Dans cet article, découvrez les demandes les plus incongrues des candidats.
Mais peut-être pas si incongrues que cela, car on le sait désormais : le rapport de force candidat/recruteur s’est inversé – on dit souvent que c’est le candidat qui mène la barque face aux difficultés de recrutement auxquelles sont soumises les entreprises et les employeurs.
Ce qui pourrait bien amener les candidats à formuler davantage de demandes plus “poussées” – voire parfois surréalistes pour certains. Explications.
Les demandes des candidats sont liées à leurs (nouvelles) exigences
Au 3ème trimestre 2022, la Dares faisait état de 372 100 emplois vacants. Tandis que les offres d’emploi se multiplient, les entreprises peinent à recruter. Plus d’un dirigeant sur deux considère d’ailleurs que ces difficultés mettent à mal la santé de leur organisation, de son activité. Et si tout cela était symptomatique d’un autre phénomène : celui que les attentes des candidats ont évolué ?
L’étude que nous avons dernièrement menée avec Assessfirst sur la pénurie des talents a révélé que :
- 85 % des entreprises peinent à trouver des développeurs ;
- 52 % des entreprises peinent à trouver des recruteurs ;
- 40 % des entreprises peinent à trouver des professionnels du marketing ;
- 70 % des entreprises peinent à trouver des managers.
Des difficultés qui se jouent donc à tous les niveaux.
Par ailleurs, les demandes des candidats ont changé – notamment en matière de salaire. La santé financière est importante pour eux.
Les demandes (pas si) incongrues des candidats
Les demandes relatives au salaire
Jérémy est RH dans une société du retail. Il est à la recherche d’un Directeur commercial, poste véritablement stratégique au sein de l’entreprise. Il tente une approche directe auprès d’un candidat, Jean-Charles. Celui-ci réclame un package de 300K annuels : 50 % de rémunération fixe, 50 % de rémunération variable. Mais ce n’est pas tout, il y avait d’autres demandes de la part de ce candidat (stocks-options et véhicule de fonction mis à disposition).
Face à ces demandes, le professionnel des ressources humaines est sidéré. Car Jérémy n’avait jamais vu cela. Jusqu’ici, son référentiel était de l’ordre de 120K, avec une répartition de rémunération fixe à 40 % et une rémunération variable à 60 %. Pour lui, le salaire était déjà attractif.
La DRH reprend la main et tranche sur le dossier.
Résultat ? Après plus de 30 jours de négociations difficiles, le candidat a bel et bien rejoint l’entreprise selon ses conditions à lui – avec un système d’augmentation dit automatique. Pour couronner le tout, l’entreprise a également financé son MBA.
Les demandes relatives à la RSE et aux valeurs des candidats
Simon arrive à terme de son processus de recrutement pour un poste de Responsable Marketing orienté mobilité durable. Pourtant, ce n’est pas vraiment la spécialité de l’entreprise. Selon la recruteuse, Simon a beaucoup insisté pour solliciter un véhicule électrique ou hybride – surtout pas une voiture diesel. Cela n’était pas négociable pour ce candidat.
Face au phénomène de conscious quitting, cet exemple est intéressant : pour rejoindre un poste comme pour s’en aller, l’adéquation avec les valeurs d’abord.
Les demandes liées à la QVCT
Pour ces candidats, la QVCT est au cœur des demandes. Le bien-être des salariés d’abord.
Marlène se présente pour un poste de Consultante sénior média pour une organisation qui travaille dans la publicité. Les entretiens suivent tranquillement leur cours jusqu’à ce que la potentielle future recrue demande à venir travailler avec son chien au bureau, expliquant que dans son ancienne boîte, c’était possible.
Ces demandes sont nombreuses et concernent également les modes de travail. Certains salariés peuvent même demander à télétravailler à l’étranger, comme on le verra avec la requête de Robin qui souhaitait télétravailler en Polynésie pour un poste basé en région parisienne.
Les recruteurs sont-ils en phase d’accepter “presque tout” ?
Toutes ces demandes ne sont pas des cas isolés et sont tout à fait cohérentes avec les attentes des candidats ayant évolué. Comme nous l’avons vu, les candidats sont de plus en plus exigents, qu’il s’agisse d’exigences en matière de bien-être au travail, de droit à la déconnexion et de work-life balance, de télétravail, de prétentions salariales… Et si la pénurie de talents n’était pas tout à fait étrangère à ce phénomène ?
Quoi qu’il en soit, les candidats d’aujourd’hui ont le choix et entendent bien le faire savoir.
Revenons à Jean-Charles dont les conditions ont été acceptées par la Direction des Ressources Humaines pour rejoindre l’équipe : qu’en pense Jérémy, professionnel des ressources humaines ayant participé à son processus de recrutement ? Pour WTTJ, Jérémy explique : “Je dois avouer que nous sommes en ce moment dans une période de sidération face aux demandes des candidats, et qu’en réalité, on n’est pas loin d’accepter presque tout. Pour être 100 % transparent, si j’étais candidat aujourd’hui, je me ferais plaisir”.
Pour autant, les recruteurs sont-ils en phase d’accepter “presque tout” ? Rien n’est moins sûr.
La demande de Marlène qui souhaitait emmener son chien au bureau n’a pas été acceptée car il fallait préalablement déployer une politique de sensibilisation vis-à-vis des autres employés de l’équipe. Il y avait aussi des problèmes de santé publique, de responsabilité civile et d’aménagement des locaux.
Qu’en est-il de Robin, qui souhaitait télétravailler depuis la Polynésie ? Si le recruteur recevait de plus en plus de demandes liées au full remote, ce n’était jamais pour des destinations si lointaines. Le candidat interviewé aurait joué sur le fait que d’un point de vue légal, la Polynésie est en France. Mais factuellement, c’était trop compliqué. D’autant plus que la culture de l’entreprise était « encore frêle ».
En ce sens, citons Jean-Pierre Bouyer, Directeur des Ressources Humaines pour le Groupe NOVARC :
« Au niveau RH nous avons la responsabilité de mitiger ces requêtes individuelles et le collectif. Car un candidat doit aussi comprendre qu’il rejoint une équipe. »
Si les professionnels des ressources humaines doivent composer avec les nouvelles attentes des candidats, ils ne sauraient tout accepter.