Fournisseurs et consultants ont développé une fâcheuse habitude : s’emparer de tout nouveau mot à la mode et l’appliquer à leurs offres. Le Big Data existe bel et bien, il ne cesse de se développer. Mais gare aux utilisations dévoyées du concept.
Thomas Davenport, l’un des spécialistes mondiaux de l’analyse de données business et du Big Data met les entreprises en garde, de manière explicite : « L’expression Big Data », explique-t-il, « est employée pour faire référence à toute utilisation de l’analyse de données ou, dans les cas extrêmes, à la production de rapports et à l’informatique décisionnelle classiques.»
« Publicités, ouvrages et articles fleurissent », ajoute Thomas Davenport, mais attention : « Si ce qui vous interpelle fait référence à la prise de décision fondée sur des données ou à l’analyse classique, vous êtes en train d’étudier des idées certes utiles et précieuses, mais pas particulièrement nouvelles »[1]. Au-delà du « buzz » que génère le Big Data, l’intérêt réside dans les applications concrètes plutôt que dans le discours.
Le Big Data, ou la méta-analyse
Le véritable sens de l’expression est bien connu des scientifiques, qui n’ont pas attendu l’économie numérique pour s’y intéresser : une méta-analyse est une démarche statistique combinant les résultats d’une série d’études indépendantes sur un problème donné. La méta-analyse permet une analyse plus précise des données par l’augmentation du nombre de cas étudiés. Ce changement d’échelle permet de tirer une conclusion globale. Le but de la méta-analyse est de mettre en commun toutes les données pertinentes dans une étude. Au sens littéral, chaque méta-analyse compose ainsi « le plus grand ensemble de données de qualification sur un sujet. »
De nombreuses méta-analyses ont été réalisées afin de mesurer la prédictivité des méthodes et outils de sélection en recrutement, depuis de nombreuses années. Dans ce champ précis, le Big Data n’est pas une inconnue.
La prédictivité au cœur de l’évaluation RH depuis plusieurs décennies
E. P. Prien, J. S. Schippmann et K. O. Prien[2] ont mis l’accent sur plusieurs résultats de recherches dont les résultats convergent : l’évaluation cognitive est le meilleur indicateur de la performance au travail. Des chercheurs de premier plan dans le domaine de la personnalité, comme Barrick et Mount[3], ont découvert que la personnalité augure de façon constante de la performance au travail à tous niveaux, de l’ouvrier spécialisé jusqu’au cadre de haut niveau. Une méta-analyse de Schmidt et Hunter[4] a révélé que l’utilisation combinée d’une évaluation des aptitudes intellectuelles et de la personnalité donne les meilleurs résultats en termes de validité prédictive. Enfin, plus récemment, la méta-analyse de Gonzalez-Mulé et Mount[5] confirme que l’évaluation des aptitudes intellectuelles est incontestablement le meilleur prédicteur de la performance au travail. Quant à la personnalité, au-delà de prédire le comportement au travail, son évaluation permet de repérer les personnes qui pourraient avoir un comportement « contre productif ».
Quel sens donner à la mesure de la validité prédictive ?
La question soulevée par le Big Data est au fond celle de l’amélioration de la prédictivité, tout particulièrement en ressources humaines. L’amélioration et la mise à jour des solutions d’évaluation ou test psychométrique (tests d’aptitudes, inventaires de personnalité) est une ardente obligation pour un éditeur de tests s’appuyant sur la R&D. Comme tout instrument de mesure, les tests doivent prouver la qualité de leur conception : ils doivent offrir un niveau de garantie élevée aux utilisateurs. L’ennemi du test, c’est l’aléa. Mais il est parfaitement possible de connaître le niveau de fiabilité d’un test. Par construction statistique, les tests se prêtent au calcul de trois indices clefs de qualité : la fidélité, la validité et la sensibilité. Indices de qualité soutenus et défendus par l’Association des Editeurs de Tests.
Prédictivité et Big Data aux ECPA : des solutions sur mesure, dans des contextes maîtrisés d’accès aux données
Le savoir-faire des ECPA offre la possibilité d’explorer et d’exploiter les données recueillies par les entreprises afin de proposer des études de validité : convergente, criterielle, prédictive, de performance, etc.
Ces études, qui peuvent être réalisées au niveau international dans différents pays, ont pour objectif de conforter les recruteurs dans le choix des tests pour leur process de recrutement. L’appartenance des ECPA au groupe Pearson permet un accès large à des données multi-pays. Dans un contexte donné, l’usage de méta-analyses et l’accès au Big Data peut avoir un sens pour l’entreprise. En la matière, il n’existe pas de solution toute-faite : les données pertinentes sont à définir et qualifier avec les ECPA en fonction de l’objectif poursuivi.
