« Aucun délai n’est imparti au salarié protégé pour demander sa réintégration lorsque la rupture de son contrat de travail a été prononcée en violation du statut protecteur, et que ce n’est qu’au cas où l’entreprise a disparu, ou en cas d’impossibilité absolue de réintégration, que l’employeur est libéré de son obligation », selon la Cour de cassation, dans cet arrêt du 10/07/2019.
Dans cette affaire, un salarié protégé (délégué syndical) avait été licencié pour motif économique en mai 2003. Il avait saisi la juridiction prud’homale d’une demande d’annulation de son licenciement en invoquant l’absence d’autorisation administrative préalable.
Après un le 1er arrêt de cassation de juillet 2014, le salarié, en cours de procédure, formula une demande de réintégration dans l’entreprise en septembre 2014.
La cour d’appel débouta le salarié de sa demande de réintégration et de sa demande d’indemnisation afférente, au motif que la demande de réintégration formulée était tardive faute d’avoir été présentée avant l’expiration de la période de protection, et qu’il y avait donc lieu aussi de rejeter sa demande consécutive de rappel de salaire.
La Cour de cassation a donc jugé que la cour d’appel avait violé les articles L.2143-10, L.2411-1 et L.2411-3 du code du travail (dans leur rédaction applicable à cette affaire), en précisant que :
- la demande de réintégration n’est soumise à aucun délai,
- lorsque le salarié demande sa réintégration pendant la période de protection, il a droit, au titre de la méconnaissance du statut protecteur, à une indemnité égale à la rémunération qu’il aurait perçue depuis la date de son éviction jusqu’à sa réintégration ;
- cette indemnité lui est également due lorsque la demande de réintégration est formulée après l’expiration de la période de protection en cours pour des raisons qui ne sont pas imputables au salarié ;
- toutefois, dans cette dernière hypothèse, le salarié qui présente de façon abusive sa demande de réintégration tardivement, n’a droit, au titre de la violation du statut protecteur, qu’à la rémunération qu’il aurait perçue du jour de la demande de réintégration à celui de sa réintégration effective (cf. également Cass. soc. 07/11/2018 n°17-14716).
Balayons toutefois les quiproquos : s’il se fut agi d’une résiliation judiciaire du contrat de travail (cas des manquements suffisamment graves de l’employeur à ses obligations – Cass. soc. 16/03/05 n°03-40251 – hypothèse d’un salarié protégé portant sa demande devant les prud’hommes, mais qui se ferait ensuite licencier en cours de procédure après la période de protection de son mandat), dans ce cas, la résiliation judiciaire qui produit les effets d’un licenciement nul n’aurait pas fait naître de droit à réintégration (Cass. soc. 03/10/2018 n°16-19836).
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Stéphane VACCA
Avocat au barreau de Paris – Droit du travail