En France, si à peine 10 % de salariés sont officiellement en situation de télétravail, le développement des nouvelles technologies a amené les cadres à être de plus en plus mobiles et confrontés à des problématiques de management à distance. Une situation pour laquelle ils n’ont pas forcément été préparés et qui inquiète encore trop souvent les entreprises et les salariés eux-mêmes.
En octobre 2011, la CCI de Paris qualifiait le télétravail comme un réel moteur de croissance et d’emploi. Plus récemment encore, dans un rapport publié début février 2012 par le Centre d’analyse stratégique sur « Les nouvelles mobilités dans les territoires périurbains et ruraux », le travail à distance était logiquement cité parmi les solutions innovantes de services quotidiens. Sans aucun doute, le télétravail dispose d’un réel potentiel de développement dans les dix prochaines années. Encore faut-il que la France rattrape son retard et que les entreprises passent outre leurs traditionnelles réticences envers cette nouvelle forme de travail.
Un cadre clairement défini
Parmi justement les freins au développement du travail à distance en France, la question du management reste celle qui inquiète encore le plus les chefs d’entreprise. Une chose est sûre : en rompant avec une certaine unité de temps, de lieu et d’action, le travail à distance bouleverse l’organisation du travail, ses codes, et l’exercice traditionnel des pratiques de management. Aux entreprises donc de prendre le tournant de ces nouvelles réalités managériales et d’utiliser des solutions et outils adaptés.
Au-delà des traditionnelles questions du contrôle des tâches et de la nécessaire séparation entre vie familiale et vie professionnelle du télétravailleur, il est notamment pertinent de définir avec précision le cadre du travail à distance et de clarifier le dispositif tant du côté du salarié que de celui de sa hiérarchie. L’organisation de points projets réguliers avec les équipes et d’une évaluation précise de la charge de travail (on considère qu’un télétravailleur effectue près de 20 % de travail en plus par jour qu’un salarié au bureau, est-ce une raison pour lui en donner plus ?) apparaît également primordiale dans les entreprises.
Des rencontres physiques incontournables
Le groupe Orange s’est positionné déjà depuis plusieurs années de manière claire sur cette question de management et de télétravail. En proposant des solutions techniques adéquates à ses clients d’abord mais aussi, en interne, en menant une vraie politique d’encadrement du travail à distance dans le groupe. En 2009, il signait d’ailleurs un accord qui encadrait les pratiques de télétravail dans l’entreprise et responsabilisait les managers sur l’organisation de leurs équipes distantes.
Pour Brigitte Dumont, adjointe au DRH du groupe Orange, en plus de ce nécessaire encadrement, de l‘organisation régulière de formations ou de la mise à disposition d’outils informatiques adaptés, la question des rencontres physiques est impérative dans un contexte de management des télétravailleurs : « Concrètement, sous l’impulsion des managers, des contextes formalisés de rencontres entre les télétravailleurs et leurs collègues sont mis en place chez Orange. Ils participent à la socialisation des télétravailleurs et leur rappellent qu’ils appartiennent à un collectif de travail. C’est un moyen unique pour lutter contre les situations d’exclusion d’un côté comme de l’autre ». Selon elle, à tout moment, le salarié, qu’il soit distant ou non, doit savoir répondre à la question : « Comment ma contribution s’intègre-t-elle à un projet plus global ? »
De la nécessité de travailler en réseau
Et si de grandes entreprises œuvrent au développement du télétravail, d’autres structures, plus transversales, étendent leur réflexion sur les bonnes pratiques susceptibles de développer le télétravail en France. En expert des questions relatives au travail à distance, Zevillage, réseau social sur les nouvelles formes de travail, organisait le mois dernier à Lille un barcamp* sur ces problématiques de management et de télétravail.
A l’heure de la mobilité, une trentaine de professionnels – télétravailleurs, responsables RH en entreprises, créateurs d’espaces de coworking, représentants de chambres de commerce… – ont partagé leur expertise sur le sujet.
On y a notamment parlé de l’intérêt de travailler en réseau, de mettre en place un management participatif et collaboratif, de « créer du lien » en favorisant la créativité et l’innovation et, comme chez Orange, d’organiser des rendez-vous physiques, véritables leviers sur la motivation et le sentiment d’appartenance à une « communauté œuvrant à un projet commun ».
Audrey CAUDRON VAILLANT
*Un BarCamp est une rencontre, une non-conférence, ouverte qui prend la forme d'ateliers-événements participatifs où le contenu est fourni par les participants qui doivent tous, à un titre ou à un autre, apporter quelque chose (Wikipédia).