De la crise nait souvent le changement. Le contexte actuel pousse en effet les entreprises à adapter leur gestion des RH pour assurer leur développement. Certaines le font vertueusement notamment en renforçant leurs dispositifs d’attraction et de fidélisation des talents. La crise ne datant pas d’hier, on ne compte plus les études qui démontrent le ROI de bonnes pratiques de Talent Management par ces temps difficiles. Plus forte productivité, meilleur engagement des salariés, plus grande fidélité… La dernière illustration très claire de ce ROI est la récente étude du BCG « creating people advantage 2014-2015 ». Elle pointe à nouveau le lien fort entre performance financière et performance RH et plus particulièrement la qualité du leadership et du Talent Management comme critères distinctifs des entreprises les plus performantes. Pouvoir compter sur des talents est toujours un avantage, dans cette période de crise c’est un facteur décisif.
Pourtant, malgré toutes ces études très bien documentées, on constate que certaines phases des processus de gestion des talents restent encore très perfectibles. C’est tout particulièrement le cas de la phase amont : l’identification. Or cette phase est clé car de nombreux autres processus en découlent. Développement, rémunération, succession… ne porteront pleinement leurs fruits que s’ils reposent à la base sur une bonne identification des personnes sur qui investir. Alors comment détecter un talent ? Qu’est-ce qui le caractérise ? Comment faire apparaître sur les radars des DRH ceux qui feront la différence en temps de crise?
Quand on ne sait pas clairement ce que l’on cherche, on a forcément plus de difficultés à le trouver !
La notion de « talent » est en effet mal définie. Les critères sont parfois inexistants, parfois flous et restent souvent hétérogènes d’une entreprise à l’autre ou même d’un manager à l’autre. Cependant, tout espoir n’est pas perdu puisqu’à force d’utiliser cette notion, on s’aperçoit que des dénominateurs communs finissent par émerger. C’est notamment un des enseignements de l’étude de Silzer & Church (the pearls and perils of identifying potential, 2009) qui isole une vingtaine de critères communément utilisés. C’est un progrès mais mettons-nous un instant à la place d’une communauté de managers impliqués dans une talent review. De façon pragmatique, combien de critères peuvent-ils prendre en compte si l’on veut qu’ils soient compris, partagés et correctement utilisés ? 6 à 8 maximum d’après notre expérience, less is more.
Quels sont les critères qui comptent vraiment ?
Sur la base de ces recherches académiques et pour savoir comment se concentrer sur les critères qui comptent le plus, Cubiks a réalisé une étude avec plusieurs clients internationaux et récolté plus de 4000 données. Nous n’avons pas choisi d’étudier seulement les dimensions importantes pour performer à haut niveau mais aussi et surtout les qualités nécessaires pour progresser jusqu’à ces niveaux.
C’est une différence importante qui permet de se focaliser sur un petit nombre de critères applicables à un grand nombre de postes. L’important n’est pas tant de mesurer l’écart qui sépare le jeune talent de son objectif de poste (ex : gravir 2 niveaux hiérarchiques en 5 ans) mais plutôt de savoir si cette personne a le potentiel pour combler cet écart. Pour cela, un ensemble de qualités rares s’avère déterminant comme la capacité à :
- Acquérir de nouvelles compétences (Se crée-t-il des occasions d’apprendre ? Prend-il en main son propre développement ? Va-t-il au-devant du feedback ? Transfert-il facilement ce qu’il apprend d’un domaine à un autre ?)
- Gérer l’incertitude (Comment fait-il face aux paradoxes ? Sait-il décider en situation ambiguë ?) et la complexité (Va-t-il rapidement au cœur du problème en dépit de « l’infobésité » ?)
- Faire preuve de résilience (Comment se confronte-t-il aux problèmes, aux échecs ? Reste-il positif face aux obstacles ?)
- S’adapter à son environnement (Est-il suffisamment agile pour comprendre les circuits de décision et s’inscrire dans les jeux d’influence ? Sait-il adapter son style relationnel aux autres, comprend-il leur ressenti, leurs émotions, leurs enjeux, leurs limites? )
- Se montrer proactif (Cherche-t-il à avoir une prise sur les choses ? A agir plutôt que subir ? Est-il orienté « solution » ou « problème » ? Apporte-t-il une contribution au-delà de son périmètre immédiat ?)
- Garder un cap (Cherche-t-il à s’inscrire durablement dans un projet d’entreprise ? Fait-il preuve de constance dans ses comportements ? Se détermine-t-il par rapport à ses valeurs ?)
Cette combinaison de qualités difficiles à acquérir permet d’identifier les personnes qui se démarquent par leur capacité à progresser mais aussi, puisque nous avons parlé de complexité, de changement, d’incertitude, de proactivité, à apporter une valeur ajoutée tout particulièrement en temps de crise.
Comment mesurer ces dimensions ?
Là encore, un changement est nécessaire par rapport aux méthodes d’évaluation « traditionnelles ». Evaluer le potentiel est complexe puisqu’il s’agit par définition de savoir si une personne sera capable d’utiliser efficacement certaines compétences critiques alors qu’elle n’a encore pas ou peu eu l’occasion de les mettre en œuvre. Où sont les preuves ? Sur quelles informations s’appuyer ? Se contenter de l’avis des managers est risqué car ils confondent souvent performance et potentiel et sont de bien meilleurs juges de la performance quotidienne que du potentiel futur. De même, les techniques d’entretiens structurés classiquement utilisées donnent des informations valides pour une prise de poste à court terme mais ne sont pas non plus efficaces pour prédire le potentiel à plus long terme. Autrement dit, les talent reviews sont souvent alimentées par des informations peu prédictives du potentiel.
Si l’on veut vraiment se donner les moyens d’évaluer le potentiel de façon objective et valide, la meilleure approche reste l’Assessment Center. Cette approche multi outils/multi évaluateurs croise les angles d’évaluation et les sources d’information de façon très complète et permet de faire une projection fiable du potentiel d’un individu. Cette approche se démocratise d’ailleurs puisque de plus en plus d’entreprises internalisent leurs Assessment Centers.
Vous allez dire que les moyens à mettre en œuvre sont importants et ne permettent pas forcément de faire passer un grand nombre de personnes à travers ce dispositif. C’est vrai et pour cette raison Cubiks a travaillé sur une alternative plus pragmatique pour objectiver les discussions d’une Talent Review. Il s’agit du questionnaire Talent Indicator. Il repose sur 3 principes. La simplicité : il s’agit d’un questionnaire en ligne d’une dizaine de minutes que l’on peut administrer pour un grand nombre de personnes. La collégialité : le questionnaire est rempli par plusieurs managers seniors (hiérarchiques, fonctionnels, transverses… pour se départir du poids trop fort du manager direct et objectiver l’évaluation) qui ont travaillé en proximité avec la personne évaluée. La focalisation sur les critères de potentiel : le questionnaire porte exclusivement sur les critères de potentiel cités plus haut afin d’amener les managers à se prononcer sur les critères importants et non en fonction de leur propre définition. Ce questionnaire ne remplace pas un Assessment Center complet mais il permet déjà d’apporter des informations qui enrichissent considérablement la discussion en Talent review.
Pas de remède miracle à la crise ni de pilule magique, mais de bonnes pratiques à même de vous permettre de détecter ceux qui sauront conduire la barque par temps fort, et c’est déjà pas mal !
A propos de CUBIKS
Cubiks est un cabinet de conseil international en évaluation et développement des compétences. Nous accompagnons les entreprises dans la mise en œuvre d’actions d’identification et de sélection des talents, de développement des compétences et de management de la performance.