Depuis plusieurs mois et pour encore quelques semaines, les pronostics sur les résultats des élections municipales sont dans toutes les conversations. Mais peut-on parler politique au bureau ? Jusqu’où les salariés peuvent-ils faire part de leurs convictions ? Que faire, s’ils sont candidats aux municipales ? Explications.
La prime à la liberté d’expression. En entreprise comme ailleurs, c’est la liberté d’expression qui prévaut. Donc que les salariés échangent leurs points de vue politiques sur leur lieu de travail est tout à fait possible. La seule limite c’est l’abus. « En la matière, il n’existe pas de liste d’abus pré établie. C’est à l’employeur de le caractériser et c’est ensuite laissé à l’appréciation des juges », argumente Me Eric Rocheblave. Il peut y avoir abus si le prosélytisme d’un salarié cause des troubles dans l’entreprise. « Si une majorité de salariés se plaint d’un collègue affichant sans cesse sa couleur politique, l’abus peut être caractérisé. Mais si cela ne dérange personne, ce n’est pas le cas. L’employeur doit avoir des raisons objectives pour qualifier un abus », illustre-t-il.
Une liberté d’expression potentiellement encadrée : même si les libertés publiques (dont les convictions politiques), ne s’arrêtent pas à la porte de l’entreprise, l’employeur peut tout de même les encadrer notamment par des clauses dans le contrat de travail ou le règlement intérieur. Ces clauses doivent être proportionnées au but recherché et, légitime par rapport aux intérêts de l’entreprise. « En la matière, on marche sur des œufs. L’action de la DRH doit être réfléchie et mesurée et doit aussi tenir compte de l’engagement politique du territoire. Dans des régions comme le Nord de la France où l’engagement politique et syndical sont forts, les juges peuvent être moins ouverts à la restriction de liberté d’expression en entreprise », précise notre avocat.
Pas de discrimination pour opinions politiques : comme pour les origines, le sexe, la religion, l’âge… pas question de discriminer un salarié pour ses opinions politiques affichées ou tout simplement connues.
Le salarié candidat à un mandat encadré par la loi : le législateur encourage et protège les salariés candidats aux municipales. Ainsi, le Code du travail (articles L 3142-56 à L 3142-59) prévoit qu’un salarié candidat au conseil municipal d’une commune d’au moins 3500 habitants peut demander à son employeur jusqu’à 10 jours ouvrables pour mener sa campagne. Chaque absence doit être d’au moins une demie journée et le collaborateur doit avertir son employeur au moins 24 heures avant. Sur demande du salarié, la durée des absences est imputée sur celle du congé annuel dans la limite des droits acquis à ce titre à la date du premier tour du scrutin. Si ce n’est pas le cas, les absences ne sont pas rémunérées. Elles donnent alors lieu à récupération en accord avec l’employeur. Enfin, notez que la durée de ces absences « candidature politique » est assimilée à une période de travail effectif. Elle compte donc dans le calcul des congés payés et de l’ancienneté.
Sylvie Laidet