Indemnité transactionnelle ? Elle fait suite à une transaction conclue entre l’employeur et un salarié. Elle permet de mettre fin à un litige ou de le prévenir, et évite ainsi un contentieux long et coûteux. Mais les modalités de l’incontournable indemnité transactionnelle sont complexes notamment s’agissant de son régime social. Elle bénéficie en effet d’exonération de charges sociales mais qui dépendent de plusieurs facteurs : son montant, son contexte (rupture ou exécution du contrat de travail), son caractère indemnitaire ou rémunératoire…À cela s’ajoute la nécessité de respecter les conditions de validité de la transaction elle-même.
Pour y voir plus clair, voici un point complet sur la fameuse indemnité transactionnelle.
Transaction et indemnité transactionnelle : de quoi s’agit-il ?
Définition de la transaction
En droit du travail, la transaction est un contrat conclu entre l’employeur et un salarié qui permet de mettre fin à un litige entre les parties ou de prévenir tout litige ultérieur. À ce titre, elle peut prévoir le versement d’une indemnité transactionnelle.
Elle est particulièrement utilisée pour régler les contestations consécutives à une rupture de contrat : licenciement, rupture conventionnelle / licenciement à l’amiable, démission…
Mais une transaction en cours d’exécution de contrat est également tout à fait possible : litiges relatifs à des éléments de salaires (paiement de primes, d’heures supplémentaires…), à un harcèlement ou tout autre préjudice subi par le collaborateur.
Point de vigilance. Elle n’est pas une modalité de rupture du contrat de travail. Elle a uniquement pour objet de régler les conséquences de cette rupture, par exemple après un licenciement.
Conditions de validité
Consentement des parties
La transaction étant un contrat, il est nécessaire de respecter ses conditions générales de validité, telles qu’elles sont prévues par le code civil :
- Consentement libre et éclairé du salarié. L’employeur doit l’informer des conséquences de la transaction, lui laisser un temps suffisant de réflexion.
- Absence de vice du consentement (erreur, dol ou violence). Pour autant, un vice n’entraîne pas automatiquement la nullité de la transaction. Par exemple, en cas de mensonges d’une des parties pour obtenir des concessions plus avantageuses, le juge recherchera si, sans les mensonges invoqués, l’autre partie aurait refusé de signer la transaction (cass. soc. 12-2-1997 n° 93-44.042).
Date de conclusion de la transaction
La transaction permet de régler un litige relatif à une rupture du contrat de travail peut prévoir le versement d’une indemnité transactionnelle : elle ne peut être conclue qu’une fois cette rupture définitive.
Dans le cadre d’un licenciement, les deux parties doivent donc attendre la réception de la lettre de licenciement par le salarié avant de pouvoir conclure une transaction, afin que ce dernier puisse prendre connaissance des motifs du licenciement. Par conséquent, toute transaction signée avant la présentation de la lettre de licenciement est nulle (cass. soc. 14-6-2006 n° 04-43.123).
En cas de démission, la transaction doit être postérieure à la remise de la lettre de démission, que celle-ci résulte d’une remise en main propre ou d’une lettre recommandée. Aucun texte n’exige en effet que la démission soit notifiée par LRAR (cass. soc. 1-12-2004 n° 02-46.341).
Quelques précisions utiles :
- Salarié protégé. La transaction ne peut intervenir que si la procédure de licenciement est régulière, donc après obtention de l’autorisation administrative.
- Rupture conventionnelle. La transaction doit être postérieure à l’homologation de la rupture par l’administration du travail. Elle ne peut porter que sur un différend relatif à l’exécution du contrat (paiement d’heures supplémentaires…) et sur des éléments non compris dans la convention de rupture.
- Contrat de sécurisation professionnelle dans le cadre d’un licenciement économique. Le fait que la rupture du contrat soit différée par la signature d’un CSP est sans incidence. Les parties peuvent conclure une transaction dès la réception de la lettre de licenciement (cass. soc. 31-5-2011 n° 10-14.313).
Concessions réciproques
Pour qu’une transaction soit valable, chaque partie doit faire des concessions réciproques et réelles afin de mettre un terme au désaccord.
Le cas échéant, il appartiendra au juge d’apprécier la réalité de ces concessions.
Par exemple, ne sont pas des concessions :
- Le versement d’une indemnité forfaitaire transactionnelle d’un montant dérisoire, soit dans cette affaire la somme de 5 000 francs (cass. soc. 28-11-2000 n° 98-43.635)
- Le versement d’indemnités de rupture à un salarié licencié pour faute grave alors que les faits invoqués ne pouvaient pas recevoir une telle qualification (cass. soc. 27-2-1997 n° 94-41.463)
Une transaction peut également restreindre la liberté d’expression des parties pendant une durée déterminée, pour assurer par exemple la protection de leur réputation. Cette restriction doit toutefois être justifiée et proportionnée au but recherché (cass. soc. 14-1-2014 n° 12-27.284).
Comment procéder ?
En théorie, la conclusion d’une transaction est simple : il s’agit d’un contrat rédigé par écrit, librement négocié entre l’entreprise et le salarié et signé en deux exemplaires.
Mais les enjeux financiers sont souvent importants et les conséquences parfois complexes à appréhender (par exemple pour déterminer si les sommes versées sont assujetties à cotisations sociales ou non).
L’assistance d’un avocat est donc souvent recommandée.
Si cette indemnité transactionnelle prévoit le versement d’éléments de salaire, l’inscription de ces sommes sur un bulletin de paie est obligatoire.
