65 % des salariés ont le sentiment d’être dépendants aux écrans.
C’est le constat marquant de l’étude inédite menée par VerbaTeam, en partenariat avec l’Institut Viavoice, sur l’hyperconnexion au travail. Une dépendance qui ne se limite plus à un simple usage professionnel, mais s’étend à la sphère personnelle, brouillant chaque jour un peu plus les frontières entre vie privée et vie professionnelle.
Ce phénomène, encore trop souvent banalisé, exerce pourtant une pression constante sur la santé mentale et physique des salariés. Comme le souligne Flore Serré, Directrice Générale de VerbaTeam, lors du webinar organisé sur le sujet :
« L’hyperconnexion, on la connaît tous sans vraiment la comprendre. On passe en moyenne plus de sept heures et demie par jour derrière un écran, et ce temps ne cesse d’augmenter. »
L’hyperconnexion des salariés : un fléau collectif sous-estimé
L’étude révèle que 78 % des salariés exercent une activité impliquant un travail régulier derrière un écran. Mais ce temps d’écran déborde largement du cadre professionnel : démarches administratives, loisirs numériques, streaming, réseaux sociaux… Résultat, la déconnexion devient presque impossible.
Près de 65 % des salariés se déclarent dépendants, et plus d’un sur deux estime que cette dépendance s’est aggravée depuis le Covid. « L’hybridation du travail et le télétravail ont accentué le phénomène, explique Flore Serré. Les repères se sont effacés et la porosité entre vie privée et vie professionnelle est devenue la norme. »
Cette surconnexion s’accompagne d’effets tangibles sur la santé : fatigue oculaire, troubles du sommeil, difficultés de concentration, anxiété… Le Dr Alexandre Maisonneuve, Directeur Médical et Innovation Santé chez AXA France, rappelle que les mécanismes à l’œuvre sont proches de ceux observés dans les addictions :
« Quand un salarié consulte son téléphone par automatisme, c’est le même schéma que pour une dépendance. On passe de la passion à l’addiction, avec perte de contrôle. »
Selon lui, 42 % des salariés présentent même des signes de dépendance réelle. Une donnée alarmante, d’autant qu’elle concerne toutes les générations, en particulier les 35-49 ans, souvent parents ou managers, pris entre obligations professionnelles et familiales.
Salariés en quête d’équilibre : vers une prise de conscience salutaire
Si le constat est préoccupant, l’étude révèle aussi une forme d’espoir : la majorité des salariés expriment une volonté de reprendre le contrôle.
40 % souhaitent réguler leur usage des écrans en raison de ses effets sur leur santé mentale, 38 % pour préserver leur vie familiale et 36 % pour retrouver une vie sociale plus riche.
Cependant, seuls un tiers des salariés déclarent que leur entreprise agit concrètement pour limiter l’usage excessif des écrans. Or, 75 % d’entre eux attendent que leur employeur s’engage davantage. Pour Flore Serré, « il ne s’agit pas d’un défi individuel, mais bien collectif. L’entreprise a un rôle clé à jouer dans la régulation de l’usage numérique, au même titre qu’elle agit pour la santé au travail. »
Plusieurs leviers sont proposés : instaurer des périodes explicites de déconnexion, sensibiliser les équipes à l’usage raisonné des outils digitaux, former les managers à l’exemplarité numérique ou encore limiter les notifications.
« Un dirigeant qui envoie un message à 22 h contribue à installer une culture d’hyperdisponibilité », reconnaît Flore Serré. « Il faut redonner de la valeur à la qualité du travail, pas à la disponibilité. »
Repenser la culture du “toujours connecté”
Le défi est aussi culturel. Depuis des années, la performance est souvent associée à la surconnexion : celui qui répond à toute heure est perçu comme plus investi. Mais cette culture du “toujours connecté” atteint aujourd’hui ses limites.
« Nous devons repenser la performance durable, souligne le Dr Maisonneuve. Être constamment sollicité réduit la concentration, favorise la dépriorisation et nuit à la santé mentale. »
Les entreprises ont tout à gagner à agir : au-delà de la prévention des risques psychosociaux, la déconnexion s’inscrit aussi dans les enjeux RSE et environnementaux. Moins de mails, moins de data échangées, c’est aussi moins de consommation énergétique.
Flore Serré conclut :
« L’hyperconnexion est un phénomène massif, connu mais encore trop banalisé. Agir, c’est répondre à une attente forte des salariés et préserver la performance durable de l’entreprise. »