L’heure est à la modération des hausses de salaire dans les 100 premières entreprises européennes mais le modèle de « rémunération à la performance » reste très prisé pour la rémunération des dirigeants, selon Hewitt Associates.
Hewitt Associates, cabinet de conseil mondial en externalisation, management des ressources humaines et des risques financiers associés, publie les résultats de son enquête annuelle 2010 Eurotop 100 Directors’ Remuneration. Cette enquête analyse l’impact de la crise sur les structures de rémunération au sein des 100 premières entreprises européennes. Elle révèle ainsi une modération de la hausse des salaires des dirigeants mandataires sociaux et d’une baisse de leurs primes variables.
S’appuyant sur les données de l’indice FTSE Eurotop 100, cette deuxième édition de l’enquête montre que le modèle de « rémunération à la performance », qui associe rémunération fixe et rémunération variable, reste très prisé. Elle montre également que la récession économique a commencé à faire sentir ses effets sur la rémunération des dirigeants à partir de la fin 2008. A titre d’exemple, pour les sociétés qui ont communiqué les niveaux de salaire pour 2009/2010, la hausse médiane des salaires est de 1,3 % contre 5,5 % en 2008/2009, plus d’un tiers des dirigeants n’ayant bénéficié d’aucune augmentation. De même, les primes annuelles attribuées en 2008/2009 ont baissé par rapport aux niveaux de 2007/2008.
Jean Lambrechts, en charge de l’activité de conseil en rémunération des dirigeants chez Hewitt France, analyse : « La rémunération des dirigeants fait les gros titres et les données dont nous disposons montrent que les grandes entreprises européennes ont réagi en modérant les hausses de salaire. Le modèle de « rémunération à la performance » fonctionne puisque les primes variables ont été réduites de près d’un tiers, dans un contexte de baisse des résultats d’entreprise. »
Les spécificités nationales
Alors que la Commission européenne a publié en 2009 ses recommandations sur la rémunération des dirigeants, l’enquête menée par Hewitt montre que les politiques de rémunération des entreprises de l’indice Eurotop 100 ont encore de fortes spécificités nationales. Les niveaux des salaires de base sont plus bas dans les pays nordiques et en France qu’en Espagne, où ils sont les plus élevés. Les primes annuelles représentent une part plus importante de la rémunération globale en Allemagne et en Espagne tandis qu’au Royaume-Uni et en Suisse, la rémunération en capital (actions, stock options) est généralement plus élevée.
La France se situe entre ces deux groupes de pays, avec une rémunération en capital tout de même plus importante que les primes annuelles.
Jean Lambrechts explique : « La récession a amené les gouvernements, les autorités de contrôle et les associations d’investisseurs à renforcer leurs recommandations sur la rémunération des dirigeants, ce dans toute l’Europe, mais à des degrés divers. Si certains pays européens ont simplement renforcé le cadre existant, d’autres, tels que la France et l’Allemagne, sont allés plus loin en adoptant une législation et un code de gouvernance plus stricts. Les systèmes mis en place incitent les entreprises à être plus transparentes et à mettre davantage l’accent sur la rémunération de la performance à long terme. »
Nouvelles tendances
L’enquête de Hewitt témoigne de l’émergence de nouvelles tendances. Lors de la publication de leurs résultats pour 2009, certaines entreprises pourraient annoncer le versement de primes importantes, même si les bénéfices 2009 ont été inférieurs à ceux de 2008. Cela risque de susciter une nouvelle polémique et de relancer le débat sur les primes annuelles.
Selon Jean Lambrechts, « Un bon plan de primes n’est pas uniquement indexé sur les bénéfices. Ceux-ci constituent certes un élément clé, mais il convient de tenir compte d’autres paramètres financiers et non financiers qui reflètent la performance durable au sens large. Les primes seront mieux acceptées si elles sont assorties de délais de paiement plus longs, éventuellement versées en actions et, pour certains pays, restreintes par des clauses de remboursement (clawback). Cependant la question la plus importante qui se pose aux conseils d’administration est celle du choix et de la pondération des éléments retenus pour le calcul des primes en 2010. »
Quelle est l’évolution de la rémunération au sein de la fonction RH ? Découvrez la réponse dans notre article salaire RH.
