Selon l’Observation de l’emploi et du handicap (Ifop & Agefiph, 2022), le taux de chômage des personnes handicapées est en baisse. Entre 2017 et 2021, il est passé de 19 % à 13 %.
Il reste néanmoins deux fois plus élevé que pour les actifs du secteur dit ordinaire. Car, soyons clairs, l’inclusion des collaborateurs handicapés dans la sphère professionnelle souffre encore de stéréotypes.
Toutefois, deux indicateurs positifs ressortent de l’étude : 64 % des recruteurs indiquent être disposés à embaucher des profils différents. Et 31 % estiment que le plein-emploi des travailleurs handicapés est atteignable à l’horizon 2027.
Signe que le modèle d’entreprise handi-bienveillante commence à se développer. Mais de quoi parle-t-on exactement ? Et comment élaborer une politique RH en faveur du handicap ? Éléments de réponse dans cet article.
Qu’est-ce qu’une entreprise handi-accueillante ?
Avant de proposer une définition de l’entreprise handi-accueillante, commençons par rappeler celle du travailleur handicapé (TH). Selon l’article L5213-1 du Code du travail, il s’agit de toute personne dont les possibilités d’obtenir ou de conserver un emploi sont réduites du fait de l’altération d’une — ou plusieurs — fonction physique, sensorielle, mentale ou psychique.
Une entreprise handi-accueillante est alors une structure engagée dans une démarche d’inclusion de ces salariés handicapés dans le monde du travail. En ce sens, elle cherche à créer un environnement professionnel handi-accueillant à l’échelle de l’organisation. Mais aussi au-delà : auprès de ses fournisseurs, clients et partenaires.
Cette dynamique se traduit donc à plusieurs niveaux :
- accès à l’emploi des travailleurs handicapés ;
- prévention, maintien et adaptation des postes de travail ;
- management et formation ;
- achats inclusifs ;
- accessibilité, etc.
Stratégie de recrutement, conditions de travail (QVCT), évolution professionnelle des travailleurs handicapés, démocratisation du handicap au travail… Ce sont tous ces aspects articulés entre eux qui font les piliers de l’engagement handi-accueillant d’un employeur. Celui-ci faisant partie intégrante de la culture d’entreprise.
Handicap et emploi : zoom sur les dispositifs légaux
En vue de favoriser l’emploi des personnes en situation de handicap, l’État a conçu plusieurs dispositifs légaux. L’OETH et le référent handicap du côté entreprise. Ainsi que la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé du côté des salariés.
L’obligation d’emploi des travailleurs handicapés (OETH)
L’obligation d’emploi des travailleurs handicapés (OETH) repose sur le principe de non-discrimination au travail. Réformée par la loi du 5 septembre 2018, elle impose l’embauche de bénéficiaires à l’obligation d’emploi à toutes les entreprises.
Toutefois, seules celles d’au moins 20 salariés sont assujetties à l’OETH et doivent déclarer 6 % de salariés en situation de handicap dans leur effectif annuel. À défaut, ces employeurs versent une compensation sous la forme d’une contribution financière.
La reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH)
La reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) est une démarche qui permet de faire valider ce statut d’un point de vue administratif. Attribuée par la CDAPH, elle ouvre l’accès à des mesures d’aides (orientation professionnelle, formation, aménagement de contrat, soutien financier, etc.) aux actifs concernés — qu’ils soient déjà employés ou en recherche d’emploi.
Le référent handicap
La fonction de référent handicap a été créée par la loi « Avenir Professionnel ». Obligatoire au sein des entreprises de 250 salariés et plus, il a pour vocation de faciliter la mise en place des engagements handicap au sein de l’organisation. Mais aussi d’accompagner les collaborateurs handicapés (onboarding, adaptation du poste, évolution professionnelle, solutions de transport domicile/travail…).
La finalité de ces moyens légaux est d’inciter les employeurs à s’ouvrir au recrutement de collaborateurs handicapés. Mais aussi de faciliter leur accompagnement professionnel et, surtout, de démystifier la fausse problématique du handicap au travail.
Pour autant, « cocher les cases » ne suffit pas pour être une entreprise handi-accueillante.
À savoir : Pour promouvoir l’investissement des entreprises en faveur du handicap, le gouvernement a mis en place le baromètre Emploi et Handicap. Il s’agit d’outil à visée informative qui permet aux employeurs de partager les données inhérentes à leurs engagements sur le handicap.
Construire une politique d’entreprise en faveur du handicap
Volet à part entière de la stratégie RSE, l’engagement en faveur du handicap reflète l’état d’esprit inclusif d’un employeur. Mais, comme pour toute stratégie de transformation globale, la construction d’une telle politique implique avant tout un état des lieux initial :
- Comment l’organisation traite-t-elle le sujet du handicap ?
- Quelles sont les pratiques actuelles en ce qui concerne le recrutement, l’accessibilité, la prévention, la sensibilisation, le recours au secteur protégé ?
- Quels sont les besoins et priorités vis-à-vis du handicap ?