Indemnité transactionnelle versée à l’occasion d’une rupture de contrat
Indemnité transactionnelle : exonération de cotisations sociales sous certaines conditions
Indemnité transactionnelle : les principes généraux
Une indemnité transactionnelle obéit au même régime social que l’indemnité qu’elle vient compléter (l’indemnité de licenciement la plupart du temps).
Elle est donc exclue de l’assiette des cotisations de sécurité sociale :
- Pour sa part non imposable (voir paragraphe sur le régime fiscal)
- Dans la limite de deux fois le PASS, soit 82 272 € en 2022
En cas de dépassement, seule la partie excédentaire est soumise à cotisations.
Si l’indemnité transactionnelle dépasse 10 fois le PASS, elle est intégralement soumise à cotisations dès le 1er euro.
Une indemnité transactionnelle est également exonérée de CSG et CRDS à hauteur du plus faible des montants suivants :
- L’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement
- Le montant exclu de l’assiette des cotisations de sécurité sociale
Attention. Pour calculer les limites d’exonération, il faut prendre en compte l’ensemble des indemnités versées et prévues à l’article 80 duodecies du CGI (indemnités transactionnelles, indemnités de licenciement…)
Quid du salarié qui ne peut pas bénéficier d’une indemnité de licenciement ?
Son indemnité transactionnelle est exonérée de cotisations sociales dans les conditions prévues pour l’indemnité de licenciement hors PSE :
- Exonération dans la limite de deux fois le PASS à hauteur du plus élevé des montants suivants :
- Montant fixé par la convention de branche, l’accord professionnel ou interprofessionnel ou, à défaut, par la loi
- Moitié de l’indemnité
- Double de la rémunération de l’année civile précédente
Cette situation concerne notamment les employés licenciés pour faute grave ou lourde.
Exonération en raison du caractère indemnitaire de d’une indemnité transactionnelle
Dans certains cas, l’indemnité transactionnelle peut être exonérée de cotisations sociales même si elle ne répond pas aux conditions énoncées ci-dessus.
C’est notamment le cas si la somme versée représente des dommages-intérêts destinés à réparer un préjudice autre que la perte de salaire.
Dans cette hypothèse, il appartient à l’employeur de prouver le caractère indemnitaire de tout ou partie du montant de l’indemnité transactionnelle.
Le BOSS prévoit notamment cette possibilité en cas d’indemnité transactionnelle versée suite à une démission du salarié.
Faut-il déclarer l’indemnité transactionnelle ? Le régime fiscal
L’indemnité transactionnelle est exonérée d’impôt sur le revenu, dans la limite du plus élevé des montants suivants :
- Montant de l’indemnité de licenciement fixé par la convention collective, un accord professionnel ou interprofessionnel, ou à défaut, par la loi
- Double de la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l’année civile précédente, dans la limite de 6 fois le PASS
- Moitié de l’indemnité, dans la limite de 6 fois le PASS
Exemple de calcul du régime social et fiscal de cette indemnité transactionnelle
Un salarié licencié pour motif personnel en 2022 perçoit une indemnité de licenciement prévue par la CCN d’un montant de 50 000 euros et une indemnité transactionnelle de 115 000 euros. Sa rémunération brute annuelle est de 30 000 euros.
Il faut prendre en compte l’intégralité des indemnités versées (indemnité de licenciement + indemnité transactionnelle) soit un total de 165 000 €.
La première étape est de calculer la part imposable en la comparant aux limites d’exonérations de l’art.80 duodecies 1.3e du CGI :
- Deux fois le montant de la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l’année civile précédant la rupture = 60 000 € (30 000 x 2)
- OU 50% du montant de l’indemnité si ce seuil est supérieur = 82 500 €
- OU montant de l’indemnité de licenciement = 50 000 €
On retiendra la somme la plus favorable, soit une exonération d’impôt dans la limite de 82 500 €.
S’agissant des cotisations sociales, la somme totale de 165 000 € sera exonérée de charges dans la limite de 2 PASS soit 82 272 €.
La fraction supérieure, soit 82 728 € (165 000 – 82 272) sera réintégrée dans l’assiette de cotisations.
Par conséquent, le traitement en paie de cette indemnité transactionnelle de 115 000 € sera le suivant :
- Exonération de cotisations sociales pour 32 272 € ( 82 272 € – 50 000 € )
- Cotisations sur la base de 82 728 €
Indemnité transactionnelle allouée pendant l’exécution du contrat
Indemnité transactionnelle : une exonération de charges est-elle possible ?
Le régime social applicable dépendra de la finalité de la somme versée.
Si l’indemnité transactionnelle est versée en contrepartie ou à l’occasion d’un travail, elle constitue un élément de rémunération. Elle est donc entièrement soumise à cotisations, CSG et CRDS (par exemple : sommes versées au titre d’heures supplémentaires).
En revanche, si son objectif est de réparer un préjudice, elle est exclue de l’assiette des cotisations et contributions sociales, CSG et CRDS. Par exemple : somme versée pour indemniser un préjudice moral ou physique.
Indemnité transactionnelle : quel régime fiscal ?
Les sommes allouées au salarié pour réparer un préjudice sont non imposables ( à l’exception des indemnités perçues au titre d’un préjudice moral et supérieures à un million d’euros).
En revanche, si cette indemnité transactionnelle correspond à un élément de salaire, elle sera soumise à l’impôt sur le revenu.
Pour en savoir plus : myRHline a mené l’enquête sur la rémunération dans la fonction RH. Découvrez les résultats dans l’article « salaire RH ».
Céline Le Friant et Laurène Boussé
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