Le recrutement doit-il rester dans l’entreprise ou celle-ci, dans un contexte qui pousse à repenser le recrutement dans l’intégralité de ses process, a-t-elle intérêt à externaliser tout ou partie de son processus ? Des réponses tranchées selon qu’elles viennent de l’interne ou de l’externe.
In-house, outsourcing ? Si l’on interroge Thomas Vilcot, directeur du recrutement Groupe Casino et auteur de l’ouvrage « Le recrutement responsable – Pour ré-enchanter la relation candidats-entreprises », sur l’externalisation du recrutement, il répond sans ambages : « On a laissé trop longtemps la fonction recrutement dans l’ombre alors qu’elle est stratégique. Cette fonction, il faut la garder près de soi, en interne donc. » Si Casino a opté pour la création d’un CSP RH interne (ndlr : son retour d’expérience est traité dans un autre article du dossier), la question de l’acquisition des talents, en des temps où le recrutement doit renouveler son approche, mérite néanmoins d’être posée à chaque entreprise et c’est ce que fait Kelly OCG avec ses clients. « Il y a actuellement beaucoup de compétences disponibles sur le marché mais la frilosité, des candidats comme des entreprises, ne favorise pas la rencontre. Dans ce contexte, les entreprises les plus dynamiques sont celles qui repensent leur organisation et anticipent. Et dans un environnement de plus en plus complexe, nous provoquons le débat chez le client pour repenser le recrutement sur l’intégralité des process », explique Sylvère Sautron, directeur global solutions chez Kelly OCG.
Que faire des ressources dédiées en interne au recrutement quand on n’embauche plus ou peu ? Comment gagner en réactivité pour repérer les talents au bon moment ? Quelques-unes des questions actuelles. Certaines entreprises comme le Club Med optent pour une approche mixte, comme l’observe Thomas Estadieu, directeur associé de ConvictionsRH : « La partie sourcing est externalisée et un process de recrutement homogène a été mis en place grâce à un CSP interne ».
Le RPO, un marché naissant en France, limité au recrutement de profils standardisés
Venue des États-Unis, l’externalisation du processus de recrutement existe depuis 15 ans au sein du groupe Kelly et depuis environ dix ans en France, où elle a commencé à s’industrialiser ces trois dernières années. Prenant d’abord en charge des parties de process (sourcing, évaluation, process administratif et logistique), elle évolue vers le développement du Recruitment Process Outsourcing (RPO), c’est-à-dire vers l’externalisation de la globalité du process, un marché toutefois naissant en France. Qui plus est, externaliser l’intégralité d’un process de recrutement n’est efficace que dans des cas précis : « Sur des profils standardisés avec un fort turn-over comme les commerciaux. Dès lors qu’on a un gros volume et que le prestataire a une bonne connaissance du business de l’entreprise, on peut confier l’intégralité du process de recrutement, jusqu’à l’évaluation et au recrutement définitif du candidat ; cela marche lorsqu’il y a une bonne relation de confiance avec le prestataire et son client », observe Olivier Parent du Châtelet, associé en charge des activités de conseil RH chez BearingPoint. Les IT, l’industrie pharmaceutique, le secteur energy & utilities, la banque/assurance sont les secteurs les plus concernés par cette approche.
La qualité du lien avec le candidat en question
« Il y a sans doute davantage de réticence de la part des entreprises à externaliser ce processus car la question de l’image est prégnante, ainsi que la peur de la perte de contrôle », observe Sylvère Sautron. Une perte de contrôle qui, selon lui, n’est qu’un sentiment puisque le prestataire travaille sous le contrôle de son client. De plus, Kelly OCG, image employeur du client oblige, met l’accent sur l’expérience candidat « afin qu’il n’y ait pas de distorsion entre le discours employeur et la réalité des process internes de l’entreprise cliente ». Pour entretenir une relation la plus interactive possible avec le vivier de candidats, ce prestataire de solutions d’externalisation des processus métiers s’appuie sur le concept de Talent Relationship Management, facteur de lien et donc de réactivité quand l’entreprise cliente a un besoin de recrutement.
En conclusion, arrêtons-nous justement avec Thomas Vilcot sur la question du lien, qui rappelle la part subjective qui intervient dans un recrutement : « La fonction recrutement est confrontée au Web innovant ; actuellement moins d’un employeur sur dix sait d’où vient le candidat recruté, il faut donc arrêter de penser que le candidat est à un seul endroit. Aussi importe-t-il que le savoir-faire qui consiste à créer des points de contact avec lui soit interne car il y a une dimension affective dans le recrutement. Même le plus grand expert externe de la fonction ne pourra recruter avec la même qualité de lien. »
Sophie Girardeau