Le temps des formations longues et ponctuelles semble révolu. Entre l’apprentissage intégré au quotidien, le microlearning et l’intelligence artificielle, les entreprises doivent repenser leurs stratégies. Objectif : ancrer durablement les compétences, sans alourdir l’organisation du travail.
Une évolution rapide, portée par la technologie… et les usages
Du présentiel aux premiers modules en ligne
Pendant des décennies, la formation professionnelle se résumait à des sessions en salle, souvent longues, planifiées plusieurs semaines à l’avance. Le formateur enchaînait les diapositives, le rétroprojecteur chauffait, et les stagiaires notaient ce qu’ils pouvaient en espérant réutiliser ces connaissances un jour.
Avec l’arrivée de l’informatique, un premier tournant s’opère. L’apprentissage se digitalise progressivement, les supports deviennent interactifs et les collaborateurs peuvent s’exercer depuis leur poste de travail. C’est l’essor du e-learning, bientôt complété par le blended learning, qui combine distanciel et présentiel.
Des contenus accessibles partout, tout le temps
À l’image de Netflix ou Spotify, les plateformes de formation évoluent vers des formats plus intuitifs et plus variés : vidéos, quiz, podcasts, articles… La formation devient « à la carte », accessible sur mobile ou PC, à tout moment. On parle alors d’expérience apprenant, avec une logique de parcours fluide, gamifié et mesurable.
Mais si l’outil évolue, le modèle reste souvent le même : des modules planifiés, ponctuels, à compléter dans un temps imparti. Or, dans un environnement professionnel qui change à toute vitesse, cette approche atteint ses limites.
Pourquoi le modèle de formation one-shot ne suffit plus ?
Des connaissances vite oubliées
Selon la courbe de l’oubli d’Ebbinghaus, un salarié retient moins de 30 % d’un contenu appris s’il ne le réactive pas rapidement. La formation unique, aussi bien conçue soit-elle, est donc peu efficace sans application directe.
Un format déconnecté du réel
Souvent trop généraliste, la formation ponctuelle peine à coller aux besoins opérationnels immédiats. Les salariés doivent faire le lien eux-mêmes entre ce qu’ils ont appris et leur quotidien… un effort que beaucoup n’ont ni le temps, ni les ressources de fournir.
Des attentes qui changent
Les collaborateurs d’aujourd’hui attendent des formats souples, courts, adaptables. Ils veulent apprendre « quand c’est utile », dans un contexte concret, et à leur rythme. D’où l’émergence d’un nouveau modèle : le « learning in the flow of work ».
L’apprentissage dans le flux de travail : un nouveau paradigme
Apprendre sans sortir de sa mission
Conceptualisé par Josh Bersin, le workflow learning consiste à intégrer l’apprentissage au sein même de l’activité professionnelle. Loin d’être éphémère, cette méthode s’aligne sur la réalité : les salariés disposent en moyenne de 35 minutes par semaine pour se former. Résultat : au lieu d’interrompre leur journée pour suivre un module de 2h, les collaborateurs accèdent à des contenus courts, contextualisés, transposables à leur mission.
Une approche centrée sur l’efficacité
Cette approche demande une connaissance fine des enjeux terrain : quels gestes métier doivent être améliorés ? Quelles compétences sont manquantes ? Quels formats fonctionnent le mieux ? Grâce à ces données, les équipes formation peuvent proposer des contenus ciblés et actionnables, pile au bon moment.
L’IA, accélérateur d’un apprentissage personnalisé
L’adaptive learning devient réalité
Grâce à l’intelligence artificielle, il est désormais possible d’adapter les parcours de formation à chaque collaborateur. Le système identifie le niveau, les préférences d’apprentissage, les lacunes et les objectifs pour proposer un contenu sur-mesure. En pratique, cela permet de :
- mieux engager les apprenants ;
- détecter des besoins de montée en compétences avant qu’ils ne deviennent bloquants ;
- optimiser l’investissement formation.
Des KPIs plus opérationnels
Côté RH, l’IA permet de passer d’un suivi déclaratif à une évaluation continue : temps consacré, modules complétés, progression réelle… Autant de données précieuses pour affiner l’offre de formation et prouver son impact concret.
Quelles formes prend l’apprentissage intégré ?
Le microlearning
Courts, ciblés, accessibles partout, les modules de microlearning (de 1 à 20 minutes) permettent de répondre à une problématique précise sans mobiliser l’apprenant trop longtemps. Un format très prisé pour les soft skills ou les usages numériques.
Le social learning
L’apprentissage entre pairs gagne du terrain : tutorat, mentorat, communautés d’échanges ou encore retours d’expérience terrain permettent de capitaliser sur le savoir interne de l’entreprise.
Le coaching numérique
Des solutions permettent désormais aux collaborateurs d’être guidés en temps réel dans leurs tâches, grâce à des assistants virtuels, tutoriels embarqués ou checklists interactives.
Apprentissage en continu : les clés pour le mettre en œuvre
Pour fonctionner, ce modèle doit respecter quelques fondamentaux :
- Accessibilité : le contenu doit être simple à trouver (moteur de recherche intégré, tags, etc.) ;
- Pertinence : les ressources doivent être concrètes, actualisées, applicables immédiatement ;
- Personnalisation : l’expérience doit s’adapter au profil de chaque collaborateur ;
- Organisation : le contenu doit être structuré par thématique ou par objectif pour donner envie de poursuivre.
Une opportunité pour repositionner la formation
Aujourd’hui, la formation n’est plus un acte isolé mais un fil rouge dans le parcours professionnel. Ce changement de posture – du « one-shot » vers un accompagnement continu – redonne tout son sens à la fonction L&D, qui devient partenaire de la performance.
C’est aussi une réponse aux enjeux RH contemporains : fidélisation, employabilité, engagement… Autant de défis auxquels la formation peut répondre …à condition de changer de modèle.