L’évolution du marché français en matière de serious game s’est révélée moins forte que ne l’avaient imaginé les spécialistes de la formation, même si la France reste le pays Européen le plus dynamique dans ce domaine. Encore peu développé pour la formation en entreprise, l’intérêt des responsables formation pour ce type d’outils est néanmoins grandissant. Les 8 et 9 novembre dernier, l’Academic eLearning Forum a d’ailleurs inauguré sa première édition en réunissant des professionnels internationaux du e-Learning pour une série de conférences et tables rondes inédites en France.
L’apport des serious games
S’il n’est pas nouveau d’utiliser le jeu en matière de formation, «il n’est pas, non plus, récent d’apprendre grâce à une machine », explique Hélène Michel. « En 1924, il y a eu une première machine à apprendre : la drum tutor. Le principe était de responsabiliser l’apprenant dans l’apprentissage, ne pas faire porter la responsabilité uniquement sur l’enseignant, et créer une interactivité. »
Hélène Michel, titulaire d’un doctorat sur le e-management public, dirige une équipe de recherche sur le thème Simulation & Innovation. Les travaux portent notamment sur l’évaluation de la performance des serious games, l’usage pour la créativité ou le management des connaissances. Elle conduit actuellement plusieurs expérimentations avec l’équipe de Daesign sur l’adoption et la performance des Serious Games. Les étudiants formés par serious games sont ils de meilleurs vendeurs? Est-ce que les jeux sérieux ont un impact, changent quelque chose ?
Hélène Michel a notamment présenté, lors de l’academic elearning forum, les résultats d’une expérimentation d’un Serious Game par les étudiants de l’ESC Chambéry. Elle a analysé les résultats obtenus à un examen théorique et professionnel d’un groupe de 110 étudiants en négociation commerciale (50% joueurs, 50% non joueurs).
"Nous avons pu constater grâce à cette étude que le serious game n’avait pas d’influence sur les conniassance théorique des étudiants. Mais ce n’est pas nécessairement ce que l’on cherche à évaluer. Ce qui nous ntéresse, c’est l’évaluation du comportement, et dans ce cas précis, du comportement de vente. Or du point de vue opérationnel, nous nous sommes rendus compte quele jeu avait eu un impact très fort. Il a eu un effet boooster mais également de renforcement de la compétence."
Plus que les résultats en eux-mêmes, il est intéressant de comprendre, ce qu’apportent les serious game en matière de formation et s’ils peuvent s’adapter à tous.
"Lorsque que l’on s’intéresse aux jeux sérieux, on se rend compte que la notion de simulation amène une approche systémique. En effet, une action joue sur de nombreux autres éléments et il est nécessaire de prendre en compte le contexte général.
Le deuxième aspect intéressant est que le serious game permet le flow, et donc l’immersion. De nombreux facteurs permettent de créer l’immersion : le son, le graphisme, la temporalité… Toute cette immersion va permettre de renforcer le moment d’apprentissage. On essaie de renforcer l’immersion par le flux et la simulation renforce l’immersion.
Le gros avantage de la simulation est qu’elle donne le droit à l’erreur. Or on se souvient plus de nos échecs que de nos réussites. Grâce aux jeux sérieux, il est possible de faire des expérimentations, de fonctionner par aller-retour. Cela permet de développer une attitude créative car on a la possibilité de tester plusieurs réponses.
Avec un serious game, on vit une expérience d’apprentissage, l’objectif est de faire émerger une compétence, un savoir-faire, une connaissance ou un comportement.
Il est ensuite nécessaire de transférer l’appris en situation réelle, et de faire l’étude de ce qu’il en reste."
"Dans le monde académique, l’utilisation des serious games est connnue mais spécifiquement pour les compétences (ex : gérer un budget). Ce qui est nouveau, c’est l’introduction de serious games sur des dimensions comportementales et de savoir également comment évaluer le transfert dans ce cas spécifiques. Pour évaluer cela, les étudiants ont dû réaliser un sketch de vente devant des représentants d’entreprises en situation "professionnelle".
Hélène Michel conclue en insistant sur le fait que « les jeux de simulation peuvent amener une sorte de ré enchantement de la formation, l’apprentissage. »
Condition Sine Qua non de la réussite d’un serious game
Lors de l’Academic Elearning forum, Alastair Giffin, Co-fondateur et PDG de Prendo Simulations a présenté qu’elles étaient selon lui, les clés de la réussite d’un serious game
– Il ne doit être ni trop simple, ni trop complexe
– Il doit rester transparent, si les participants se retrouvent face à une boîte noire, cela ne sert à rien
– Il doit y avoir un contexte, une logique
– Il doit pouvoir se faire en équipe pour créer une émulation, une communication. La partie émotionnelle des serious game est très importante, encore plus quand elle est partagée.
– L’encadrement est nécessaire. En effet, un professeur sera très utile, pour encadrer une discussion pendant le jeu sérieux ou pour permettre aux équipes de débriefer car c’est souvent à ce moment précis que le déclic a lieu.
Anne-Sophie Duguay