L’approche Core Model pour les projets de gestion des temps et des activités (GTA) n’en finit plus de séduire les entreprises, tout comme le Core Model RH. Elle présente de nombreux atouts, à commencer par la rationalisation des processus et la centralisation des données. Mais elle comporte aussi quelques difficultés pratiques : le point avec Patrick Hautefort, Directeur du Suivi Client chez Horoquartz.
Patrick, en quoi consiste une approche Core Model appliquée au domaine de la GTA ?
« J’aborderai le sujet au travers de 2 exemples. Le premier, que nous avons traité il y a quelques années, est celui d’une entreprise dans le domaine des services : par la suite de nombreux rachats successifs, ce groupe en était arrivé à gérer plus de 200 types de primes différentes liées aux temps de travail ! Le deuxième est dans l’industrie, avec un groupe possédant 10 usines en France, intégrées depuis très longtemps. Chaque site avait négocié un accord avec ses IRP portant sur les horaires de travail, les modalités d’annualisation mais également sur les modalités de calcul des heures supplémentaires ou d’autres éléments de paie. Cette situation n’a rien d’anormal pour optimiser la performance d’une usine compte tenu de ses contraintes propres : spécialisation métier, localisation, pratiques de management.
En termes de gestion, tout le monde comprend que ces processus spécifiques et ces modalités locales ont quelques conséquences. Les principales étant la multiplication des systèmes d’information et des coûts de gestion administrative élevés. Ces accords multiples peuvent aussi conduire à des problèmes de conformité, la DRH centrale ayant des difficultés à avoir une vue globale de ce qui se passe sur les sites. C’est une réalité que nous ne jugeons pas mais nous sommes de plus en plus sollicités pour améliorer ces situations.
Ainsi, nos clients privilégient de plus en plus des approches Core Model pour centraliser les données, harmoniser les processus, et garantir la pérennité du système d’information de GTA. Il s’agit donc d’harmoniser ce qui peut l’être tout en prenant en compte des spécificités locales ou régionales, car certaines demeureront dans tous les cas. »
C’est un phénomène récent ?
« Disons qu’il y a 20 ans, l’approche de nos clients était le plus souvent de traiter le sujet de la GTA localement. Typiquement, si le client avait 10 sites avec de nombreuses différences dans leur gestion des temps, il privilégiait le plus souvent un déploiement par site. Une solution pas forcément très optimisée mais qui avait le mérite de la rapidité et de la flexibilité, et qui générait peu d’accompagnement du changement. Depuis une dizaine d’années, l’approche Core Model se développe. Les raisons stratégiques RH vues plus haut y contribuent mais il y a aussi une dimension technique : la puissance des serveurs et le développement des réseaux sont devenus des facilitateurs. Aujourd’hui, la majorité de nos clients multi-sites pensent ‘core model’ pour leurs déploiements. »
En quoi consiste un Core Model appliqué à la GTA ?
« Le premier fondement est d’avoir une base de données unique et centralisée pour tous les sites. Le deuxième est de constituer un paramétrage de l’application en essayant de normaliser le plus possible ce qui peut l’être. Ce qui revient à mettre dans un ‘socle commun’ toutes les modalités de gestion partagées par les différents sites et de traiter séparément ce qui restera spécifique à chaque entité. L’objectif est d’avoir un paramétrage de l’application le plus global possible, avec des codifications harmonisées sur tous les sites, des règles de gestion normalisées (ex : modulation, heures supplémentaires, primes…), des processus standardisés et un reporting commun à tous. Ce qui n’empêche pas d’avoir des traitements qui resteront spécifiques au niveau d’un site car n’entrant pas dans un standard groupe. Mais dans cette approche, nos clients cherchent à en avoir le moins possible. »
Quels sont les principaux éléments de retour sur investissement de cette approche ?
« Réaliser un Core Model a un coût. A partir du moment où on s’engage dans une démarche structurante, l’effort de négociation interne, de conception du modèle, de déploiement et d’accompagnement du changement est notable. Mais il y a aussi des gains importants et en premier lieu liés à l’application de GTA par elle-même. Lors de l’implémentation de la solution, cette approche évite de réinventer la roue pour chaque site, donc de faire en double ou en triple des personnalisations parfois pour des points de détail. D’autre part, en cas d’évolution d’un réglementaire, il est plus simple de mettre à jour un traitement unique que de dupliquer la modification sur tous les sites. Mais on observe aussi des gains sur les pratiques. Tous les utilisateurs sont formés à une solution unique, les processus sont normalisés et cela contribue à des économies d’échelle. Enfin, il y les gains liés aux données par elles-mêmes. Des reportings obtenus directement sur une base centralisée sont plus efficients qu’une consolidation complexe et hasardeuse de multiples tableaux Excel envoyés par les sites. »
Mais pour certaines entreprises, et compte tenu de leur réalité et de leur histoire, cette approche Core Model doit être un véritable « big bang ». Comment procédez-vous et quelles sont les bonnes pratiques ?
« Oui, le succès de cette approche n’est pas garanti dans tous les contextes, par exemple dans des structures multi-conventions, avec de fortes différences métiers, des réglementaires hétérogènes, ou en présence de résistances au changement marquées.
La mise en place d’une solution de GTA est souvent le déclencheur de ce type d’approche. Mais ce n’est pas toujours la meilleure démarche, car définir un Core Model GTA est structurant. Cela prend du temps, implique des discussions entre les sites pour définir les bonnes pratiques, nécessite souvent de la négociation sociale pour revoir et simplifier certains points de réglementaire ceci afin de les normaliser le plus possible. Notre recommandation est donc d’engager ces opérations bien avant de lancer le projet par lui-même et sur ce point les RH ont un rôle essentiel à jouer. Tout ce qui sera fait en amont augmente les chances de réussite de l’approche. »
Thierry Bobineau, Directeur Marketing chez Horoquartz, d’après une interview de Patrick Hautefort, Directeur du Service Client chez Horoquartz