TPE, PME, grands comptes, toutes les entreprises vont pouvoir bientôt recevoir des conseils en matière d’ingénierie de la formation de la part de leur OPCA, organisme paritaire collecteur agréé. En effet, la loi du 24 novembre 2009 a changé la donne puisqu’elle stipule que ces organismes, collecteurs-redistributeurs à l’origine, vont être amenés à jouer un rôle de développement et d’ingénierie de la formation afin de faciliter la mise en place de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) au sein des entreprises. Le terme adéquat a employé depuis les ordonnances Macron de 2017 est celui de GEPP (gestion des emplois et des parcours professionnels).
L’entreprise va avoir besoin de ressources et le capital humain doit désormais être privilégié, valorisé, développé. Les discours sont unanimes et des actions ont été entreprises pour miser dans un futur très proche sur CE capital humain ! Les pouvoirs publics ont décidé de donner en partie la main aux OPCA pour aider les entreprises à mette en place leur Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences (GPEC). Un changement qui engendre de nombreuses conséquences. Lors de la table ronde, organisée le 20 janvier dernier par la CRCI du Nord pas de Pas de Calais, en partenariat avec le Master management des Ressources Humaines, les modifications engendrées par la loi du 24 novembre 2009 sur le fonctionnement des OPCA ont été abordées. Etaient présents autour de la table ronde, Philippe Bernier, Docteur en droit, spécialiste de la formation, Directeur de Caraxo, Martial Bouton, Président d’OPCALIA Nord Pas de Calais, Bénédicte Decoster, Responsable Métiers et Compétences, Redcats, et David Lefebvre, Directeur de la relation client, Santexcel Creafi.
Plusieurs points ont été soulevés :
– L’augmentation du seuil minimum de collecte de fonds qui entrainera la réduction de leur nombre de 98 actuellement à une quinzaine (prévisions).
– Les attributions des OPCA sont passées, au fur et à mesure des réformes, d’un organisme de financement, à un rôle de développement et d’ingénierie de la formation pour devenir une partie prenante en matière de gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences. Cette dernière évolution se fera progressivement pour être effective en 2012.
– La réforme renforce la proximité avec les entreprises par la prise en compte de leurs plans de formation (réparties selon les classes suivantes : 1-10 salariés, 11-50 et plus de 50).
– L’aspect sectoriel de ces organisations va disparaitre.
Les étudiants du Master Management des Ressources Humaines de Lille, qui ont participé aux débats, résument les propos : « Le champs d’action des OPCA se voit modifié. A ce propos, Martial Bouton, administrateur de OPCALIA Nord-Pas de Calais, dit « s’être préparé en repérant les bonnes pratiques, notamment sur la sécurisation des parcours professionnels ».Philippe Bernier, souligne la nécessité de répondre au besoin des entreprises et donc de développer les compétences des conseillers de formation en terme de GPEC, d’ingénierie de formation et de droits des sociétés et des affaires. En effet, les relations entre conseillers et entreprises devront s’adapter aux spécificités de chacune (cadre légal, conventionnel, etc…). La mise en place du Fonds Paritaire de Sécurisation des Parcours Professionnel (FPSPP), financé par 13% de l’effort de formation des entreprises, à pour vocation d’apporter les moyens d’améliorer la qualification des publics prioritaires. La récupération de ces fonds devra être mise en place en partenariat avec l’OPCA afin de développer les outils et modalité de financements des actions de formations concernées. » Au niveau des entreprises, l’impact de a réforme pousse aux réflexions suivantes : « L’apparition de l’évaluation des résultats de la formation sur l’attestation délivrée à la fin de celle-ci, la répartition des formations selon deux catégories, la première découlant de l’obligation de l’entreprise (adaptation et maintien au poste, dans le cadre du temps de travail) et la seconde de sa responsabilité, à savoir la gestion prévisionnelle des compétences, et le versement de 13% de l’effort de formation pour financer le FPSPP. »
Aider les TPE et les PME
La réforme vise à faciliter, l’accès et l’accompagnement dans l’organisation et l’élaboration du plan de formation, notamment des petites et moyennes structures. Isabelle Vray, directeur Opcalia Rhône-Alpes et Bourgogne explique : « Les OPCA vont avoir un rôle d’accompagnateur pour la mise en place de la GPEC. Nos salariés vont devoir se pencher sur des problématiques RH, de compétences, de formation car il faudra aider les entreprises à mener une réflexion compétences et métiers. Dans mon équipe, j’ai déjà recruté depuis deux ans trois anciens DRH. » Elle rassure les organismes de conseil et de formation : « Nous ne nous positionnons pas en concurrents des cabinets de conseil. L’Opcalia Rhône-Alpes gère 40 000 entreprises dont 82% ont moins de 50 salariés. Les TPE et PME ne vont pas d’elles-mêmes chercher du conseil auprès d’un cabinet ou d’un organisme de formation. Notre rôle est de décortiquer les besoins et de faire un travail de conviction auprès de l’entreprise. Nous nous situons bien en amont du consulting car nous donnons seulement des éléments d’information. Nous parlons beaucoup d’individualisation des parcours de formation mais combien d’entreprise ont mené à l’heure actuelle une réflexion sur leurs métiers et besoins ? »
Du côté de la FFP (Fédération de la Formation Professionnelle), Marie-Christine Soroko, déléguée générale, a tiré pourtant la sonnette d’alarme lors de la conférence de presse sur les résultats de l’Observatoire Economique : « Nous restons vigilants aux évolutions en matière de regroupement, la prise en charge des financements et la collecte des OPCA. Sur quel budget se fera le rôle de conseil des OPCA ? Cela soulève la question du respect de la concurrence et de l’égalité de traitement. Les OPCA vont-ils à terme facturer leurs prestations aux entreprises ou se rémunérer sur la collecte des fonds prévus pour la formation ? Il va falloir clarifier les modalités de fonctionnement. » En outre, les organismes de formation craignent que les OPCA, au-delà de leur rôle de conseil, ne deviennent des prescripteurs de formation. Dans ce cas, certains organismes de formation risqueraient d’être favorisés au détriment d’autres et les entreprises moins libres de leur choix. La réponse finale sur le nombre et le rôle des OPCA aura lieu le 31 décembre 2011. Les regards de tout bord sont très attentistes.
Christel Lambolez