C’est un vieux réflexe bien ancré chez nos DRH et recruteurs opérationnels.
Au moment de recruter un cadre, parce qu’il ne faut prendre aucun risque, le choix se porte sur les profils les plus conformistes. Les cabinets de recrutement sont contraints de suivre la tendance: difficile pour eux de déplaire à leurs clients qui exigent le plus souvent des « clones » parfaitement calibrés et surtout sans aspérités.
Qu’entend-t-on par « clones » ? Ni trop jeunes, ni trop « vieux », de formations initiales classiques (école de commerce ou école d’ingénieurs), issus du même secteur d’activité et ayant déjà eu les mêmes responsabilités que celles qu’on veut leur confier.
Alors, en ces temps de crise, vraiment pas d’avenir pour les parcours « atypiques » ? On ne peut nier le phénomène du clonage mais il tend à s’effacer dès que l’on grimpe dans la hiérarchie. Ayant accompagné nombre de dirigeants dans leur repositionnement professionnel, L’Espace Dirigeants sait aujourd’hui que le recrutement standardisé est loin d’être une fatalité.
D’abord, les cabinets de chasse de tête de haut niveau sont souvent plus audacieux que leurs clients donneurs d’ordre. Souvent ex-dirigeants, les associés de ces officines savent que le « savoir être » d’un top manager comptent autant que ses compétences purement professionnelles.
Mieux vaut avoir une forte personnalité et des qualités de communicant pour ce genre de postes. Pour preuve, l’exemple de Valérie, ex directeur financier, reçue par le consultant d’un prestigieux cabinet de chasseur de tête pour un poste de DAF. Au cours de la conversation, le consultant lui dit : « je n’y avais pas pensé au départ mais vous pourriez intéresser un autre de mes clients, un fond d’investissement qui recherche … un DG pour une start-up ! ». Un dénouement plus répandu que l’on croit.
Le clonage a bon dos
Pour des postes de cadres supérieurs, il ne faut pas croire qu’un parcours linéaire, une connaissance du secteur et une « bonne bouille » suffisent à convaincre un recruteur. Dès lors que plusieurs candidats se retrouvent en concurrence, ce qui va faire la différence c’est la motivation, la capacité à s’adapter et la compatibilité avec la personnalité du futur boss.
Si ces conditions ne sont pas remplies, il est plus facile de dire à un candidat « je ne vous ai pas retenu parce que votre niveau d’allemand était insuffisant » plutôt que «désolé je n’ai pas eu un bon feeling ». Le clonage a alors bon dos.
Des recruteurs nouvelle génération plus ouverts
Par ailleurs, dans un monde hyper-connecté et hyper-médiatisé, les futurs managers sont aussi les « ambassadeurs » de leur marque. Les recruteurs nouvelle génération en tiennent compte. Ils contribuent à faire évoluer les mentalités vers une plus grande ouverture aux profils atypiques censés être en mesure de se démarquer de la concurrence. Désormais, au sein de la profession du conseil en RH, certains tiennent un nouveau discours : le clonage nuirait sérieusement à la créativité et à l’adaptabilité des cadres.
Certes, il restera toujours des recruteurs frileux pour aller systématiquement chercher des clones. Le meilleur moyen d’y échapper pour un candidat sera alors de miser sur son réseau. En le développant intelligemment, il va pouvoir rencontrer hors de sa sphère professionnelle des décideurs en tête à tête. Un contexte plus favorable pour démontrer que même si l’on vient d’un secteur différent, ses compétences sont transposables dans un autre environnement et pour d’autres types de responsabilité.
Anne Lepinay
Directrice associée à l’Espace Dirigeants
Cabinet de conseil en transition de carrière