Les congés illimités peuvent séduire de nombreux collaborateurs et sonner comme un véritable slogan en faveur de votre marque employeur.
C’est vrai, le concept est séduisant au premier abord. Notamment en ce qu’il favoriserait la Qualité de Vie et des Conditions de Travail (QVCT) des collaborateurs qui en sont bénéficiaires.
Largement déployé au sein de la Silicon Valley, certaines entreprises françaises ont elles aussi franchi le pas.
« Netflix est une entreprise motrice dans ce domaine », expliquait Alain d’Iribarne, Directeur de Recherche Honoraire au CNRS. Un dispositif qui favoriserait la responsabilisation des collaborateurs, mais qui a aussi ses limites.
Les éclairages de myRHline.
Congés illimités : de quoi s’agit-il ?
L’objectif des congés illimités ? Laisser aux collaborateurs la possibilité de fixer eux-mêmes leur nombre de jours de congés payés dont ils souhaitent bénéficier. Les salariés sont ainsi libres de fixer ces jours au-delà même des 5 semaines légales.
En effet, certains accords collectifs autoriseraient plus de congés que ce minimum légal. C’est notamment le cas chez Letsignit. Mais, parfois, certains vont jusqu’à prévoir ces fameuses vacances illimitées.
Si certaines entreprises autorisent leurs salariés à prendre un nombre indéfini de congés, ce n’est pas sans conditions. Les collaborateurs qui souhaitent bénéficier de ce dispositif doivent d’abord remplir les objectifs de travail fixés par l’employeur.
En revanche, les congés illimités présentent un certain nombre d’avantages non négligeables, notamment en matière de QVCT. Le salarié peut être rassuré dans son quotidien professionnel, car il sait qu’il peut prendre un congé à tout moment s’il en ressent le besoin. Ce qui peut venir réduire son stress et prévenir les RPS en entreprise, ainsi que les risques de burn out associés.
Et du côté des professionnels des ressources humaines ?
Les congés illimités peuvent constituer un levier d’attractivité pour attirer les talents. Chez Supermood, 72 % des nouveaux employés affirmeraient que ces vacances illimitées ont été déterminantes dans leur choix de rejoindre l’entreprise.
D’autre part, ce type de mesure pourrait bien favoriser l’engagement collaborateur et leur fidélisation.
Enfin, ce dispositif pourrait bien être un véritable levier de performance. Les jours de congés illimités impliqueraient de mettre en place une certaine culture du résultat dans l’entreprise et d’encourager l’investissement des salariés dans la poursuite des objectifs fixés (qu’ils soient individuels ou collectifs).
Depuis le lancement des « vacances ilimitées » chez Supermood, plateforme dédiée au bien-être des salariés, le chiffre d’affaires a été multiplié par 9, selon Kevin Bourgeois, Président et Cofondateur de la plateforme.
Vacances illimitées et QVCT : quelle réalité ?
Les collaborateurs travaillant chez Supermood utiliseraient en moyenne un peu plus de 7,2 semaines par an. “Avec un écart type compris entre 5,5 semaines (2 personnes) et 11,5 semaines (2 personnes également)”, note le portail d’offres d’emploi Cadre Emploi.
Ces vacances illimitées requièrent le respect de 2 conditions :
- Un délai de prévenance proportionnel au nombre de journées posées doit être fixé (sauf cas d’urgence). Le manager doit être informé une semaine en amont pour un jour d’absence. Pour 10 jours de vacances, il doit être informé 2 mois à l’avance afin que toutes les équipes puissent s’organiser.
- Respecter les objectifs fixés : si cela n’est pas fait, le manager a la possibilité de rejeter la demande et de revoir les attendus du salarié avec ce dernier. Chez Supermood, il y a eu 2 cas en la matière : « Avec un salarié, on a remis les pendules à l’heure et maintenant ça roule. Avec l’autre, le refus d’absence a déterré de vieux sujets de conflit, il a finalement quitté la boîte. »
Et comme dans chaque dispositif séduisant mis en place, les congés illimités peuvent avoir un certain nombre d’effets pervers.
On vous explique tout de suite pourquoi.
Les limites d’un dispositif qui séduit
Lorsque les mesures ne sont pas bien organisées, que les règles instaurées ne sont pas claires pour tous, cette disposition peut avoir comme conséquence l’absentéisme de certains employés. Ce qui peut affecter le bon fonctionnement (et la performance) des équipes et de l’entreprise.
À l’inverse, les congés illimités peuvent aussi avoir comme effet pervers la culpabilisation des employés. C’est pourquoi l’entreprise CharlieHR a par exemple mis fin à cette politique (à ce propos, lire le billet de Ben Gateley, PDG de CharlieHR : We tried unlimited holiday for three years. Here’s everything that went wrong).
La tranquillité d’esprit est toute relative puisqu’elle peut avoir l’effet inverse et déclencher du stress.
Samuel Durand, auteur et producteur du documentaire Work in Progress sur le futur du travail, expliquait qu’une forme de pression sociale peut se former en ce sens, empêchant la mesure de fonctionner (malgré ses avantages). Les congés étant potentiellement illimités, mais les salariés ne savaient pas combien de jours prendre et craignaient d’être dans une forme d’abus.
En résumé, les collaborateurs hésitent à s’absenter et peuvent même prendre encore moins de congés qu’auparavant. Le risque ? Ne pas parvenir à déconnecter, avec toutes les conséquences psychosociales que l’on connaît.
« Pour que cela fonctionne, il faut manager les équipes par le résultat et pas par les moyens et le temps passés au travail », insiste Kevin Bourgeois, qui défend corps et âme les organisations de travail alternatives.
Malgré leurs avantages, adopter les congés illimités peut s’avérer risqué pour les entreprises qui n’auraient pas pour culture d’entreprise celle de l’autonomisation et de la responsabilisation des employés.
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