33 ans et déjà 10 ans dans la même boîte ! Au sein de Chateaud’eau, Didier Fitte-Duval a vécu la quasi-faillite de la société, son redressement et sa restructuration. Lui-même est un produit de cette politique qui encourage l’écoute, la convivialité, le maintien et la promotion des compétences en interne. Entré en tant que responsable RH, il est aujourd’hui directeur des RH, de la Qualité et du Service Client, et vient de recevoir le Trophée Juni’Or de l’ANDRH pour l’implémentation de la démarche Great Place to Work.
Une société sauvée des eaux
Avant d’en arriver à ce 22 mars où lui a été remis le fameux trophée, Didier Fitte-Duval a dû surmonter, sans jamais quitter son poste, des moments difficiles liés à la santé financière de l’entreprise. « Entre 2000 et 2004, on était dans une phase euphorique. L’important était d’avoir de nouveaux clients. On regardait la croissance de l’entreprise ». C’est à cette époque que Chateaud’eau[1] fusionne avec Roche Claire et rejoint le groupe Suez. La société est en pleine expansion européenne. « Subitement, en 2004, poursuit-il, le marché stagne. On est en quasi-faillite d’un point de vue comptable. Quand on apprend la hauteur des dettes, c’est un choc, un coup de massue. » La société lance un plan de restructuration. « On a changé tout le comité de direction », s’exclame le DRH, qui y fait alors son entrée. Deux plans sociaux plus tard, en 2007, l’entreprise est remise à flot. « Et pour pérenniser la société, on se rend compte qu’il faut davantage construire l’avenir. » C’est là que Didier Fitte-Duval présente la démarche Great Place to Work. « Il ne s’agit pas de faire des cadeaux aux salariés, explique-t-il, comme il l’a fait il y a plus de trois ans. Mais il faut que les collaborateurs se sentent bien, pour qu’ils donnent le meilleur d’eux-mêmes et que l’entreprise, à son tour, obtiennent les meilleurs résultats possibles ».
Ces résultats ne se font pas attendre. « Dès 2010, la démarche est étendue à toutes les filiales. Signe que notre projet avait du sens », se félicite le DRH. Du sens au-delà-même de l’entreprise, puisque c’est cette volonté de devenir une Great Place to Work qui est primée par l’ANDRH. « Ce trophée est une reconnaissance du travail qu’il a fallu fournir, au jour le jour, depuis 2007. Non seulement, le projet a porté ses fruits dans l’entreprise, mais est aussi reconnu par la profession RH », continue Didier Fitte-Duval, qui avoue avoir participé « non pour gagner, mais pour le principe » parce qu’il fait parti des correspondants Juni’Or de l’association.
Comment devient-on une Great Place to Work ?
« Toute entreprise peut être une Great Place to Work ! »[2], encourage l’Institut à l’origine du concept. La clé du succès : la confiance entre les salariés et les dirigeants – toujours selon le même institut. Pour le lauréat de l’ANDRH, cette confiance se décline en 4 comportements : l’écoute, l’échange, la reconnaissance et la convivialité.
Chez le leader de la fontaine à eau, les salaires sont complétés par une prime sur objectifs. « On récompense les résultats, pas l’investissement. Et nous sommes très exigeants avec nos collaborateurs », précise Didier Fitte-Duval. Mais la reconnaissance n’est pas seulement numéraire, « ce qui est difficile à faire comprendre aux managers », soupire-t-il d’un sourire. En entretien d’évaluation annuel, le salaire devient même un sujet interdit. Le DRH préfère de loin organiser des challenges collectifs, qui permettent « de mettre en avant les collaborateurs, avec des photos ou des interviews dans le journal interne ». Et de poursuivre : « les meilleurs deviendront les managers ». La mobilité interne est une autre forme de reconnaissance.
La société privilégie la promotion interne et propose aux collaborateurs tous les postes qui s’ouvrent. « On demande aux managers d’identifier leur successeur potentiel. Nos managers n’ont pas commencé à ce poste. Ce sont majoritairement des chauffeurs à l’origine, qui ont grandi avec l’entreprise », détaille le DRH, qui a lui-même gravi les échelons en interne. Il insiste également sur la place de la formation « d’abord parce que nous utilisons des outils spécifiques, mais aussi pour le développement personnel des collaborateurs ».
Chateaud’eau est une société multi-site et, pour mieux communiquer, la DRH et le Directeur Général se rendent, une fois par mois, dans l’un des centres. « Le matin, on fait la tournée avec le chauffeur ; et l’après-midi, on se rend disponible pour la discussion et on présente les résultats de l’entreprise. C’est une façon de dire : on est tous ensemble dans la même barque », explique l’initiateur de la démarche Great Place to Work. Dans ce cadre, chaque manager a également à sa disposition un budget « convivialité » qui leur permet d’inviter leur équipe pour un petit déjeuner, un cocktail dinatoire ou encore une journée en péniche. « On insiste pour qu’à chacun de ces moments de convivialité, des photos soient prises. Elles sont affichées dans les agences, pour que les collaborateurs n’oublient pas », conseille Didier Fitte-Duval. Plus qu’un souci du détail, c’est un pas de plus vers le statut de Great Place to Work pour Chateaud’eau, qu’il quittera peut-être, un jour, « pour un plus grand groupe ». Mais pas tout de suite.
Typhanie BOUJU