Et si l’augmentation de salaire était initiée par les salariés eux-mêmes. Plutôt que par la direction, les RH ou les managers.
Certaines start-ups ont adopté ce principe. Deux approches sont alors possibles : intégrer un dispositif de progression globale dans la politique de rémunération de l’entreprise ou proposer une démarche complémentaire à la politique en place pour permettre des évolutions salariales supplémentaires.
Dans les deux cas, c’est le salarié qui peut et doit prendre l’initiative d’augmenter son propre salaire.
Démontrer sa progression et obtenir une augmentation de salaire
Certaines entreprises permettent par exemple à leurs salariés d’obtenir une augmentation de salaire par le biais d’une soutenance. La condition étant de réussir ce « grand oral », bien entendu.
Ainsi, l’attribution d’une augmentation salariale ne dépend plus uniquement du manager. Elle repose à la fois sur l’initiative de l’individu concerné et l’analyse de ses pairs.
En effet, ce processus, lié aux valeurs de l’entreprise, permet aux salariés de prétendre à une augmentation à tout moment. Mais aussi de recevoir du feedback de leurs managers et de leurs collègues.
Les critères sont connus à l’avance, et la progression est évaluée par un jury. Ceci dans le but de responsabiliser les salariés sur leur propre évolution professionnelle. Tout en impliquant les collaborateurs les plus expérimentés sur la progression des profils juniors. En cas de réussite de la soutenance (c’est le jury qui décide), l’augmentation est prévue dans une grille. Plus 4k sur la rémunération annuelle brute fixe, par exemple.
Dans ce type de structure, il n’y a donc pas de période où seraient regroupés tous les entretiens annuels. Ni d’augmentations salariales collectives. La logique est individuelle et ne dépend pas d’un calendrier imposé.
Initier sa propre augmentation salariale
Lors des investigations menées pour l’écriture de Quand les start-up, scale-up et licornes réinventent les RH, j’ai pu observer un autre procédé d’augmentation salariale à la main des collaborateurs.
Ces derniers peuvent parfois demander et décider de leur propre chef d’une augmentation de leur rémunération. Les entreprises qui permettent cela l’autorisent pour les salariés ayant une certaine ancienneté. Au moins 2 ou 3 ans, parfois plus. Ces salariés sont alors invités à envoyer une demande motivée, souvent par écrit, qui sera soumise à des avis consultatifs. Celui du manager et/ou des RH, par exemple.
Après cet avis, quel qu’il soit, si le salarié maintient sa demande, elle sera alors débattue devant un comité composé de représentants de la direction, du service RH et parfois aussi de collaborateurs expérimentés. Et à la fin, quel que soit l’avis du comité, le salarié décide de retirer, modifier ou maintenir l’augmentation de salaire envisagée.
Les rares DRH qui ont déployé ces pratiques misent sur le recul de salariés ayant assez d’ancienneté pour trouver un équilibre entre leurs intérêts et ceux de l’entreprise. Et ce, pour leur permettre de demander l’augmentation salariale qu’ils estiment juste au regard de leur profil et de leur travail.
Dans certains cas, ce système peut s’articuler avec une grille de rémunération déjà existante dans l’entreprise. Il y a alors des augmentations naturelles (quand le salarié passe un niveau prévu dans la grille). Mais les collaborateurs peuvent quand même prétendre à une meilleure rémunération que ce que prévoit la grille en en faisant la demande comme expliqué ci-dessus.
Des demandes qui nécessitent des arguments solides
Cependant, ces demandes nécessitent de présenter des arguments solides pour justifier une augmentation de salaire. Cela peut inclure des résultats exceptionnels, un investissement au-delà des attentes, ou la justification d’une valeur marché importante.
Par exemple, si le collaborateur possède des compétences rares dans son métier. Ce système vise ainsi à responsabiliser les collaborateurs. Et, quand il y a des grilles de rémunération, de répondre à des situations exceptionnelles non prévues par ces grilles.
Pour que cela fonctionne, il faut un cadre permettant de faciliter et d’objectiver les échanges. Par exemple, la possibilité de faire la demande par écrit rend accessible ce format même pour les personnes moins à l’aise à l’oral. Plus globalement, la culture d’entreprise sera clé si elle accorde une place importante à la transparence, à la confiance et au dialogue.
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Bénéfices et limites de l’augmentation de salaire à la main du salarié
Ces pratiques singulières montrent une grande confiance accordée aux collaborateurs, ce qui est un atout pour attirer et fidéliser les talents. Elles permettent également de viser des rémunérations plus justes et d’instaurer une forte culture de la transparence et du dialogue.
Cependant, elles peuvent aussi créer des inégalités salariales si certains profils n’osent pas faire la démarche, ou n’arrivent pas réussir la soutenance. En effet, il faut s’exprimer en public et à l’oral, sur des sujets parfois tabous ou complexes (comme les compétences, les résultats obtenus au travail et l’argent gagné via le salaire). Il est donc important que ces pratiques reposent sur une culture d’entreprise compatible et propice à initier ou demander sa propre augmentation de salaire.
Si ces pratiques restent encore rares, elles ont le mérite d’illustrer comment des entreprises peuvent responsabiliser leurs salariés en matière d’évolution salariale, tout en promouvant une culture de transparence et de confiance.