En somme, il s’agit de savoir d’où on vient pour déterminer les objectifs à atteindre. Pour, par la suite, définir les moyens d’y parvenir de manière collective.
En réalité, le sujet est vaste et plusieurs facteurs sont à prendre en compte pour établir la stratégie idéale. TPE, PME et grands groupes n’ont pas les mêmes ressources pour agir. Néanmoins, toutes les structures peuvent adapter leurs pratiques. Voici quelques pistes d’actions à mettre en place pour commencer.
Développer le recrutement de candidats en situation de handicap
La mise en place d’une stratégie de recrutement inclusif est la première étape pour construire une politique RH en faveur du handicap. Pour cela, plusieurs leviers sont actionnables.
Commençons par les offres d’emploi. Outre le détail apporté sur les conditions d’exercice de la fonction, la mention « poste ouvert aux personnes en situation de handicap » est à indiquer. De même, les stratégies de diffusion des offres d’emploi et de sourcing peuvent être diversifiées. Notamment par le biais de canaux spécialisés comme Hello Handicap, Agefiph, Cap Emploi ou encore Job in Live.
Le but étant de communiquer une culture « handi-friendly » dès la publication de l’offre d’emploi. Et, d’une manière générale, de diversifier les recrutements et d’attirer des candidats compétents, quels qu’ils soient.
En entretien, ils restent ensuite libres d’évoquer ou non leur handicap. Toujours d’après l’étude 2022 Ifop & Agefiph, ils sont d’ailleurs près de 40 % à le faire régulièrement. Si c’est le cas, ou lorsque le handicap est visible, rien n’empêche alors les recruteurs de poser des questions relatives aux aménagements à prévoir.
Autre levier d’une politique active d’insertion et de maintien dans l’emploi des TH : le recours aux entreprises du secteur protégé (EA/ESAT). Notamment dans le cadre d’un partenariat de sous-traitance.
Adapter la vie professionnelle du travailleur handicapé
Deuxième aspect essentiel à la mise en œuvre d’une démarche handicap en entreprise : l’adaptation du poste de travail. Soit en vue de l’intégration d’un nouveau collaborateur. Soit pour maintenir dans l’emploi un salarié qui revient après un arrêt maladie, par exemple.*
En pratique, les mesures de compensation du handicap sont obligatoires. Elles sont faites au cas par cas, selon les recommandations de la médecine du travail. Toutefois, et contrairement aux idées reçues, on parle le plus souvent d’adaptations techniques ou organisationnelles assez simples à mettre en place :
- réorganisation du temps de travail ;
- achat de matériels ergonomiques ou de logiciels spécifiques ;
- répartition des tâches ;
- accessibilité (physique, numérique…).
Dans certains cas, le changement de poste/reclassement est nécessaire permettant ainsi d’éviter l’inaptitude au travail.
Mais l’entreprise handi-accueillante va plus loin. Elle se différencie en déployant un éventail de solutions spécifiques pour adapter l’emploi aux contraintes imposées par l’état de santé du collaborateur : aides financières, jours d’absences en plus, maintien d’une cotisation retraite à taux plein, formations, etc.
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Sensibiliser les parties prenantes au handicap
Troisième point : les entreprises handi-accueillantes s’attachent à mettre en place des actions de sensibilisation. Ceci afin de promouvoir la diversité et, de ce fait, de démocratiser l’emploi des personnes en situation de handicap.
Pour cela, les démarches prennent différentes formes selon le public visé (candidats potentiels, collaborateurs, clients, fournisseurs…) :
- participation de l’entreprise à des événements comme le DuoDay ou la SEEPH ;
- organisation de formations et d’ateliers récurrents sur la thématique handicap ;
- intégration de critères sociaux sur le handicap dans les appels d’offres ;
- engagement associatif, etc.
Formaliser la mission handicap
Enfin, les entreprises engagées peuvent formaliser la mission handicap. Ceci par le biais de la norme NF X50-783 de l’Afnor. Ou bien par la signature d’un accord d’entreprise ou d’une convention avec l’Agefiph.
Agefiph, partenaire des entreprises privées handi-accueillantes
L’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées est l’interlocuteur de référence en matière de handicap pour les organisations privées.
Outre des conseils, l’Agefiph propose des services, outils et aides financières pour inclure le handicap dans la politique de ressources humaines de toutes les entreprises.
Devenir une entreprise handi-accueillante : que faut-il retenir ?
Par leurs démarches, les entreprises mobilisées en faveur du handicap servent la promotion de l’égalité des chances et de l’inclusion. Elles contribuent ainsi à déconstruire les préjugés (tenaces) de notre société vis-à-vis du handicap. Mais également à transformer le marché du travail.
Cependant, s’identifier comme organisation handi-accueillante dépasse les obligations légales (et le washing ambiant, bien entendu). Il s’agit d’un véritable état d’esprit, à retranscrire à tous les niveaux de l’entreprise. Si cette stratégie implique certains efforts, elle constitue néanmoins un formidable levier de performance économique et sociale.