La période d’essai est par principe un mécanisme souple dans lequel les parties ont un maximum de liberté. Pour autant, cette simplicité n’est qu’apparente. Une rupture de période d’essai doit respecter un certain nombre de règles afin d’éviter des conséquences importantes pour l’entreprise : poursuite du contrat en CDI ou encore dommages et intérêts à verser.
Alors comment s’y prendre ? Quelles sont les formalités et délais de prévenance à respecter ? Que risque l’entreprise ? Faisons le point pour sécuriser juridiquement vos fins de période d’essai.
Quelles formalités pour mettre fin à une période d’essai ?
Une rupture qui n’a pas besoin d’être motivée
Particularité majeure par rapport aux autres ruptures de contrat (licenciement notamment) : les parties peuvent mettre fin à une période d’essai sans justifier d’un motif particulier (c.trav.art.L1231-1 al 2).
Non seulement cette indication de motif n’est pas nécessaire mais elle est également non souhaitable. En effet, il est préférable de ne pas mentionner de détails dans la lettre de rupture afin d’éviter une éventuelle remise en cause par le conseil des prud’hommes (nous y reviendrons).
Pas de procédure obligatoire sauf exceptions
En principe, la rupture n’est soumise à aucune procédure particulière. Un simple courrier en LRAR ou remise en main propre, indiquant la décision de rompre la période d’essai et la date de fin du contrat, est suffisant.
Quelques exceptions toutefois :
- Consultez votre CCN avant toute décision de mettre fin à une période d’essai, elle peut prévoir des modalités particulières
- Salariés protégés : la rupture de la période d’essai impose d’avoir obtenu au préalable l’autorisation de l’inspection du travail (comme pour un licenciement)
Les formalités sont donc simples mais indispensables : sa rupture doit être explicite. Ainsi, l’envoi au salarié de l’attestation Pôle emploi ne permet pas d’en déduire la fin de la période d’essai (cass. soc. 17-10-2007 n° 06-44.388).
Fin de période d’essai : les délais de prévenance à respecter
Principe
Depuis 2008, employeurs comme salariés doivent obligatoirement respecter un délai de prévenance avant de rompre la période d’essai. Ce délai varie selon la partie qui en est à l’initiative et le temps de présence de l’employé dans l’entreprise.
Point de vigilance. La période d’essai ne peut pas être prolongée du fait du délai de prévenance. Si la relation de travail se poursuit au-delà de l’essai prévu, il s’agit d’un CDI qui ne pourra être rompu que par un licenciement (cass. soc. 5-11-2014 n° 13-18.114). Il est donc important d’anticiper le délai nécessaire pour mettre fin à la période d’essai.
Rupture de la période d’essai à l’initiative du salarié
Le salarié qui souhaite mettre un terme à sa période d’essai doit respecter un délai de prévenance de 48 heures. Ce préavis est réduit à 24 heures s’il est présent depuis moins de 8 jours dans l’entreprise (art.L1221-26).
Rupture à l’initiative de l’employeur
L’entreprise a l’obligation de prévenir le salarié de sa rupture dans les délais minimaux suivants (art.L1221-25) :
- 24 heures si le salarié est présent depuis moins de 8 jours
- 48 heures entre 8 jours et 1 mois de présence
- 2 semaines après 1 mois de présence
- 1 mois après 3 mois de présence
Point de vigilance. Ces délais ne concernent que les contrats prévoyant une période d’essai d’au moins une semaine. En deçà, aucun délai de prévenance n’est dû.
Période d’essai : non respect du délai de prévenance, quelles conséquences ?
Si l’employeur ne respecte pas le délai de préavis (en tout ou partie), il devra verser à l’employé une indemnité compensatrice. Celle-ci est égale aux salaires et autres avantages que l’employé aurait perçus s’il avait travaillé jusqu’à la fin du délai de prévenance.
Côté salarié, aucune sanction n’est spécifiquement prévue s’il rompt sa période d’essai sans respecter le délai légal. Toutefois, il pourrait en principe être condamné à verser des dommages et intérêts pour réparer le préjudice subi par l’employeur.
Rupture abusive ou nulle et ses conséquences
Le fait que la rupture n’ait pas besoin d’être motivée n’empêche pas le conseil de prud’hommes d’examiner les circonstances qui ont amené les parties à cette décision.
La période d’essai est en effet uniquement destinée à apprécier les compétences professionnelles du salarié. Elle est donc abusive :
- Si elle est fondée sur des motifs non inhérents à la personne du salarié : difficultés économiques de l’entreprise, refus du collaborateur de baisser sa rémunération…
- Ou encore si l’entreprise ne laisse pas le temps suffisant au salarié pour faire ses preuves (fin de la période d’essai après 30 minutes de travail, CA Paris 11-12-2008 n° 07-2548).
La rupture est également nulle si elle s’appuie sur un motif discriminatoire, par exemple sur des problèmes de santé du salarié (cass. soc. 16-2-2005 n° 02-43.402).
Dans ces deux cas, l’employeur devra réparer le préjudice subi par le versement de dommages et intérêts au salarié concerné.
Céline Le Friant