A titre d’exemple, le CTA (test d’aptitude évaluant la pensée critique) a fait l’objet d’une récente étude de prédictivité dans un cabinet juridique. La performance a été évaluée au cours des deux années qui ont suivi le recrutement. Les personnes qui ont obtenu les plus hauts niveaux de performance sont les personnes dont les résultats au CTA étaient les plus élevées au moment du recrutement. Cette étude confirme donc que les résultats au CTA permettent de prédire le niveau de performance dans la réalisation de tâches en lien avec le poste. En fonction des données accessibles dans l’entreprise, de telles études peuvent être menées de manière ad hoc.
Le Big Data au service de métiers et de fonctions spécifiques : comment mettre en perspective la personnalité et les compétences professionnelles ?
On peut concevoir et définir les compétences comme des comportements potentiels, orientés vers une finalité, et soutenus par des connaissances, des habiletés, des valeurs et des attitudes. Si ces dernières décennies, des psychologues travaillant sur les différences interindividuelles ont consacré leurs recherches à l’étude de modèles permettant de décrire l’ensemble de ces différences (les traits de personnalité et leur structure, par exemple), les professionnels des RH se sont centrés sur les compétences et les modèles qui les organisent. Il est, dés lors, important de disposer d’un modèle conceptuel solide articulant les traits de personnalité liés au travail et les modèles de compétences.
Les ECPA ont ainsi développé des rapports de compétences spécifiques à certaines fonctions à partir de l’inventaire de personnalité et de valeurs SOSIE 2nd GENERATION : le rapport Fonction managériale et le rapport Fonction commerciale. Des études statistiques menées sur des milliers de personnes ayant passé SOSIE 2nd GENERATION et un travail de définitions des compétences réalisé par un groupe d’experts a permis de mettre en lien les traits de personnalité et le système de valeurs de SOSIE 2nd GENERATION avec les compétences requises pour ces fonctions. Des comparaisons ont été réalisées entre différents échantillons dont les niveaux de compétences attendus diffèrent, par exemple entre des managers et des non managers ou encore entre l’échantillon général et le groupe de commerciaux. Sur la base des intercorrélations, les compétences pertinentes ont été sélectionnées et affinées.
Dès à présent, un modèle de compétences plus large est en cours de développement. Il offrira aux recruteurs la possibilité de sélectionner les compétences compte tenu des caractéristiques d’un poste mais aussi – et cette dimension est nouvelle – de l’environnement dans lequel le poste sera proposé.
En définitive, la principale valeur du Big Data en matière de recrutement provient de l’ajout de nouvelles sources à des modèles explicatifs et prédictifs. Si les recruteurs disposent de données sur les prévisions de réussite sur un poste, ils peuvent les améliorer en ajoutant des informations sur le poste (compétences, motivations, environnement), sur les indicateurs de performance, etc. Le point essentiel est d’aborder les sujets sans a priori, à la recherche de nouvelles sources d’informations qui aideront dans la prise de décision à partir du moment où celles-ci sont correctement analysées !
[1] Thomas Davenport, Stratégie Big Data, traduit de l’anglais par Hervé Soulard, PEARSON, 2014, p.8
[2] Prien, E.P., Schippmann, J.S., & Prien, K.O. (2003). Individual assessment as practiced in industry and consulting, Mahwah, NJ:Erlbaum, p. 55.
[3] Murray R. Barrick, Michael K. Mount, (2006). The Big Five Personality Dimensions and Job Performance : a meta-analysis
[4] Schmidt, Frank L.; Hunter, John E. (1998). The validity and utility of selection methods in personnel psychology: Practical and theoretical implications of 85 years of research findings, Psychological Bulletin, Vol 124(2), 262-274
[5] Gonzalez-Mulé E, Mount MK, & Oh IS (2014). A Meta-Analysis of the Relationship Between General Mental Ability and Nontask Performanc,. The Journal of applied psychology
Leaders depuis plus de 60 ans de l’évaluation psychologique, les ECPA, filiale du Groupe PEARSON, apportent aux professionnels RH des solutions destinées à étayer et fiabiliser les processus de sélection, de mobilité, de fidélisation et de développement des collaborateurs dans les entreprises.
Si vous êtes intéressé(e) par des études de validité prédictive mettant en lien l’utilisation de solutions d’évaluation (aptitudes, personnalité) avec la performance, merci de contacter Carole Fortier, Responsable R&D, à [email protected]
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