La co-construction de la formation professionnelle fait partie des grandes ambitions portées par la loi du 5 septembre 2018. L’enjeu étant d’accentuer la collaboration entre les employeurs et leurs salariés au profit du développement des compétences.
Comment définir le concept de co-construction ? De quelle façon peut-il s’appliquer à la formation en entreprise ? Et quels sont les avantages d’une telle stratégie ? Décryptons ensemble le sujet.
Définition de la co-construction
Co-construire désigne l’action de composer (quelque chose), d’élaborer (un projet) en s’appuyant sur le collectif. Le principe est de miser sur l’implication de toutes les parties concernées pour donner vie à ce qui doit être mis en œuvre.
L’usage de cette stratégie de « conception collaborative » force à sortir des, encore trop traditionnels, schémas descendants pour se diriger vers un mode de fonctionnement participatif. Et, par conséquent, plus ouvert.
Dans la sphère professionnelle, la co-construction peut être utilisée à différents niveaux. Par exemple :
- concevoir un nouveau produit ou service, en concertation avec un client ;
- créer un nouvel outil, en partenariat avec un fournisseur ;
- définir de nouveaux processus internes, selon les suggestions du personnel ;
- concevoir des parcours de formation, en accord avec les besoins et attentes de la communauté apprenante…
C’est d’ailleurs sur ce dernier point, la co-construction de la formation, que nous allons maintenant nous attarder.
Co-construire la formation : qu’est-ce que ça veut dire ?
Jusqu’à encore très récemment, la co-construction des parcours de formation n’était pas toujours une priorité pour les organisations. Mais l’application de la loi du 5 septembre 2018 et la crise sanitaire ont changé la donne.
En effet, la réforme s’est engagée à favoriser le dialogue autour de la formation entre les employeurs et les salariés grâce à différents dispositifs comme :
- l’entretien professionnel ;
- le « CPF co-construit » ;
- la reconversion ou promotion par l’alternance (PRO-A) ;
- le plan de développement des compétences.
Mais, ce sont les effets de la pandémie qui ont forcé la transformation de l’approche formation. La prise en compte des besoins d’apprentissage étant alors essentielle pour susciter l’intérêt des apprenants lors des formations à distance.
Co-construction financière des projets de formation
Depuis cette année, les entreprises font partie des acteurs qui peuvent désormais compléter le CPF. Et ce, en vue de financer des projets de formation via le « CPF co-construit » et les différents abondements de co-construction.
Chaque organisation est ainsi libre :
- d’accorder des droits supplémentaires au CPF via un accord d’entreprise ;
- d’effectuer un versement, à son initiative, sur les CPF de ses salariés grâce à la dotation volontaire ;
- de compléter les droits en abondant le CPF si les fonds ne suffisent pas à financer une action de formation.
Co-construction des actions de formation
La mise en œuvre d’une stratégie de formation professionnelle est un levier de compétitivité pour les entreprises.
Or, si les modalités d’apprentissage, les outils ou encore les contenus pédagogiques ne répondent pas aux attentes de la communauté apprenante, il est peu probable que la formation atteigne ses objectifs.
La co-construction de la formation prend alors tout son sens. D’abord parce que les employés peuvent désormais être à l’initiative d’une action de formation conçue d’un commun accord avec l’employeur. C’est par exemple le cas de la PRO-A.
Mais aussi parce qu’avec cette démarche participative, les collaborateurs partagent leur ressenti, expriment leurs envies, apportent leurs idées ou font des suggestions pour que l’organisation puisse concevoir une stratégie pédagogique adaptée. C’est-à-dire celle qui permettra la montée en compétence de l’entreprise.
S’engager dans une démarche de co-construction de la formation en entreprise, un pari gagnant ?
Les avantages du développement des compétences en entreprise basé sur la co-construction sont multiples.
S’ouvrir à l’innovation pédagogique
La stratégie visant à impliquer les salariés dans le processus de construction des projets pédagogiques contribue à insuffler l’innovation dans les pratiques de formation. En effet, la co-construction conduit l’entreprise et ses collaborateurs à échanger sur différents sujets.
Afin de rendre la formation plus performante d’un côté et plus attrayante de l’autre, les salariés peuvent ainsi être force de proposition en ce qui concerne les :
- outils technologiques à utiliser pour la formation (LMS, mobile learning…) ;
- objectifs des contenus pédagogiques (préparation des formations en présentiel, rappel de notions abordées…) ;
- modalités d’apprentissage (blended learning, social learning…) ;
- formats des contenus (microlearning…).
Cultiver l’engagement collaborateur pour la formation
Au travers d’une approche de la formation basée sur le principe de la co-construction, l’employeur envoie un signal important à ses équipes. En communiquant son intérêt pour les opinions et ambitions professionnelles de chacun, il cultive ainsi le sentiment d’appartenance.
En retour, l’engagement des collaborateurs pour le processus d’apprentissage s’en trouve alors renforcé.
Fidéliser les équipes et attirer des talents
Le marché de l’emploi ne cesse de se transformer. Les savoir-faire d’aujourd’hui seront peut-être obsolètes demain. Une réalité dont les travailleurs ont pleinement conscience. Ces derniers portent alors une attention toute particulière aux moyens déployés par une entreprise pour assurer le développement de leurs compétences. Ou, plus largement, le maintien de leur employabilité.
Ainsi, l’organisation qui propose un accompagnement financier grâce au « CPF co-construit » et une véritable expérience de formation à toutes les chances de réduire le turn over de sa masse salariale. Mais aussi d’augmenter son attractivité auprès de potentiels candidats à l’embauche.
Cependant, la co-construction de la formation peut sembler complexe pour une entreprise. Et, dans les faits, ce n’est pas totalement faux. Les intervenants et les interactions sont plus nombreux. Cette méthode nécessite donc souvent plus de temps : à l’organisation d’abord, puis pour exploiter les échanges ensuite.
De même, sa mise en œuvre implique parfois un changement dans la culture de l’organisation elle-même. En effet, co-construire la formation implique que, dans ce contexte, tout le monde soit au même niveau. Un positionnement parfois difficile à adopter pour les organisations bâties sur le modèle de management top-down.
Co-construire la formation est bénéfique pour les entreprises et les collaborateurs. De part et d’autre, cette stratégie permet en effet de lever les différents freins à l’apprentissage dans le contexte du travail. Elle contribue également à renforcer le dialogue employeur-salarié.
Il s’agit donc d’une approche aux multiples avantages qui, d’un point de vue plus global, s’inscrit comme un nouveau moyen d’atteindre la performance.
Jessica Biot