Dans ce contexte, la fonction RH n’a plus le luxe de s’en remettre uniquement aux habitudes, aux intuitions, aux fausses croyances. Aujourd’hui, elle a besoin d’une boussole, une vraie : la data.
Lors de la conférence, Sophie Perros (RH Venture) a d’ailleurs partagé un retour d’expérience très concret :
À un moment, nous avons mis en place un projet visant à améliorer la rétention des talents. Pour cela, nous sommes partis du principe qu’il fallait améliorer le pack des avantages sociaux. Une décision qui peut paraître logique, mais qui, en réalité, était en décalage avec les besoins du terrain. En effet, les données d’engagement et les feedbacks faisaient surtout état d’une attente en matière de flexibilité dans l’organisation du travail.
Grâce à une analyse plus fine des données RH, l’entreprise a donc pu corriger sa trajectoire. Temps de travail adapté, télétravail élargi, l’erreur de pilotage a ainsi pu être évitée, avec des résultats concrets et tangibles sur la rétention.
Preuve s’il en fallait une que les directions RH ont besoin de courants porteurs, de points de repère. Autrement dit : de données solides, lisibles, activables pour aller au-delà de rapports obligatoires.
De la donnée brute à la décision utile : une voie stratégique
Évidemment, il ne suffit pas de récolter des datas RH pour espérer aller dans la bonne direction. C’est d’ailleurs l’un des messages clés portés par Léopold Adam (Reflect) :
Avant même de parler indicateurs, il faut une ligne de mire claire. Que cherche-t-on à comprendre, à anticiper, à ajuster ? Turnover, absentéisme, équité, orientation budgétaire… La donnée n’a de valeur que si elle éclaire un point de chute réel.
Et une fois ce cap défini, encore faut-il cartographier le terrain : où sont les données ? Dans quel état ? Que faut-il fiabiliser, structurer, rendre exploitable ? Trop souvent, les entreprises grillent les étapes. Résultat : elles échouent à sortir du port, empêtrées dans des dispositifs complexes, parfois illisibles.
Ce que rappelle la conférence : pas besoin d’un paquebot qui n’arrivera jamais à destination. Une petite embarcation avec des instruments de bord fiables, interprétables, utiles est suffisante.
Embarquer tout l’équipage pour tenir la barre de la data RH
En pratique, les RH ne peuvent pas piloter seuls un navire sur lequel ils ne maîtrisent pas tous les courants. Prenons l’exemple de l’absentéisme. Qui en porte la responsabilité ? Il en est de même pour le climat managérial, l’organisation du travail, les conditions de terrain… Bref, autant de facteurs souvent hors du périmètre des ressources humaines.
D’où la nécessité de partager la lecture des données. Comme le rappelaient les intervenants, les managers doivent être embarqués dans cette dynamique : acculturés aux indicateurs, formés à les interpréter, responsabilisés dans leurs usages.
En ce sens, certaines entreprises créent des relais locaux, des « experts people » capables d’expliquer, de traduire, de guider. D’autres organisations s’appuient sur des tableaux de bord simplifiés pour donner aux managers un accès direct aux bonnes balises.
L’enjeu ? Faire en sorte que la donnée ne reste pas à quai, et qu’elle irrigue plutôt les pratiques managériales au quotidien. Pour, in fine, créer une culture partagée du pilotage RH, où la data devient un langage commun.
- Sur une thématique similaire : Des petits pas pour les projets digitaux, un grand pas pour l’efficience RH ?
L’IA : moussaillon, mais pas capitaine de remplacement
Sur le chemin de l’efficience RH, l’intelligence artificielle suscite encore des interrogations. Parfois des méfiances. Et souvent, des malentendus. Ceci alors que nous le savons : l’IA ne remplacera pas les ressources humaines.
En revanche, c’est aussi un fait : bien utilisée, elle peut les seconder. Car l’IA alerte, détecte, fiabilise, comme le ferait un bon coéquipier en poste à la vigie :
- Côté paie, elle identifie les erreurs invisibles ;
- Côté gestion des talents, elle met en lumière des signaux faibles ou des incohérences de parcours.
Cependant, elle ne décide jamais. Et pour cause : l’analyse des situations humaines exige une lecture contextuelle, une prise de recul, une compréhension sensible que seule l’intelligence humaine détient.
Chez RH Venture, par exemple, l’IA est mobilisée pour affiner les recherches de profils ou élargir le sourcing. En revanche, elle ne sert pas à automatiser la sélection. En d’autres termes, la machine outille, mais ne tranche pas.
Mais pour cela, les données doivent être solides. Dans le cas contraire, l’IA risque d’amplifier des biais, de reproduire des schémas erronés, voire d’orienter à contre-courant.
Données RH : comment ancrer sa démarche ?
Pas besoin d’ambitions prédictives pour amorcer une démarche data RH efficace. Avant tout, il convient prendre le temps de bien préparer l’itinéraire. Cela implique de poser le cadre, d’enquêter, de formuler des hypothèses — à valider ou non —, et pas seulement de collecter des données en espérant qu’elles parleront d’elles-mêmes.
À partir de là, il devient possible de :
- construire un socle d’indicateurs ;
- d’identifier les tendances internes ;
- structurer un plan de navigation cohérent.
Et surtout : de suivre les effets dans le temps. Un tel cap ne peut se fixer seul. La démarche est, par essence, transversale : RH, finance, managers, DSI… tous doivent embarquer dans l’analyse, la construction, la lecture.
Les entreprises ne manquent pas de données. Toutefois, pour l’heure, elles n’ont pas encore toutes les réflexes pour tracer une feuille de route (vraiment) efficiente. Dès lors, la question n’est plus de savoir s’il faut utiliser la data RH, mais comment la rendre intelligible, accessible, actionnable.
La conférence de Factorial l’a d’ailleurs bien montré : il n’y a pas de maturité prérequise, mais une posture à adopter. La data ne sera jamais une fin en soi puisqu’elle n’est que la roue du gouvernail RH.
À propos de Factorial : Fondée en 2016, Factorial propose un logiciel RH tout-en-un, conçu pour simplifier et automatiser la gestion des ressources humaines dans les PME et ETI.
À propos de Reflect : Reflect est une solution de data visualisation qui centralise les données RH, facilite la prise de décision et accélère la conformité.
À propos de Rh’Venture : RH’Venture est un cabinet de conseil RH qui accompagne les entreprises dans l’optimisation de leur gestion humaine. Du recrutement à la digitalisation RH, leur approche vise à rendre la fonction RH plus accessible, outillée et stratégique.