Pascale Kroll est fondatrice de RH Advisor, premier comparateur de professionnels du recrutement sur internet. Avec Gwenole Guiomard, journaliste spécialisé dans les Ressources Humaines, elle vient de coécrire la huitième édition du « Guide des professionnels du recrutement », paru en février dernier aux éditions du Management. Rencontre.
Quelle a été l’évolution du « recrutement », ces dernières années ?
La conjoncture, notamment les crises économiques successives, ont fortement modifié la pratique. Les délais de recrutement sont désormais plus longs, les entreprises sont de plus en plus indécises et les candidats sont, de leur côté, moins mobiles. De plus, les entreprises tendent à internaliser leur démarche de recrutement. Certaines ont structuré des équipes de chercheurs de têtes au sein de leur entité. Elles ne passent donc plus nécessairement par des cabinets de recrutement. D’ailleurs, ces derniers reconnaissent une baisse de leur nombre de missions. Aujourd’hui, les entreprises pensent que les jobboards et les réseaux sociaux peuvent se substituer aux prestataires de recrutement. Or, selon moi, ils sont complémentaires, répondent à une demande différente. Ce sont surtout des outils précieux pour ces professionnels.
Comment les cabinets de recrutement s’adaptent-ils à cette évolution ?
Aujourd’hui, l’offre est plus riche et le panel de possibilités pour les entreprises beaucoup plus important. La crise ayant obligé les cabinets à revoir leur stratégie, il y en a désormais pour tous les goûts, tous les besoins et toutes les bourses. Certains ne proposent, par exemple, que du sourcing, d’autres travaillent sur les recrutements en masse, ne réalisent que des entretiens de recrutement téléphoniques, visent une politique low-cost,… L’un des intérêts de passer par un cabinet de recrutement est de bénéficier d’une garantie de remplacement du candidat lorsque le recrutement n’est pas entériné. Cette garantie se fait généralement sur la période d’essai. Pour se différencier, coûte que coûte, certains cabinets ont choisi d’offrir cette garantie jusqu’à une ou deux années après le recrutement ! Crise oblige, d’autres cabinets choisissent pour leur part, de s’accorder les bonnes grâces des entreprises en se faisant payer au succès (politique du contingency), parfois même sans exclusivité. Cela était encore inconcevable en 2008. Autre tendance, les cabinets se déclarent « multi-spécialistes », plutôt que généralistes. Cela rassure les entreprises : elles préfèrent choisir un prestataire connaissant bien leur métier. Les cabinets ont également bien compris qu’il leur fallait différencier leur offre de celle des jobboards et réseaux sociaux en mettant l’accent sur le conseil. Leurs prestations de coaching, évaluation(…), leur permettent d’être ainsi moins soumis aux aléas de l’activité recrutement. Enfin le management de transition étant en plein développement, les cabinets entièrement dévolus à cette activité se multiplient. Parallèlement, certaines entités de recrutement ont créé des départements exclusivement consacrés à ce type de profils.
Face à toutes ces possibilités, comment bien choisir son cabinet de recrutement ?
Il faut déjà bien définir qui vous souhaitez recruter. Selon votre réponse à certains critères (secteur d’activité, mission à pouvoir, rémunération du candidat, budget alloué à la recherche du/des candidat(s)), vous vous tournerez vers des professionnels bien différents. Des outils, à l’instar de RH Advisor (www.rhadvisor.com), comparateur de cabinets de recrutement, de chasseurs de têtes, d’agences d’intérim, de cabinets de management de transition (…) peuvent accompagner, gratuitement, les entreprises dans cette recherche. Il y a aussi le bouche-à-oreille, la réputation, la façon dont les cabinets prennent soin de leurs candidats. C’est important car cela peut avoir des répercussions sur l’image de l’entreprise-cliente. Le rapport avec le consultant est également essentiel. Comme dans tout rapport humain, la question du feeling est inhérente au choix du cabinet.
Le « Guide des professionnels du recrutement », qui répertorie 1100 cabinets dédiés au recrutement, se veut « critique et indépendant ». Comment avez-vous travaillé pour l’élaborer ?
Parmi tous les cabinets dédiés au recrutement que nous avons répertoriés, les cent premiers (66 % du marché en nombre de missions) ont fait l’objet de rencontres et d’échanges. Nous les avons interrogés, un à un, en suivant une trame d’interview bien définie afin de nous permettre de connaître leurs modes de fonctionnement et leur façon de travailler. Parmi nos questions, outre celles liées au chiffre d’affaires, au nombre de missions, de consultants, de chargés de recherche (…): comment concevez-vous votre métier ? Quel regard portez-vous sur la profession ? Comment accompagnez-vous vos candidats ? Quel est votre processus de recrutement ? Quel est votre mode de rémunération ? Travaillez-vous aux résultats ? En exclusivité ? Quels sont vos interlocuteurs au sein des entreprises ? Qu’est-ce qui vous différencie de la concurrence ? Comment sont payés vos consultants – car la démarche n’est pas nécessairement la même selon leur mode de rémunération – ? (…). Outre ces interviews, nous nous sommes appuyés sur le regard que portent sur eux leurs clients, les candidats (…), soit leur écho sur le marché.
Gerald Dudouet