L’arrivée des réseaux sociaux et des job boards ont considérablement modifié les rapports entre les candidats et les recruteurs. Ces outils sont devenus des passages obligatoires pour toute personne en recherche d’emploi ou de la perle rare pour un poste. Ces rapports numériques ont-ils effacé l’humain? N’y a-t-il pas possibilité de remettre de l’humain dans ces relations? De nouveaux acteurs voient le jour sur internet. Pourront-ils se faire une place face aux Grands du domaine?
My RH Line a rencontré Benjamin Bühler, Directeur Marketing de Huzz.com pour commenter ce phénomène.
My RH Line : Pouvez-vous nous présenter Huzz.com ?
Benjamin Bühler : Huzz est un réseau social à l’intersection entre les réseaux sociaux classiques comme Facebook, par exemple, et les job boards plus traditionnels comme Monster, Carrierbuilder et d’autres. Nous sommes à la croisée de ces deux mondes.
Parmi les réseaux professionnels, Viadéo et Linkedin sont des incontournables. Nous ne sommes pas dans le même registre. Nous avons une unique finalité : permettre aux candidats de trouver un emploi et aux recruteurs de trouver la perle rare. Nous regroupons d’une part la finalité des réseaux sociaux traditionnels et d’autre part celle des job boards qui eux n’ont pas cette dimension sociale.
My RH Line : Pensez-vous qu’il reste une place à prendre pour les nouveaux réseaux sociaux ?
Benjamin Bühler : Oui, il en reste une. Nous nous positionnons sur un créneau particulier car, à ma connaissance, il n’existe aucun site réellement dédié au recrutement qui prenne la forme d’un réseau social. C’est pour cela que je pense qu’il reste encore de la place pour ce type de réseaux. Plus généralement, je pense que les concurrents des gros réseaux sociaux généralistes comme Facebook sont à l’abri pendant encore quelques années. Nous allons assister à l’émergence de réseaux sociaux plus spécialisés, par hobbies par exemple, ou professionnels, encore plus spécialisés par branche d’activité.
Il reste de la place donc pour les nouveaux réseaux sociaux. Il s’en crée, d’ailleurs, tous les jours et à tout niveau. Le vrai travail dans les mois, voire les années à venir va être de faire communiquer tous ces réseaux et de les imbriquer les uns aux autres, ce qui est l’attitude naturelle dans la vie réelle et qui dans l’existence numérique des uns et des autres va être amené à se reproduire.
My RH Line : Qu’apportez-vous de différents par rapport à un réseau comme Viadéo par exemple ?
Benjamin Bühler : Les personnes s’inscrivent sur Viadéo pour entretenir leur réseau professionnel, pour faire du business, pour montrer qu’elles sont en recherche d’emploi ou d’opportunités. Il faut opposer les réseaux sociaux aux job boards. Dans un cas vous avez le réseau social qui consiste à échanger ses relations, se mettre en contact les uns avec les autres, ce qui peut éventuellement déboucher sur de l’emploi, mais ce n’est pas la finalité. A contrario, vous avez les job boards qui n’ont que cet usage de recherche d’emploi, non des moindres avec les limites qu’on connaît aujourd’hui. C’est à sens unique. Le candidat va poster son CV et répondre à un certain nombre d’annonces, et de son côté, le recruteur va poster des annonces et recevoir des CV. Il faut compter sur des algorithmes pour rapprocher les uns des autres, à la fois le candidat qui est en recherche pour lui pousser des offres et le recruteur des candidats qui lui conviennent.
Nous sommes dans une optique différente. Nous laissons au recruteur et au candidat le soin de se rapprocher l’un de l’autre. C’est ça qui fait une réelle différence, il faut qu’il y ait une intervention de part et d’autre. Il faut une volonté de part et d’autre d’entrer en contact et les outils sont très simples.
C’est une approche beaucoup plus active que sur un job board classique voire sur un réseau professionnel où l’on s’attend, en mettant son CV, à obtenir des contacts avec des gens proches de son cercle professionnel ou des activités proches.
Quand vous passez par un job board, il y a tout un système de scoring qui va vous rendre plus ou moins éligible aux yeux d’un recruteur. Quand vous êtes côté candidat, vous allez répondre à des annonces qui vous sont poussées par la plate-forme.