Principales conclusions de l’enquête
Salaire de base
– La hausse médiane des salaires des premiers dirigeants, dans les sociétés qui ont communiqué les niveaux de salaire 2009, s’élève à 1,3 % contre 5,5 % l’année précédente.
– Le salaire médian des premiers dirigeants des entreprises de l’indice Eurotop 100 s’élève à près de 1,2 million d’euros.
– Le salaire médian des directeurs financiers des entreprises de l’indice Eurotop 100 pour 2009/2010 s’élève à environ 760 000 euros, et celui des autres directeurs exécutifs à environ 650 000 euros.
Prime annuelle
– Les primes réellement perçues par les dirigeants en 2008/2009 correspondent à environ 100 % du salaire (ou environ 70 % de la prime maximale possible, lorsque celle-ci est communiquée), ce qui représente une baisse d’environ un tiers par rapport à 2007/2008.
– La prime annuelle médiane maximale possible pour les dirigeants correspond à 180 % du salaire. Pour les directeurs financiers et autres directeurs exécutifs, elle correspond à 150 % du salaire.
– Le plan de prime annuel de près d’un tiers des entreprises prévoit un versement différé.
– Seules quatre entreprises déclarent avoir inséré une clause de remboursement dans leur plan de prime annuel.
Plans incitatifs à long terme
– La plupart des plans incitatifs à long terme mis en place par les entreprises de l’indice Eurotop 100 le sont sous forme de rémunération en capital (actions, stock options) plutôt que sous la forme d’une rémunération en espèces (seules 5 entreprises ont opté pour cette deuxième formule).
– Les actions de performance constituent désormais le type le plus courant de plan incitatif à long terme et sont utilisés par 55 des entreprises de l’indice Eurotop 100. 49 entreprises ont octroyé des stock-options, généralement assorties de conditions de performance, contre 53 en 2008. 17 des entreprises ont mis en place des plans d’abondement en actions qui incitent les dirigeants à acheter des actions de la société pour pouvoir bénéficier d’une attribution d’actions.
– La valeur médiane estimée des plans incitatifs à long terme octroyés aux dirigeants des entreprises de l’indice Eurotop 100 correspond à 154 % du salaire, ce qui équivaut globalement à une attribution d’actions de performance d’une valeur nominale égale à 280 % du salaire.
– Le bénéfice par action (BPA) et le taux de rendement global (Total Shareholder Return, TSR) restent les indicateurs de performance les plus fréquemment utilisés dans les plans incitatifs à long terme.
– Dans la plupart des cas, la rémunération en capital est soumise à des conditions de performance, y compris les plans de stock options.
Rémunération totale espèces
– La rémunération totale en espèces médiane des premiers dirigeants s’élève à environ 4,4 millions d’euros, à objectifs atteints. Pour les directeurs financiers et autres dirigeants mandataires sociaux, elle s’élève à environ 2,9 et 2,5 millions d’euros respectivement.
Plans de retraite
– Le type de plan de retraite et le niveau des prestations dépendent en grande partie de la réglementation locale et notamment de la fiscalité locale.
– Dans des pays comme le Royaume-Uni, les plans de retraite à prestations définies perdent rapidement du terrain au profit des plans à cotisations définies.
– Dans d’autres pays tels que la France ou l’Allemagne, les plans de retraite à prestations définies restent la norme.
L’enquête 2010 Eurotop 100 Directors’ Remuneration analyse les niveaux de rémunération dans les entreprises qui composent l’indice FTSE Eurotop 100 (composition en août 2009). Elle analyse le niveau global de rémunération ainsi que le niveau et la pondération des différents éléments.
Pour en savoir plus sur la composition de l’indice FTSE Eurotop 100 : http://www.ftse.com/Indices/FTSE_European_Index_Series/Constituents.jsp