Burnout ? Il va bien falloir innover en termes de prévention car parler de prévention du stress ne date pas d’hier. Qu’est-ce qui cloche chez nous ?
Les suicides en 2008-2009 ont marqués les esprits avec un magnifique plan d’urgence ardemment souhaité et lancé par le ministre du travail, à l’époque, Mr Xavier Darcos. Que dire du procès de France Télécom, surnommé « l’affaire des suicides » qui a signé un tournant dans le droit pénal en consacrant la notion de « harcèlement moral institutionnel » ou des 2.55 millions de salariés en burnout sévère (enquête publiée le 26 octobre 2021 par le cabinet Empreinte Humaine), des 2 suicides par jour de petits patrons, du ras le bol des soignants et des pertes humaines dans le milieu des forces de l’ordres ? La liste est non exhaustive.
Crise et Souffrance au travail
Oui, nous parlons bien de suicides liés à l’exposition au stress chronique au travail, même s’il n’y a pas de chiffres exacts à ce sujet. Soyons lucides, la souffrance au travail n’a jamais été autant d’actualité. Nous passons des termes de burn-out, au brown-out, ou blur-out (petit nouveau) en passant par la nouvelle terminologie de QVT (Qualité de Vie au Travail) à QVCT (Qualité de vie et des conditions de travail)
Nous sommes en 2022, et nous essayons, tant bien que mal, de surfer et tenir sur la vague (les vagues ?) qui nous tombe dessus, sans discontinuer, depuis 2 ans. Les travailleurs pètent les plombs. Vous ne le remarquez pas autour de vous ? Isolement, frontière vie pro- vie perso brouillée, augmentation des troubles musculo- squelettiques, hyperconnexion, conduites addictives, consommation d’anxiolytiques, créations de numéros d’appel de soutien psychologiques sont des signaux. Le monde du travail est malade. Les travailleurs sont fatigués, éreintés, parfois démotivés, de plus en plus désengagés, peut-être vous qui lisez cette tribune. Nombre de professionnels de la prévention du bien naître du travail savent que la stratégie la plus efficace est la prévention primaire. Il faudrait agir avant que le risque soit avéré.
- Découvrez l’article de la rédaction : burn-out comme maladie professionnelle ?
Le burnout, c’est tendance !
Ce sujet fait débat depuis des années. Le terme « burnout » signifie se consumer. A ce jour, il n’y a pas de définition exacte de ce fléau. On dit de lui qu’il est la maladie professionnelle du siècle.
Pourtant, une avancée a apporté un éclairage intéressant. Vous rappelez-vous du 27 mai 2019 ? Les échanges sur la reconnaissance en maladie professionnelle de l’épuisement professionnel étaient déjà assez confus et l’Organisation Mondiale de la santé a été à l’origine d’une incompréhension générale. On a pensé que le burnout venait d’être reconnu comme une maladie par l’OMS. Toute la presse s’est saisie de cette nouvelle et cela a été repris partout. Mais non. Le lendemain, elle a dû apporter une précision. Elle le décrit comme un syndrome résultant d’un stress chronique au travail qui n’a pas été géré avec succès et indique clairement que le burnout « fait spécifiquement référence à des phénomènes relatifs au contexte professionnel » et non pas à d’autre expérience de la vie. Ce qui n’est pas négligeable.
Faut-il continuer à attendre cette reconnaissance ? Faut-il attendre que les professionnels de santé, les pouvoirs publics et les employeurs se mettent d’accord ?
Certainement pas. « Les choses ne changent pas, c’est nous qui changeons », Henry David Thoreau
Nous ne pouvons pas nier le fait que les entreprises prennent de plus en plus conscience de la nécessité de résoudre l’équation performance sociale = performance économique. Dans le cas contraire, elles décrocheront à long terme, incapables de maintenir des salariés engagés avec les conséquences qui en découlent. C’est aussi une stratégie quasi obligatoire pour penser attirer les talents et les garder.
Alors que faire pour se protéger du burnout ? Cela dépend-il de nous ?
L’intelligence émotionnelle, la solution miracle au burnout ?
Le burnout ne se manifeste pas du jour au lendemain, quand on utilise le terme burnout, en réalité, on parle du coup d’arrêt final. La victime, jusqu’alors au travail, est absente le lendemain. La dégradation de la santé mentale, physique, émotionnelle et comportementale est progressive. Nous ne nous reconnaissons plus et l’entourage s’en rend compte, en premier.
Pourquoi parler d’émotions comme outil de prévention ? Elles agissent sur notre corps. Une émotion se définit comme le fait d’éprouver un affect positif ou négatif à la suite d’un élément déclencheur interne, une pensée, un souvenir, ou externe, une information, un bruit…Elle agit autant sur notre psychisme que sur notre corps. Que ressentez-vous lorsque vous avez peur ? Un rythme cardiaque plus rapide ? Une respiration saccadée ? Et quand vous éprouvez de la joie ? Votre se détend ? Vous souriez ? Le comportement – rire, larmes, irritabilité est une composante de l’émotion.
Lire les émotions et les exprimer permettent une lecture de l’état dans lequel nous sommes. Nous sommes tous capable de reconnaître ou entendre une personne qui est de plus en plus fatiguée, dont les signaux physiques de stress chronique commencent à apparaître, (souvent elle en parle aux collègues ou aux proches) , qui n’a plus l’énergie ou la motivation qu’on lui connaissait.
« Bien naître au travail »[1] est la première pièce de théâtre sur le sujet du burnout tirée d’une histoire vraie « Quand le travail vous tue – Histoire d’un burnout et de sa guérison » Ed Maxima/Ed.Dunod. Le cerveau retient les souvenirs chargés émotionnellement et le théâtre fait office de miroir. C’est un outil de prévention individuel et collectif efficace.
L’histoire de Nelly, ex-Responsable RH, est exemplaire. Passionnée par son travail et impliquée, elle lui consacre beaucoup de son temps. Progressivement, à son insu, le doute et l’épuisement s’installent. Elle fait vivre au spectateur sa perte d’enthousiasme, les signaux de son corps épuisé qui se manifestent de plus en plus, ses pensées négatives et son ressenti émotionnel avant d’en arriver au geste ultime.
Si les victimes de burnout avait pris conscience qu’elles courraient vers un mur plus haut qu’elles, sans doute auraient-elles réagit avant qu’elles ne s’effondrent ?
Auteur de : « Quand le travail vous tue », « Burnout et après? », « Renaissance : il y a une vie après le burnout »
Formatrice et Conférencière
[1] Bien Naître au Travail, actuellement au théâtre Darius Milhaud à Paris