D’après une récente étude de la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), les Français auraient tendance à aller au travail alors que leur état physique ou mental ne leur permettent pas d’être pleinement productifs. Le présentéisme, un mal français ? Qu’en est-il du présentéisme à l’heure du télétravail ?
Pourquoi se rend-on au bureau alors que l’on ne se sent pas en état ?
En 2016, d’après l’étude, les salariés signalent en moyenne avoir été malades onze jours dans l’année, mais ont choisi de rester chez eux 8 jours seulement. Les trois jours restants, les salariés sont allés travailler en étant malades. Pourquoi ?
De nombreuses raisons poussent le salarié à préférer son bureau à son domicile, à commencer par les conditions de travail dans l’entreprise. “Les salariés qui signalent de mauvaises relations avec leur hiérarchie, un travail intense ou un sentiment d’insécurité économique ont tendance à passer au travail une part plus importante de leurs jours de maladie”, précise l’étude. Ce surinvestissement est souvent la source première du présentéisme. La taille de l’entreprise est aussi un facteur important : plus elle est petite, plus les salariés se sentent obligés de venir au bureau. Vient ensuite la peur de perdre son travail et la volonté d’être bien vu de ses collaborateurs et de ses managers.
Présentéisme et télétravail : quand la distance entre en jeu
Nous aurions tendance à croire que le boom du télétravail, la semaine de quatre jours et toutes les mesures qui encouragent une certaine flexibilité du travail feraient changer les mentalités quant à la présence au bureau. Cela est sans doute le cas chez les entreprises agiles, en phase avec cette évolution de l’organisation du travail. Or, le télétravail forcé, arrivé brutalement chez certaines entreprises lors du confinement, a mené la vie dure à certains salariés et affecté leur QVCT. Les entreprises, souvent peu préparées à cette transformation imprévue dans la manière de travailler et d’échanger ont été prises au dépourvu. Faute de confiance en leurs salariés, c’est la méfiance et la surveillance qui ont été accentuées avec la distance.
Cette distance liée au télétravail a pu impliquer “une surcharge collaborative” liée au besoin d’être en communication constante avec son équipe. La “réunionite” via Zoom, Skype, Teams est d’ailleurs l’un des symptômes du présentéisme à l’heure du Coronavirus et du télétravail. Les mails de suivis ont monté en flèche et certains managers en ont profité pour avoir un contrôle sur l’agenda de leurs collaborateurs et pour garder un oeil sur les temps de connexion, en témoignent la récente popularité des logiciels de tracking des employés. Résultat, une certaine fatigue liée à la surconnexion des salariés a été ressentie par ces derniers, baptisée “zoom fatigue” par les Américains.
Impossible donc de mettre en place un télétravail productif si la confiance ne règne pas dans l’équipe. Et plutôt que de miser sur un nombre d’heures de réunion virtuelles, d’appels téléphoniques ou de mails, pourquoi ne pas choisir de mettre en place des méthodes de travail qui valorisent les résultats ? Le présentéisme et le télétravail seraient sans doute moins liés.
Philippine SANDER