Épée de Damoclès au-dessus de la tête des employeurs, le délit d’entrave est une infraction pénale, dont les conséquences peuvent être lourdes pour l’entreprise. Il est toutefois facile de limiter ce risque en adoptant de bons réflexes, notamment un respect scrupuleux des règles encadrant le fonctionnement des instances représentatives du personnel (CSE, délégués syndicaux, salariés protégés, etc.).
Tout savoir sur le délit d’entrave pour mieux l’éviter et favoriser des relations saines avec vos IRP.
Le délit d’entrave : de quoi s’agit-il ?
Définition générale
Le délit d’entrave est une méconnaissance des règles encadrant les instances représentatives du personnel : mise en place, fonctionnement et protection des représentants du personnel.
Cette infraction pénale est constituée même si la personne poursuivie (souvent le dirigeant de l’entreprise, nous y reviendrons) n’a pas intentionnellement voulu empêcher le bon fonctionnement de l’institution. Il suffit qu’elle ait commis volontairement l’action ou l’omission répréhensible (absence de convocation aux réunions, pas de mise à disposition d’un local…).
Comportements constitutifs d’un délit d’entrave
Le délit d’entrave est constitué notamment dans les cas suivants :
- Représentation syndicale : entrave à l’exercice du droit syndical (C. trav. art. L 2146-1).
- Instances élues du personnel :
- CSE : absence de constitution d’un CSE, entrave à son bon fonctionnement (art. L 2317-1).
- Entrave à l’obligation de constituer un comité de groupe, de désigner ses membres ou d’assurer son fonctionnement régulier (art. L 2335-1) ;
- Entrave à la constitution, à la libre désignation des membres ou au fonctionnement du comité d’entreprise européen, du comité de la société coopérative européenne ou du comité de la société issue d’une fusion transfrontalière (art. L 2346-1, L 2365-1, L 2375-1).
- Statut protecteur des salariés : violation des règles protégeant les représentants du personnel.
- Mandats externes des salariés : porter atteinte ou tenter de porter atteinte à la libre désignation des candidats au conseil des prud’hommes, à leur indépendance ou à l’exercice de leurs fonctions (art.L 1443-1).
Quelques exemples :
Le délit d’entrave peut se traduire par les comportements (actions ou omissions) suivants : absence de convocation aux réunions ou convocation irrégulière, transmission d’informations tardives ou fausses, absence d’organisation des élections, non paiement des heures de délégations, licenciement sans respecter la procédure d’autorisation préalable auprès de l’inspection du travail…
Les sanctions encourues
Qui est pénalement responsable du délit d’entrave ?
En principe, c’est le dirigeant de l’entreprise et/ou la personne morale employeur qui est responsable pénalement du délit d’entrave.
Il est toutefois possible de s’en exonérer en mettant en place une délégation de pouvoir.
Plusieurs limites toutefois à cette délégation :
- Elle n’exonère par le dirigeant s’il a participé personnellement à la réalisation de l’infraction ou s’il est au courant des infractions commises
- Le dirigeant reste responsable à l’égard du CSE des mesures relevant de son pouvoir propre de direction
Les salariés peuvent également être poursuivis, même sans délégation de pouvoirs, s’ils ont personnellement commis des actes constitutifs d’un délit d’entrave. Par exemple : un chef de service s’opposant au déplacement d’un délégué syndical.
Les sanctions pénales
Voici les peines maximales encourues pour un délit d’entrave. À noter que ces sanctions sont doublées en cas de récidive.
Personne physique | Personne morale | |
Délit d’entrave à l’exercice du droit syndical | 1 an d’emprisonnement et 3 750 € d’amende | Amende de 18 750 € |
Délit d’entrave à la constitution des instances représentatives du personnel et à la libre désignation de leurs membres | 1 an d’emprisonnement et 7 500 € d’amende | Amende de 37 500 € |
Atteinte au fonctionnement régulier des IRP | Amende de 7 500 € | Amende de 37 500 € |
Rupture du contrat d’un salarié protégé sans respecter la procédure d’autorisation administrative | 1 an d’emprisonnement et 3 750 € d’amende | Amende de 18 750 € |
Atteinte à l’exercice des fonctions du conseiller prud’homal | 1 an d’emprisonnement et 3 750 € d’amende | Amende de 18 750 € |
Absence de bilan social (non établissement ou non présentation) | Amende de 7 500 € | Amende de 37 500 € |
À ces sanctions du délit d’entrave peuvent s’ajouter d’autres conséquences financières. Par exemple la réintégration du salarié licencié sans autorisation ou le versement d’indemnités en réparation de son préjudice (au moins 6 mois de salaire) et pour violation de son statut protecteur.
Céline Le Friant