Dans le monde en constante évolution des ressources humaines, les startups se distinguent par une approche souvent perçue comme majoritairement axée sur le marketing pour valoriser leur marque employeur. Cependant, Michel Barabel, professeur à Sciences Po, et Pierre Monclos, DRH chez Unow, révèlent une perspective plus nuancée. À travers leur recherche approfondie, ils découvrent que les startups n’utilisent pas seulement des techniques de marketing RH, mais adoptent également des pratiques RH innovantes et différenciées pour répondre à des besoins spécifiques. Ces pratiques, loin d’être parfaites, offrent des leçons précieuses pour les grandes entreprises, en particulier dans la transparence et la gestion des talents.
Startups : au-delà du marketing RH, une réelle innovation dans la gestion des talents ?
Michel Barabel, professeur à Sciences Po et co-auteur de l’ouvrage Quand les start-up, scale-up et licornes réinventent les RH avec Pierre Monclos, avait tendance à penser, comme beaucoup, que les startups feraient un grand travail de marketing RH pour valoriser leur marque employeur. Avec les discours que l’on connaît aujourd’hui, comme celui sur le fameux baby-foot, qui relèverait davantage du goodie pour attirer les talents.
Après une année intense de recherches, Michel Barabel constate que l’approche des startups n’est pas tellement orientée marketing. Les professionnels RH de ces startups adoptent réellement des méthodes différenciantes pour répondre à des besoins spécifiques, même si l’objectif n’est pas toujours d’innover.
Plus encore, ce serait même « une manière de se différencier des entreprises plus traditionnelles qui marketent trop leur politique RH, là où les startups s’attachent d’abord à incarner les pratiques RH qu’elles mettent en place en interne, avant d’en faire un argument marketing employeur », explique Pierre Monclos, à l’heure où les talents se montrent critiques envers les entreprises qui ne tiennent pas leurs promesses (on parle aussi de “washing”).
Beaucoup de personnes ont déjà été déçues de ce qui a été promis par l’employeur et ce qu’ils découvraient en arrivant. Je crois qu’aujourd’hui, il y a donc plus de méfiance.
*Revivez les temps forts du cinquième épisode de la saison 1 de T’as raté le coche, le podcast de myRHline, avec Pierre Monclos et Michel Barabel : Quand les startups arrangent les RH à leur sauce.
Quelles pratiques RH font la différence dans les startups ?
Culture de la transparence, hyperflexibilité, culture du feed-back et de la radical candor… de nombreuses pratiques RH appliquées aux startups semblent aujourd’hui fonctionner pour renforcer l’engagement collaborateur et la performance des équipes.
Bien entendu, “les startups ne sont pas parfaites”, concède Pierre Monclos. Mais certaines pratiques peuvent inspirer les grandes entreprises, notamment en matière de transparence. Dans son expérience en tant que DRH, il a remarqué que, contrairement aux entreprises traditionnelles où les RH sont souvent opaques, les startups pratiquent une transparence plus ouverte. Il suggère que les grandes entreprises pourraient bénéficier de remettre en question leurs anciennes méthodes et d’adopter plus de transparence, tout en restant fidèles à leurs valeurs et sans adopter radicalement des pratiques comme la transparence des salaires ou la semaine de quatre jours.
Michel Barabel met notamment en garde sur ce point : on ne peut appliquer bille en tête une pratique RH ayant fonctionné pour une entreprise à sa propre structure et aux problématiques qui lui sont propres.
Il est évident que les grands groupes devraient éviter de chercher à tout prix à copier-coller des pratiques réalisées dans d’autres environnements, avec d’autres problématiques. Souvent, quand elles le font de cette manière-là, cela se passe souvent très mal parce que cela s’inscrit en orthogonalité avec la culture (…) parfois, on assiste aussi à un décalage très fort entre le discours et les actes.
En outre, rappelons que, dans leur recherche sur les startups, Pierre Monclos et Michel Barabel ont constaté qu’aucune startup interviewée, y compris des entreprises réputées comme Doctolib, Alan et Swile, n’appliquait plus de trois des nombreuses pratiques RH innovantes identifiées. Les startups tendent à exceller dans un ou deux domaines spécifiques, mais pas dans l’ensemble des politiques RH.
L’ouvrage met en lumière ces entreprises inspirantes tout en soulignant leurs axes d’amélioration dans certains domaines.
L’objectif n’est pas de présenter les startups de manière idéalisée, mais plutôt d’offrir un aperçu réaliste, incluant leurs échecs et réussites, pour guider les DRH dans l’adoption ou le rejet de ces pratiques.