Contexte
Paul est le Directeur financier d’« ABC », une société internationale, créée en France, il y a une quinzaine d’année par un leader charismatique. Quelques mois avant notre intervention, la société a été rachetée pour en favoriser la croissance par un fonds d’investissement basé en Belgique. Le siège est à Paris, mais une partie des directions supports, dont la direction financière, a déménagé dans la banlieue d’Anvers.
L’ancien directeur financier est devenu le n° 2 de la société (DGA). C’est dans ce contexte de croissance que Paul, notre coaché, a été recruté il y a un peu plus d’un an. Le recrutement a été laborieux (difficile de trouver à Anvers, un Directeur Financier biculturel). Paul est un belge Wallon de 55 ans qui a fait toute sa carrière dans les Flandres dans des sièges européens de très grands groupes internationaux avec des responsabilités opérationnelles et stratégiques élargies. S’il a pris le poste, c’est suite à un licenciement, avec l’espoir – au regard des promesses du chasseur de têtes – qu’il aurait chez ABC, de nouveaux challenges à relever.
Quand nous commençons la mission, l’objectif exprimé par le DGA (le demandeur du coaching) lors de l’entretien tripartite de démarrage est que Paul trouve sa place dans l’entreprise et s’épanouisse dans son travail. A aucun moment, l’entreprise n’envisage le départ du collaborateur de la société car son profil rassure les actionnaires, c’est un homme posé et compétent avec un profil complémentaire du DGA. Paul manifeste les signes d’un début de dépression. Au cours des premiers entretiens, il se plaint que le DGA est omniprésent sur « son territoire », que ses collaborateurs le contournent et il a le sentiment de ne pas être utile à quiconque. Il n’est pas heureux, estime qu’il a fait une erreur en prenant le poste et qu’il ferait mieux de quitter ABC. Sa problématique est celle d’un homme confronté au sentiment de la perte (au niveau de la fonction, de ses responsabilités et de son autorité) : il ne faut pas le laisser s’enfermer dans une perception négative de lui-même.
Utilisation de Motiva
Motiva a été utilisé au milieu du processus du coaching en complément d’un inventaire typologique de personnalité, pour mieux comprendre au-delà de la plainte, les sources d’insatisfaction et identifier des leviers de changement. L’analyse de Motiva a montré qu’un grand nombre d’indicateurs étaient au rouge par rapport à l’exercice du métier (manque de stimulation intellectuelle, de variétés des tâches, peu de possibilité d’innover) et au niveau du poste (sentiment de sous utilisation de ses compétences). Par ailleurs, il a révélé une forte volonté de remise en question au niveau du mode de vie. Paul a besoin de se sentir utile et de faire des choses qu’il aime, il est prêt pour cela à moins gagner d’argent. Ses ancres motivationnelles—regroupements des motivations principales dans le monde du travail—sont le changement, les défis intellectuels et l’engagement sociétal et humain. Il a par le passé, explique-t-il lorsque nous faisons le débriefing de Motiva, toujours exercé des doubles fonctions ou des postes dans deux entreprises en parallèle, a eu beaucoup de contacts et souvent occupé des rôles de Mentor (avec des collègues plus jeunes ou moins expérimentés).
Motiva a permis d’analyser de façon objective les sources d’insatisfaction et de faire prendre conscience à Paul de changement de priorités liées à l’âge, notamment dans sa relation aux autres : son besoin de « Manager les autres » s’efface au profit d’ « Aider les autres à évoluer ». Le manque d’espace est ressenti comme une source de souffrance et un véritable frein à l’épanouissement ; Paul fait ainsi le lien entre le sentiment d’étouffement et son envie de travailler depuis son domicile (une grande maison à la campagne). Avec son accord, il a été décidé d’aborder certains points de l’analyse de Motiva lors d’un entretien tripartite intermédiaire avec le DGA. Ce dernier a acté la demande de prise de recul de Paul et son besoin d’espace. Il a proposé de faire un essai de télétravail pendant trois mois si Paul s’engageait à venir au bureau au moins deux jours par semaine (voire plus si nécessaire, sans compter les déplacements à Paris) ce qui a été accepté.
A l’issue de la période test, un dernier point est réalisé lors de l’entretien tripartite final. Paul a admis que si le poste chez ABC n’était pas une source d’épanouissement, cela ne serait pas une bonne idée de quitter l’entreprise, compte tenu de son âge. Coïncidence de la vie, ou parce qu’il était plus disponible, le Bourgmestre de son village l’a sollicité pendant la « période test » – du fait de son « biculturalisme » – pour devenir le président d’une nouvelle association en charge du jumelage avec un village francophone. Avant d’accepter cette mission, Paul a formulé à ABC une demande de travail à temps partiel à 4/5ème que l’entreprise a accepté sans difficulté. Depuis, il a retrouvé un équilibre.
Conclusion
La prise en compte de la motivation au travail de Paul a été un élément central de ce coaching dont l’un des effets a été vers un nouvel engagement. Investiguer les motivations profondes a permis plus facilement au coaché d’oser, d’élaborer et d’exprimer un véritable projet de vie. Du côté de l’entreprise, l’appui de Motiva a permis à l’entreprise de trouver une réponse à un problème qu’elle ne parvenait pas à résoudre seule. Si l’objectif du coaching ne visait pas à préparer la sortie à moyen terme de la vie professionnelle du coaché, en faisant le choix d’un investissement social marqué par le bénévolat et une plus grande disponibilité pour la communauté, Paul a redonné du sens à sa vie en envisageant son avenir professionnel dans une perspective élargie, dans une logique de succession, de transmission et en y intégrant une dynamique personnelle et familiale.
Clotilde Renard, Directrice associé, Cyrcée Consulting