Ces dernières années, le désengagement au travail est devenu une préoccupation majeure des DRH et des managers. Un phénomène difficile à endiguer. Les causes sont multiples et identifier les leviers d’action efficaces relève souvent de l’impossible. Dans cette quête, il se pourrait que nous soyons passés à côté de l’essentiel. La qualité de la relation managériale.
Engager est plus important que fidéliser
Si l’engagement est de plus en plus pris en compte dans les entreprises, il est encore loin derrière le sacro-saint taux de turnover. Pourtant, fidéliser à tout prix ne correspond plus aux réalités du monde actuel. Nous sommes passés d’une expérience de travail linéaire — éducation, travail, retraite — à des parcours foisonnants. Nous ne ferons plus le même métier toute notre vie, nous changerons d’entreprise à de multiples reprises. Parfois par choix, parfois par nécessité. Dans ce contexte, garder les yeux rivés sur le taux de fidélisation est au mieux inefficace, au pire déprimant.
Les entreprises qui espèrent augmenter drastiquement leur taux de rétention risquent la désillusion. À moins d’avoir fait des erreurs dans le passé, les marges de progression sont étroites. Envisageons plutôt la fidélisation comme un indicateur parmi d’autres, et concentrons-nous sur ce qui est réellement à notre portée : l’engagement collaborateur.
Un collaborateur engagé reste naturellement plus longtemps. Et même lorsqu’il quitte l’entreprise, il le fait en bonne intelligence, avec un préavis respecté, voire prolongé. Imaginez un cabinet d’expertise comptable.
D’un côté, un collaborateur désengagé claque la porte en annonçant son départ immédiat, sans se soucier de l’impact sur la période fiscale qui commence. Le préavis ? Juste une formalité qu’il compte bâcler. De l’autre côté, un collaborateur engagé exprime son envie de changer, mais avec respect et responsabilité. Il honore son préavis, prêt même à rester jusqu’à la fin de la période fiscale pour assurer la continuité. Pour l’entreprise et les collègues, l’impact est immense : l’un laisse une fracture, l’autre un passage harmonieux.
D’autre part, l’engagement des collaborateurs influence directement l’attractivité de l’entreprise. Nous le mesurons d’ailleurs communément à l’aide du eNPS (employee net promotor score), basé sur la question suivante : « Dans quelle mesure recommanderiez-vous l’entreprise à vos proches pour y travailler ? »
Cette mesure est imparfaite. On peut recommander son organisation sans y être réellement engagé, par exemple car les conditions y sont confortables. Il existe néanmoins une corrélation solide entre engagement et recommandation. L’équation peut alors se résumer ainsi : un engagement élevé est synonyme d’attractivité renforcée et de rétention supérieure à la moyenne.
La relation managériale : le levier d’engagement souvent sous-estimé
D’après une étude de l’institut Gallup, 70% de l’engagement des équipes et un départ sur deux dépendent directement du manager. Qui ne s’est jamais senti démotivé par une maladresse managériale ? Qui n’a jamais pensé à fuir en présence d’un manager incompétent ?
Sans surprise, nous tenons là le levier le plus efficace pour résoudre l’ensemble des défis RH du moment. La qualité du management. Ou plutôt, la qualité de la relation managériale. La nuance n’est pas anecdotique, car une relation se construit à deux.
Pour améliorer la qualité de la relation managériale, il est essentiel d’offrir aux managers les outils adéquats. Manager est une compétence, non une promotion. Malheureusement, il n’est pas rare d’entendre des dirigeants affirmer que le management relève du simple bon sens et ne nécessite pas de formation. Or, 70% des managers estiment ne pas être assez outillés pour exercer leur rôle.
Un sentiment qui s’amplifie avec l’évolution du rapport au travail : les nouvelles aspirations des collaborateurs, le travail hybride et l’augmentation des cadences tendent à complexifier la fonction. Une étude de la fondation Jean Jaurès montre d’ailleurs que le rôle de manager attire de moins en moins : seuls 53% des cadres du privé de moins de 40 ans sans responsabilités d’encadrement souhaitent en exercer à l’avenir. La balance bénéfice-contrainte semble ne plus faire rêver.
Outiller les managers n’est cependant pas suffisant. L’autre côté de l’équation consiste à inviter les collaborateurs à être acteurs de cette relation et à prendre leur part de responsabilité. Combien de managers se sont déjà sentis démunis face à des exigences incompatibles avec la vie d’équipe ? Qui peut prétendre n’avoir jamais rencontré de collaborateurs toxiques ? Soyons honnêtes, il est souvent plus facile de se victimiser et de rejeter 100 % de la responsabilité sur son supérieur.
Savoir se remettre en question est pourtant un excellent moyen d’entretenir des relations satisfaisantes. Cela améliore l’engagement, mais surtout, et c’est là l’essentiel : cela rend plus heureux.
Les clés pour améliorer la relation managériale
Comment améliorer concrètement la relation managériale ? En cultivant trois ingrédients indispensables à toute interaction humaine : l’écoute, le feedback et la confiance réciproque. Trois dimensions intrinsèquement liées, qui s’influencent les unes les autres.
« Problème entendu à moitié résolu »
Un adage qui illustre bien la puissance de l’écoute. Si l’importance de l’écoute est largement reconnue, sa mise en application est loin d’être évidente. Écouter réellement consiste à accueillir les ressentis, les émotions, les difficultés et les informations de l’autre avec une volonté sincère de le comprendre.
Or, comme le rappelle Stephen R.Covey, auteur américain :
La plupart des gens n’écoutent pas avec l’intention de comprendre ; ils écoutent avec l’intention de répondre.
Écouter est un processus actif où le message est non seulement reçu, mais aussi compris et valorisé. Notre manager entend-il notre besoin de reconnaissance ? Notre collaborateur entend-il que sa demande n’est pas recevable ?
Le feedback est également un outil essentiel pour nourrir la relation managériale. Lorsqu’il s’agit de bien être au travail, chacun voit midi à sa porte. Et nous avons tendance à projeter nos propres besoins sur les autres. Je suis manager et j’aime être challengé ? Je vais faire de même avec mon collaborateur. Ou inversément. Savoir se dire les choses permet de s’ajuster et de progresser ensemble. À condition de le faire avec tact : exposer les faits, formuler son ressenti, expliciter les conséquences et proposer des pistes de solutions. L’intention positive est la clé ici, car nos pensées influencent inévitablement nos actions.
Enfin, construire une relation managériale solide passe par la confiance. Elle favorise un climat où chacun peut s’exprimer en toute sécurité, où les actes et les paroles sont cohérents. La confiance demande transparence, soutien mutuel et respect des engagements. Elle se construit dans la réciprocité, et demande à chacun de se poser une question fondamentale : suis-je digne de confiance ?
Cet article est une invitation à investir sur l’essentiel : la qualité de la relation entre managers et collaborateurs. Un basique largement oublié ces dernières années, éclipsé par les baby foot et autres solutions-pansements.
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