Nous sommes vraiment tournés sur l’action de la part des candidats et des recruteurs.
La nouveauté qui se passe aujourd’hui c’est une mise en relation directe des demandes et de l’offre. Si j’ai envie d’entrer en contact avec un recruteur, il me suffit de lui envoyer un message. Libre à lui de répondre ou non mais on a déjà franchi une étape.
My RH Line : Quels sont les nouveaux acteurs qui apparaissent ?
Benjamin Bühler : Aujourd’hui dans le domaine du recrutement je ne vois que des acteurs américains qui lancent leurs sites locaux en France notamment. Ce sont des grosses machines et cela reste des machines, c’est en ça que nous sommes aussi différents. Derrière les machines, il y a des hommes, qui vous répondent, qui vous indiquent quoi faire si vous êtes perdus sur la plate-forme.
Je pense qu’il va plus y avoir une mutation des acteurs actuels. Des réseaux comme Linkedin ou Viadéo sont en train de prendre un virage social qui est un peu compliqué pour eux car leur modèle ce n’est pas ça.
Il y a également de gros acteurs du recrutement américains, notamment le groupe adenclassifieds qui lance une de ses filiales en France.
Il y a réellement une place et un besoin de nouveauté car les méthodes de recrutement classiques arrivent à saturation. Les candidats en ont assez de poster 100 fois leur CV, d’envoyer 100 candidatures pour, dans le meilleur des cas, obtenir une réponse négative. Les recruteurs de leur côté sont noyés sous des salves de CV plus ou moins en adéquation avec ce qu’ils cherchent. On atteint vraiment les limites de ces systèmes-là. Il y a également une chose qui va de pair avec le réseau social, le côté humain, c’est un retour à l’humain, qui devient de plus en plus limité dans le monde numérique. Ce retour est aussi illustré par les réseaux sociaux, où l’on a besoin de ce contact humain, de faire des rencontres de discuter avec des gens. Pour le recrutement, il est bon d’une part de se savoir accompagné et d’autre part de se dire que sa recherche d’emploi ne repose peut-être pas que sur une machine.
Avec Huzz on revient à l’humain grâce à l’outil.
Notre projet a plusieurs mois d’ancienneté et nous a amené, notamment en terme de communication, à réfléchir sur la manière de communiquer en faisant quelque chose d’utile sans dépenser tout notre budget communication. Cette chose utile nous l’avons faite le 24 septembre dernier en organisant La journée de l’emploi qui est une journée nationale. Elle avait pour but d’illustrer la manière dont chacun peut, à son propre niveau, agir en faveur de l’emploi. Les recruteurs peuvent par exemple proposer des journées portes ouvertes, publier davantage d’offres et les candidats peuvent décider se mettre en avant en remaniant leur CV. Les employeurs peuvent faire une présentation auprès de leurs salariés, de l’activité de la société. Chacun à son niveau, avec ses moyens, a possibilité d’agir en faveur de l’emploi. Cela a été notre petite pierre à l’édifice.
Le projet Huzz intervient dans cette démarche assez humaniste qui consiste à dire « mettons au service du recrutement et de l’humain toutes les ressources, les outils disponibles aujourd’hui pour le faciliter ». Le fait de se retrouver sans emploi, c’est souvent quelque chose d’assez difficile à vivre pour un candidat, difficile à appréhender, à traverser. Je trouve utile de donner à tous la possibilité d’accéder à un outil simple, humain qui permet d’entrer en contact avec des recruteurs potentiels, voire de discuter avec des salariés de sociétés qui intéresse. C’est plus que de simplement répondre à une offre. Le candidat aujourd’hui est capable de créer la demande. Nous souhaitons réinstaurer ce point d’équilibre entre candidat et recruteur. Dans les job boards, les recruteurs ont les pleins pouvoirs. Aujourd’hui, le candidat est capable de se faire son offre. C’est ça aussi la grande différence avec les moyens traditionnels qu’on connaît actuellement.
Nous avons vocation à être et à rester le premier réseau réellement dédié à l’emploi et c’est ce que nous cherchons à développer.
Propos recueillis par Anne-Sophie Duguay
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