Le site Jobmultipass.com n’est ni un jobboard, ni un réseau social, mais un nouveau mode de rapprochement entre candidats et employeurs. Il permet aux recruteurs de recevoir gratuitement des candidatures spontanées et aux candidats d’envoyer leur CV en masse selon un principe de « Pass » payant par secteur, région, métier, langue, pays et/ou aux cabinets de recrutement.
« Une machine à envoyer des CV »
C’est ainsi que se décrit Jobmultipass. « Nous sélectionnons les entreprise sur la base de leurs besoins, grâce à notre logiciel Top Finder, qui scanne les offres des sites des entreprises et des cabinets de recrutement. Nous avons, en permanence, entre 35 et 42 000 recruteurs », explique Jean-François Stopar, dirigeant de Jobcast, qui édite le site en question. La nouveauté : Jobmultipass ne met pas en lien un profil et une offre, mais un candidat et un potentiel employeur. Autre innovation, qui a déjà récolté son lot de commentaires : le fait que ce soit au candidat, et non au recruteur, de mettre la main à la poche.
Le prix d’un « Pass » Région, Secteur ou Métier, qui ouvre droit à l’envoi de 300 candidatures, s’élève à 9€90. Le candidat prêtera attention au nombre de recruteurs répertoriés pour chaque catégorie. Le Pass Secteur « Mécanique/Travaux des métaux » ne compte qu’un seul recruteur, donc un seul envoi. A l’opposé, le Pass Région « La Défense » en compte 994 et ne vaut que pour 300 envois. Plus onéreux, les Pass Premiums « Pays » et « Langues » coûtent 14€90 l’unité et le Pass « Cabinets de recrutement », 19€90. Ce dernier permet d’envoyer 350 candidatures. « Nous souhaitons tenir un tarif abordable pour le candidat. Certains profils ne sont pas à 200€ près et sont prêts à payer pour plusieurs Pass », précise Jean-François Stopar.
Au-delà du prix en lui-même, qu’il soit jugé abordable ou non, le seul fait de faire payer le candidat et non le recruteur reste inhabituel sur le marché des jobboards. « La valeur de la prestation au profit du candidat est largement supérieure au coût. Il y gagne en temps et argent car il n’a pas besoin de trouver lui-même les recruteurs et leurs adresses, ni d’acheter un fichier de contacts », répond le dirigeant de Jobcast. Certains clients ne sont pas de cet avis : « j’ai dépensé une quarantaine d’euros pour 4 Pass Région et n’ai reçu qu’une quinzaine de réponses, sur plus de 1000 candidatures spontanées. Ca a été une perte de temps et d’argent », témoigne l’un d’entre eux, qui préfère rester anonyme. « Je me suis suffisamment discrédité vis-à-vis des potentiels employeurs », justifie-t-il.
Le site affiche une moyenne de 54 réponses par candidat sur 500 CV envoyés. « Ces 54 réponses, ce sont 54 adresses de recruteurs, insiste Jean-François Stopar. Et 25% des candidats reçoivent un appel dans la semaine qui suit ». Selon lui, il faut considérer cet investissement sur le long terme, comme l’occasion de grossir son carnet d’adresses et son réseau. « C’est une arme redoutable pour construire sa recherche d’emploi », affirme-t-il.
Et côté recruteur ? La machine à envoyer des CV est moins infernale. « Les candidatures lui sont servies sur un plateau d’argent, en un seul mail, nominativement et avec un mot d’accompagnement », explique le dirigeant de Jobcast. Les recruteurs sont préalablement prévenus et peuvent se désinscrire. D’après Jobmultipass, le taux de désinscription est quasi-nul. Ce n’est donc pas la fréquence des mails qui peut être dérangeante mais l’inadéquation entre les potentiels postes et les profils. D’une part, il s’agit de candidatures spontanées ; d’autre part, Jobmultipass ne fait pas de matching. « Il y a en effet un taux de candidatures inadéquates plus important que lorsque l’entreprise passe une annonce », admet Jean-François Stopar.
Un outil critiqué mais complémentaire
Pour trouver un emploi, il y a trois démarches : répondre à des petites annonces, activer son réseau et faire des candidatures spontanées. C’est sur ce troisième volet que Jobmultipass s’est positionné. Une innovation sur le marché de l’emploi en ligne français. L’achat d’un Pass n’en demeure pas une solution miracle et immédiate pour le candidat. Selon Jean-François Stopar lui-même, il faut considérer cette démarche « comme un bonus, un coup d’accélérateur qui vient compléter la recherche d’emploi ». Le site compte aujourd’hui plusieurs milliers de candidats. « Nous rencontrons un succès particulier auprès des cadres, complète le dirigeant, qui ont compris l’intérêt de faire savoir qu’ils sont disponibles ».
Pour le recruteur également, Jobmultipass s’affiche comme un complément dans sa recherche de compétences. S’il peut s’y abonner gratuitement, c’est en fonction des offres qu’il publie sur les différents jobboards ou sur son propre site qu’il est identifié. Le modèle Jobmultipass apparaît particulièrement intéressant pour les chasseurs de têtes et les cabinets de recrutement.
« J’ai fait appel à Jobmultipass pour envoyer ma candidature aux cabinets de recrutement, témoigne un autre client. Il me semblait que ce serait plus rapide et plus efficace que de chercher moi-même les adresses de tous les cabinets. Mais j’ai été déçu par le peu de réponses valables ». Le porte-parole du site comprend bien la déception qui anime certains des candidats. « Cinq réponses sur 70 candidatures, c’est vrai, c’est peu, mais c’est la dure loi du marché de l’emploi. Les recruteurs ne prennent plus la peine de répondre. Ils sont payés à l’embauche », rétorque-t-il. Ce même candidat avait également opté pour un Pass Métier et n’a reçu, au total, qu’une vingtaine de réponses, incluant beaucoup de messages d’erreur : « adresse invalide, la personne n’est plus dans l’entreprise, le poste est pourvu… », énumère-t-il. Jean-François Stopar affirme que la mise à jour est quotidienne et, si des erreurs peuvent se glisser, elles restent selon lui bien rares. Le premier client que nous citions plus haut, en recherche d’une opportunité de directeur marketing, s’est vu proposé des postes de commercial ou de visiteur de chantier. « La plupart des réponses n’avaient aucun rapport avec mon CV », regrette-il.
Malgré les critiques, Jobmultipass n’en demeure pas moins une démarche intéressante de par sa gratuité, notamment pour les petites/moyennes entreprises, ainsi qu’un outil innovant pour les candidats, à condition d’apprendre à le manier. Comme pour toute candidature spontanée, il faut cibler au mieux sa recherche. Le Pass Métier donne lieu à un nombre d’envois moindre qu’un autre Pass mais se révèle plus précis. Pour une recherche plus large, mieux vaut privilégier un Pass Secteur ou Région, au risque de recevoir des propositions qui ne correspondent pas au profil de la candidature.
Typhanie Bouju